Le mouvement de contestation apparu au Parti québécois quant à la «gouvernance souverainiste» de Pauline Marois paraît s'essouffler. Une poignée de circonscriptions ont jusqu'ici fait adopter des résolutions qui prenaient des distances du plan de Mme Marois pour «un référendum au moment jugé approprié».

Avec la victoire inattendue de son parti à l'élection complémentaire de Kamouraska-Témiscouata, Mme Marois est en meilleure posture pour faire avancer son plan. La course à la présidence du PQ entre Daniel Turp et l'ex-journaliste Raymond Archambault ou même l'imposition de la loi 101 aux cégeps vont servir d'exutoire aux militants qui voudront prendre des distances de la chef du parti.

Félix-Antoine Dumais-Michaud, jeune militant de Lévis, était de ceux qui, en novembre dernier, réclamaient que Mme Marois hausse le ton et amorce plus résolument la marche vers la souveraineté une fois le PQ élu. Une poignée de jeunes souverainistes, proches du Bloc québécois, avaient été galvanisés par une sortie de Jacques Parizeau, qui avait dit de Gilles Duceppe qu'il était le souverainiste le plus «inspirant», un camouflet à Mme Marois.

Quelques jours plus tard, ces jeunes militants avaient publié une lettre ouverte, signée par une cinquantaine de partisans. «On veut un débat de contenu, pas un débat de chefferie...» soutient M. Dumais-Michaud. Conscient que la proposition des dissidents semble désormais plutôt marginale, il relève que cette intervention a «soulevé un débat public sur la gouvernance du Parti québécois». À son avis, «c'est un gain pour les idées». Selon Jean-François Landry, autre ténor de la fronde, «sur le plan des chiffres, l'initiative peut avoir l'air d'un échec», mais, ajoute-t-il, il faudra attendre le congrès, en avril, pour voir si ces idées pourront être débattues sur le parquet. «Dans 6, 12 ou 24 mois, on verra bien que la gouvernance souverainiste, où on négocie avec Ottawa, n'est pas une bonne idée.»

À Lévis, comme dans Abitibi-Est, on a adopté une résolution qui préconise une «commission sur la souveraineté» pour superviser l'ensemble des études sur les champs de compétence fédérale. Idée chère à Daniel Turp, ex-député péquiste et membre du comité de direction du parti, on propose la tenue d'«états généraux» sur l'avenir politique du Québec.

Lévis et Abitibi-Est proposent aussi un projet de loi pour établir que 50% des voix plus une suffisent pour une victoire référendaire.

Ces deux circonscriptions, qui ne sont pas représentées par des députés péquistes, devront faire adopter leur proposition à leur congrès régional, le 12 février, pour qu'elle soit débattue au congrès du PQ, à la mi-avril.

Deux autres circonscriptions ont aussi pris leurs distances de la proposition principale. Nicolet-Yamaska, représentée par le député péquiste Jean-Martin Aussant, voudrait que le PQ s'engage à tenir un référendum dans son premier mandat. Dans Crémazie, la femme de Jacques Parizeau, Lisette Lapointe, a fait adopter une proposition en faveur, elle aussi, d'une commission indépendante pour préparer le terrain à la souveraineté. Le président de l'association de Crémazie est Adrien Parizeau, petit-fils de l'ancien premier ministre. Pour ces deux circonscriptions, le test aura lieu aux congrès régionaux, en fin de semaine prochaine.

La course à la présidence

L'arrivée de Raymond Archambault comme candidat à la présidence du PQ met des bâtons dans les roues de l'ancien député Daniel Turp, qui préparait sa candidature depuis des mois. Dans les coulisses, bien des péquistes estiment que l'ex-journaliste n'a pu se lancer qu'avec l'appui explicite de Mme Marois, même si celle-ci n'appuiera publiquement aucun des deux candidats.

Des militants souverainistes plus pressés ont tenté, en vain, de convaincre Frédéric Lapointe, membre influent de l'association de Crémazie, d'entrer en piste. Il n'en est pas question, a tranché M. Lapointe, qui compte appuyer Daniel Turp: «Daniel Turp est l'homme de la situation. Ils vont vouloir quelqu'un de plus décoratif... Il me semble que le conseil de direction doit avoir à la barre quelqu'un d'expérimenté et d'indépendant comme M. Turp.»

Cégeps et loi 101

L'assujettissement des cégeps à la loi 101 pourrait aussi susciter des débats musclés très bientôt. Le 5 février, à Châteauguay, les circonscriptions de la Montérégie tiendront leur instance régionale, où se retrouveront bien des militants préoccupés par la question linguistique. La proposition principale du PQ, publiée en juin, prévoit l'application des critères de la loi 101 à l'admission au collégial, ce qui interdirait aux francophones et aux allophones de fréquenter des établissements anglophones.

Or déjà, à l'interne, le député de Richelieu, Sylvain Simard, s'est dit opposé à ces dispositions. Sa circonscription fait partie de la Montérégie; reste à voir s'il tentera de faire modifier la proposition principale. Élue dans Taillon, Marie Malavoy, qui partage le point de vue de M. Simard, sera aussi à cette instance régionale.