Avant d'être arrêté hier soir, Amir Khadir savait que la manifestation à laquelle il participait avait été déclarée illégale en vertu de la loi 78. Il a plus tard été arrêté en vertu de l'article 500.1 du Code de la sécurité routière.

M. Khadir devrait bientôt recevoir un constat d'infraction de 495 dollars. Il promet de le contester.

C'est un geste de «désobéissance civile» qu'il a choisi de faire hier. Et il le referait, a-t-il assuré ce matin en conférence de presse.

«Je fais ce que Martin Luther King aurait fait», a-t-il affirmé. «Je ne me compare pas du tout, mais c'est mon modèle», a-t-il répondu lorsqu'on l'a pressé de questions à ce sujet.

Il se défend de comparer le contexte politique québécois actuel à la ségrégation aux États-Unis dans les années 50 et 60. «Mais à l'échelle du Québec, pour une question de droits de scolarité, un gouvernement qui impose ce genre de restrictions aux libertés fondamentales, c'est aussi grave», a-t-il expliqué.

Il a ajouté que le syndicaliste Marcel Pepin lui servait aussi de modèle.

En vertu de la nouvelle Loi 78, les manifestants doivent entre autres remettre leur parcours huit heures à l'avance. Même si M. Khadir prône la désobéissance à cette loi «injuste», il pense néanmoins que«lorsque c'est possible», les manifestants devraient remettre leur parcours.

La loi 78 est contestée. Et elle sera renversée par les tribunaux, pense M. Khadir.

En vertu de quels critères peut-on désobéir à une loi adoptée par des élus? M. Khadir a énoncé quelques critères: elle doit être manifestement injuste. Et la désobéissance doit se faire de façon non violente, en fonction du bien commun et non d'intérêts particuliers. Il n'estime pas que ces critères sont trop élastiques et ouvrent une porte dangereuse. Le Barreau du Québec ainsi que plusieurs juristes et Amnistie internationale ont notamment dénoncé cette loi, rappelle-t-il. L'ONU s'en inquiète aussi.

Par contre, la division québécoise de l'Association du Barreau canadien est en faveur, tout comme plusieurs Québécois.

M. Khadir assure que son geste n'est pas si inusité. Il établit un parallèle avec une arrestation dans le régime autoritaire de Vladimir Poutine. Il rappelle qu'hier à Moscou, le chef du parti libéral Yabloko a été brièvement détenu pour avoir participé à une manifestation illégale.

Le bruit des casseroles

M. Khadir raconte qu'il quittait l'Assemblée nationale hier à 20h30 en vélo lorsqu'il a «entendu les bruits de casserole». «Par solidarité», il a choisi de joindre la manifestation. C'est aussi le cas d'Agnès Maltais, députée péquiste de Taschereau, circonscription où se déroulait la manifestation.

Lorsqu'on l'a informée que la manifestation avait été déclarée illégale, Mme Maltais a choisi de quitter les lieux. En choisissant de respecter la loi, Mme Maltais a commis une erreur, pense M. Khadir. Il l'accuse même «de ne pas avoir eu le courage d'appuyer le peuple» et les «gens de son quartier».

Ce matin, le ministre délégué aux Transports, Norm Macmillan, a accusé M. Khadir de chercher à attirer l'attention. «Ce qu'il veut, c'est ce que vous faites là: parler de lui», a-t-il lancé.

Le député de Québec solidaire affirme qu'il n'a pas cherché à être arrêté pour remettre les projecteurs sur le mouvement de contestation. «C'est une hypothèse à laquelle je n'avais même pas pensé», a-t-il répondu à ce sujet.

Il dit «regretter qu'il y ait autant de  bruit»sur son arrestation, alors que 64 autres personnes ont subi le même sort hier soir à Québec. Depuis le début du mouvement de contestation, quelque 500 personnes ont été arrêtées dans la ville de Québec.

Il n'y a «rien de réjouissant» à se faire arrêter, ajoute-t-il. Il prétend que certains policiers étaient «clairement mal à l'aise» avec ces arrestations. Plusieurs étaient «courtois», assure-t-il.