Selon plusieurs, le Québec sous-estime ou ignore plusieurs risques rattachés à l'usage des pesticides, qui étaient en hausse en 2008, selon le bilan le plus récent que La Presse a obtenu.

Dans ce bilan, le ministère du Développement durable, de l'Environnement et des Parcs (MDDEP) affirme que les risques associés à l'usage de pesticides étaient en baisse, malgré une hausse des quantités utilisées, entre autres parce que les pesticides plus récents avaient moins d'effets indésirables.

Un raisonnement trompeur, selon Éric Darier, directeur de Greenpeace au Québec.

«Les pesticides mis sur le marché plus récemment peuvent apparaître moins nocifs que certains plus anciens parce que les études et les impacts ne sont pas encore connus, et non pas parce qu'ils ont été prouvés comme étant plus sécuritaires», affirme M. Darier sur son blogue.

Sur Twitter, M. Darier s'est moqué du MDDEP, dont le quotient intellectuel serait affecté par les pesticides, tout comme celui des enfants pendant la grossesse, comme le révélait la semaine dernière des nouvelles études dont La Presse a fait état.

«Beaucoup des nouvelles molécules en question n'ont pas été testées sinon par les entreprises elles-mêmes, dit Benoît Girouard, de l'Union paysanne. Et ne parlons même pas des effets combinés ou à long terme.»

Selon les auteurs du bilan, la hausse des quantités de pesticides utilisés au Québec peut être attribuée à la popularité croissante des OGM, ces variétés de maïs ou de soya modifiés génétiquement pour résister à un herbicide ou à produire leur propre insecticide.

La parution du bilan 2008 de la vente de pesticides au Québec sera sûrement l'objet de débats dans deux semaines à l'ACFAS, la grande conférence scientifique annuelle québécoise.

Un colloque de deux jours incluant une quarantaine de conférenciers s'y déroulera sous le thème «Technosciences, environnement, santé, risques, gouvernance et société»

Louise Vandelac, professeure de sociologie à l'UQAM, et spécialiste de la question des OGM, est l'organisatrice du séminaire.

Elle affirme que les recherches les plus récentes montrent que le pesticide employé avec les plantes OGM, le RoundUp, est un perturbateur endocrinien. C'est-à-dire qu'il perturbe le développement des organes reproducteurs, qu'il entraîne certains types de cancer, qu'il altère le système immunitaire ou qu'il engendre des troubles du comportement.

«Les cultures OGM sont faites avec du RoundUp, dit Mme Vandelac. Alors, c'est mal comprendre les risques. Ces effets sont liés aux adjuvants incorporés au RoundUp, qui est le pesticide le plus vendu au monde.»

Une lacune que souligne aussi M. Darier. «Les évaluations gouvernementales des pesticides sont faites sur les ingrédients actifs et non pas sur les formulations en vente dont les adjuvants multiplient les effets toxiques», dit-il.

En outre, il cite des recherches récentes qui montrent que l'utilisation des herbicides a provoqué l'apparition de supermauvaises herbes, ce qui force certains agriculteurs à utiliser des herbicides encore plus toxiques.

Une autre étude récente de l'Université de Sherbrooke montre que le maïs Bt, un OGM,  produit en continu des pesticides qui semblent cependant se retrouver dans le sang des femmes et des foetus. Évidemment, étant produit directement par la plante, le pesticide du maïs Bt n'est pas comptabilisé dans le bilan du gouvernement.

«Greenpeace appelle le MDDEP et le gouvernement à un peu plus de rigueur scientifique et surtout d'appliquer le principe de précaution plutôt que de faire de l'écoblanchiment pour l'industrie des pesticides et des OGM, dit M. Darier. La seule option viable est la transition vers une agriculture biologique sans pesticide de synthèse ni d'OGM.»