Lorsqu'il était député de LaFontaine, l'ex-ministre libéral Tony Tomassi «a omis de respecter les valeurs de l'Assemblée nationale», conclut le Commissaire à l'éthique, Jacques Saint-Laurent, à la suite d'une enquête.

Il conclut toutefois que les absences de M. Tomassi à l'Assemblée nationale depuis le début de l'année et jusqu'à sa démission le 3 mai dernier sont justifiées par un «motif valable», c'est-à-dire son état de santé.

Dans un rapport daté du 7 juin, Jacques Saint-Laurent fait état des conclusions de son enquête sur l'ex-député Tomassi. Rappelons que le nouveau Code d'éthique et de déontologie des députés de l'Assemblée nationale est entré en vigueur le 1er janvier.

M. Tomassi est devenu député indépendant en mai 2010 après avoir été expulsé du caucus libéral par le premier ministre Jean Charest. Ce dernier venait d'apprendre que son ministre avait utilisé, au moment où il était simple député, une carte de crédit de la firme BCIA pour payer ses factures d'essence, même s'il recevait une allocation de l'Assemblée nationale pour son transport. M. Tomassi était également au centre d'une controverse au sujet de l'attribution de places subventionnées en garderie.

Tony Tomassi n'a mis les pieds au parlement que très rarement depuis mai 2010. Or, selon le code d'éthique, un député doit faire preuve «d'assiduité dans l'exercice de ses fonctions». «Il ne peut, sans motif valable, faire défaut de siéger à l'Assemblée nationale durant une période déraisonnable», ajoute l'article 35.

Le commissaire a donc entrepris des démarches auprès du député Tomassi pour qu'il respecte cette disposition. Il lui a demandé de justifier ses absences à l'Assemblée nationale. Selon le rapport, M. Tomassi n'avait aucun avis médical pour justifier ses absences en 2010 et 2011, donc avant l'entrée en vigueur du code. Il disait d'ailleurs aux médias qu'il travaille dans sa circonscription.

Le 3 février 2011, M. Tomassi a expliqué au commissaire qu'il ne peut siéger parce qu'il est visé par une enquête policière. Lors d'une rencontre le 20 décembre, le commissaire rappelle au député les dispositions du code qui entreront en vigueur. «L'avocat du député de LaFontaine demande au commissaire si l'état de santé du député sera considéré dans l'analyse de ce qui constitue un motif valable de faire défaut de siéger, au sens de l'article 35 du Code, indique le rapport. Le commissaire souligne alors que des motifs valables, basés sur des raisons de santé, peuvent exister.»

Le 13 février dernier,  le   député envoie une «note médicale» au commissaire. Son médecin indique qu'il sera absent «de façon indéterminée». Le commissaire exige un rapport médical complet. M. Tomassi envoie ensuite un deuxième billet du même médecin. Le 21 mars, il explique au commissaire qu'il attend toujours un rendez-vous avec un médecin spécialiste pour obtenir un rapport complet. En avril, le commissaire trouve lui-même un médecin expert pour M. Tomassi et fixe un rendez-vous. Le 4 mai, l'expert informe le commissaire que M. Tomassi «n'est pas en mesure d'exercer ses fonctions de député, principalement de siéger à l'Assemblée nationale».

Le commissaire conclut donc qu'il n'y a pas eu de manquement à l'article 35 du code, puisque M. Tomassi avait un «motif valable» de ne pas siéger. Il rejette donc une demande d'enquête formulée par le député caquiste Éric Caire sur les absences de M. Tomassi.

Mais le commissaire a mené une enquête sur le respect d'autres dispositions du code d'éthique. Ce dernier précise les valeurs de l'Assemblée nationale: «La conduite du député est empreinte de bienveillance, de droiture, de convenance, de sagesse, d'honnêteté, de sincérité et de justice. Par conséquent, le député (...) fait preuve de rigueur et d'assiduité», indique l'article 6.

Le commissaire conclut que M. Tomassi a violé cet article. «Malgré le contexte très difficile que rencontre M. Tomassi depuis qu'il siège comme député indépendant, il devait, à mon avis, faire preuve de cohérence avec les valeurs de rigueur et de service aux citoyens de l'Assemblée nationale, notamment pour qu'un diagnostic soit établi. Même si le député de LaFontaine n'était pas en mesure, selon lui, de siéger à l'Assemblée nationale, il ne pouvait, sans diagnostic approprié, s'autoriser lui-même une absence prolongée pour une durée indéterminée, sans autres mesures pour assurer l'exercice de toutes ses fonctions de député».

Ainsi, «dans l'exercice de sa charge de député, monsieur Tomassi a omis de respecter les valeurs de l'Assemblée nationale. Il a commis un manquement à l'article 6 du Code», ajoute Jacques Saint-Laurent.

Tony Tomassi a été accusé d'abus de confiance et de fraude envers le gouvernement le 11 octobre dernier. On lui reproche d'avoir accepté une récompense, un avantage ou un bénéfice de la part de Luigi Coretti et de sa firme BCIA, qui était en relation d'affaires avec le gouvernement. Il aurait tenté d'influencer le gouvernement en échange de cette faveur. Les faits qui lui sont reprochés se sont déroulés entre le 1er juillet 2006 et le 6 mai 2010. La cause reprend le 19 juin au palais de justice de Québec. On devrait alors fixer le moment de l'enquête préliminaire.