Le Parti québécois a mis sa machine en branle en vue de remettre au goût du jour plus d'une centaine d'études sur la souveraineté.

La chef péquiste, Pauline Marois, l'avait promis à maintes reprises dans le passé sans qu'il y ait trop de suite, mais il semble que cette fois-ci soit la bonne: les fameuses études seront actualisées et, si possible, à temps pour la prochaine campagne électorale.

C'est ce qui ressort d'entrevues accordées à La Presse Canadienne par la chef péquiste et le président de la commission politique du parti, Alexandre Thériault-Marois, qui est chargé de transformer ce projet en réalité.

Le projet est fort ambitieux: mettre à jour quelque 148 études pertinentes sur l'impact de la souveraineté produites depuis le début des années 90, à l'époque de la Commission Bélanger-Campeau sur l'avenir constitutionnel du Québec.

Il faut «qu'on soit capable d'illustrer concrètement, avec les données d'aujourd'hui, ce que ça signifie la souveraineté», commente Mme Marois, prête à reprendre le bâton de pèlerin.

Quand le Parti québécois était au pouvoir, en 2001, le gouvernement avait confié le mandat à Claude Corbo, à l'époque professeur à l'Université du Québec à Montréal (UQAM), de revoir ces études, de les trier et de les actualiser au besoin. M. Corbo avait alors passé en revue 79 d'entre elles, pour en retenir 48 qui avaient été mises à jour et rendues publiques en 2002. Le tout formait une pile de 3800 pages.

Dix ans plus tard, le PQ entreprend donc de former un groupe de travail d'une dizaine de personnes, formé de la chef, de députés et d'intellectuels, qui aura pour mandat de former des sous-comités responsables de trouver des experts aptes à remettre cette montagne de données au goût du jour, en tenant compte du contexte actuel.

Un peu à l'image du projet de tenir des États généraux sur la souveraineté, l'initiative fait suite aux plaintes maintes fois formulées par l'ex-premier ministre Jacques Parizeau, qui reproche au parti de ne pas préparer le terrain en vue de transformer le Québec en pays.

Pour la chef péquiste, le but du nouveau «Comité d'étude sur la souveraineté» consiste précisément à étayer l'argumentaire du parti en faveur de la souveraineté.

Cependant, si on se fie aux études Corbo, rien n'indique que les données recueillies en cours de route iront toutes en ce sens.

C'est pourquoi le parti se réserve le droit de rendre public ou non le résultat des travaux.

En fait, le PQ veut ratisser très large et déborder de la masse d'études, déjà impressionnante, sélectionnée par M. Corbo. La tâche s'annonce donc titanesque.

Obstacle supplémentaire: les experts consultés devront fournir leur travail bénévolement. En 2002, la mise à jour, commandée par le gouvernement péquiste, avait coûté 600 000 $ aux contribuables. Cette fois, le parti n'est pas au pouvoir et estime qu'il n'a pas les moyens d'assumer une telle dépense.

Toute une panoplie de thèmes seront abordés pouvant aller de la reconnaissance internationale d'un Québec souverain, aux limites du territoire, l'utilisation de la monnaie canadienne, jusqu'au partage de la dette avec Ottawa au lendemain d'un référendum gagnant.

La première étape du projet - le tri des documents - a été faite au cours des derniers mois, «un travail de moine», selon la chef, mais le plus important reste à faire.

«On a un travail de logistique qui s'est fait, (mais) il n'y a pas un travail d'analyse stratégique et politique qui s'est fait, ou de contenu un petit peu plus élaboré, et c'est ce que je veux que l'on puisse faire», dit Mme Marois.

Avant d'analyser les données, il faudra d'abord trouver des volontaires. «Il faut aller chercher des sympathisants. Il faut aller chercher des intellectuels qui vont accepter de travailler avec nous», explique de son côté M. Thériault-Marois.

Ce dernier ne s'offusque pas du fait que la crédibilité du travail pourrait être entachée, si jamais les auteurs, étant bénévoles et souverainistes, avaient tendance à retenir uniquement les données favorables à l'option défendue par le PQ.

M. Thériault-Marois dit ne pas craindre ce scénario. «Certains professeurs, même s'ils sont souverainistes, vont garder une stature intellectuelle et ne vont pas débiter des propos tout à fait partisans», prévoit-il, s'engageant à recruter des «gens sérieux» pour mener la tâche à bien.

Le nom des experts ne sera pas divulgué. «On a avantage à ne pas divulguer les noms et à assurer l'anonymat des intellectuels qui vont venir se prononcer sur les études», ajoute-t-il.

Dans la perspective d'une élection en 2012, le temps risque de manquer pour mener à terme le projet. «On va essayer d'en faire le plus possible avant de retourner au pouvoir», dit M. Thériault-Marois.

«Je ne veux pas mettre d'échéance, mais éventuellement on va en voir apparaître», renchérit Mme Marois, consciente de la possibilité d'une élection hâtive.