Le premier ministre Jean Charest s'est défendu, mercredi, d'avoir subi les influences du puissant conglomérat financier Power Corporation (TSX:POW) lorsqu'il a atténué ses attaques contre le gouvernement fédéral, lors d'un sommet sur les changements climatiques.

Dans son édition de mercredi, le quotidien Le Devoir cite un câble diplomatique rendu public par Wikileaks exposant l'influence de l'entreprise, dont les activités s'étendent jusque dans les sables bitumineux albertains.

Selon le quotidien, l'ambassadeur américain à Ottawa, David Jacobson, évoque dans un rapport remis à ses supérieurs la possibilité que M. Charest ait cessé de critiquer la faiblesse des positions environnementales du gouvernement fédéral, lors d'un sommet au Danemark, à cause de l'influence de Power sur la sphère politique.

Lors d'un point de presse dans un corridor de l'Assemblée nationale, avant la période des questions, M. Charest a rappelé qu'il s'est déjà défendu, en janvier 2010, d'avoir adouci le ton quelques semaines plus tôt lors du sommet à Copenhague.

Le premier ministre a fait cette déclaration sans répondre aux questions des journalistes lui demandant des précisions sur ses liens avec les dirigeants du conglomérat financier.

M. Charest a plutôt exhibé un article publié en janvier 2010 par Le Devoir, dans lequel il soutenait n'avoir aucune réticence à défendre les positions québécoises, à Copenhague ou ailleurs.

Selon le premier ministre, cet article démontre qu'il ne limite pas ses interventions en fonction d'intérêts autres que ceux du Québec et contredit celui que Le Devoir a publié mercredi à propos de l'influence de Power Corporation.

«Le journaliste du journal Le Devoir aurait dû compléter sa recherche et lire l'article (de janvier 2010)», a-t-il dit.

Dans son câble, transmis à Washington en décembre 2009, M. Jacobson constate que M. Charest avait adouci le ton, à Copenhague, sans pouvoir certifier que l'influence de la famille Desmarais, qui dirige Power Corp., explique ce changement.

Mais, rapporte Le Devoir, l'ambassadeur donne plusieurs exemples des liens de la famille Desmarais avec les politiciens.

«Est-ce que M. Charest a été influencé par Power Corp. pour baisser ainsi le ton de ses critiques à l'endroit du gouvernement fédéral, ce n'est pas clair, a écrit M. Jacobson. Mais l'influence sur le milieu fédéral et provincial de cette société est indéniable.»

Dans une entrevue à La Presse Canadienne, mercredi, M. Jacobson a refusé de confirmer la validité des informations rapportées par le quotidien.

«Comme nous l'avons dit à plusieurs occasions précédemment, nous ne pouvons pas commenter le contenu d'aucun de ces présumés câbles de Wikileaks, a-t-il dit. Nous déplorons tout simplement cette façon de faire, qui nuit au peuple américain et au peuple canadien.»

M. Jacobson, qui a accepté une demande d'entrevue bien qu'il soit en vacances, s'est cependant empressé d'assurer que M. Charest défend avec ardeur les intérêts du Québec, ajoutant que la relation des États-Unis avec le Québec est solide.

«Le premier ministre Charest rend des comptes à la population québécoise, a-t-il dit. Je l'ai connu dans les jours suivant mon entrée en fonction et j'ai eu de nombreuses rencontres et réunions avec lui et j'ai toujours pu constater qu'il défend avec vigueur les positions de la population québécoise.»

Le ministre des Finances, Raymond Bachand, a pour sa part affirmé que Power Corporation, ou la famille Desmarais, n'a pas plus d'influence que d'autres.

«Pas plus que n'importe quelle autre entreprise, n'importe quel chef syndical, n'importe quel groupe de pression, a-t-il dit lors d'un point de presse. Ils ont tous droit à leur opinion, nous on gouverne pour le bien public.»

La chef péquiste Pauline Marois a refusé de commenter directement l'influence possible de Power Corporation sur le gouvernement, mais elle a constaté que M. Charest n'est plus aussi combatif qu'avant face à Ottawa sur le front des changements climatiques.

«Avez-vous remarqué comment il est silencieux actuellement sur toutes ces questions, en particulier devant Ottawa aussi, si vous me le permettez?», a-t-elle dit.