François Legault ne veut pas toucher au dossier constitutionnel, mais il risque de ne pas avoir le choix. Sa promesse d'abolir les commissions scolaires laisse prévoir un débat important avec Ottawa et la minorité anglo-québécoise sur les garanties offertes par la Constitution canadienne.

«Il y a un obstacle important qui ne sera pas facile à surmonter, c'est clair», observe le constitutionnaliste Henri Brun, de l'Université Laval. En vertu de l'article 23 de la Charte canadienne des droits, les anglophones ont le droit d'avoir un enseignement en anglais «dans des établissements de la minorité».

Les commissions scolaires «ne sont pas protégées nominalement», mais la jurisprudence est claire; au Québec, les établissements scolaires doivent être «sous le contrôle» de la minorité. On ne parle pas seulement des biens, des équipements, mais l'enseignement doit être géré «par un organisme quelconque, régi par la minorité anglophone, c'est-à-dire élu par la minorité anglophone. Il n'y a pas beaucoup d'autres options» que les commissions scolaires, observe M. Brun.

En conférence de presse, lundi, M. Legault a écarté le problème d'un revers de main. Selon lui, les neuf commissions scolaires anglophones pourraient être remplacées par le même nombre d'organismes, plus légers, susceptibles de fournir des services aux écoles anglophones.

Selon M. Brun, «les services matériels et les autobus ne sont pas soumis aux obligations de la Charte, il faut que l'autorité relative à l'enseignement comme tel soit préservée».

Au gouvernement, la ministre de l'Éducation, Line Beauchamp, souligne que jamais le Parti libéral n'a proposé l'abolition des commissions scolaires. Au dernier congrès libéral, après que Mme Beauchamp eut parlé de commissions scolaires devenues «coopératives de services», les militants anglophones se sont clairement opposés aux intentions des dirigeants du PLQ de réduire les pouvoirs des commissions scolaires. «C'était une image que j'employais pour dire qu'il fallait plus de pouvoir à la base, au niveau de l'école», a-t-elle soutenu, hier.

«M. Legault propose l'abolition des commissions scolaires. La Charte contient des dispositions pour la gestion et le contrôle des écoles des minorités linguistiques au Canada. À l'évidence, M. Legault a présenté un travail bâclé, mal fait. Ce que propose M. Legault nous achemine vers des batailles juridiques», a soutenu la ministre.