En dépit des mises en garde du vérificateur général et de l'odeur de scandale qui plane autour de l'attribution des contrats gouvernementaux, le nombre de contrats alloués sans appel d'offres par le ministère des Transports du Québec a augmenté. Reprenant un exercice qu'elle avait réalisé l'an dernier, la leader parlementaire de l'ADQ, Me Sylvie Roy, relève qu'en six mois, d'avril à octobre 2010, Transports Québec a alloué de gré à gré 71 contrats d'une valeur totale de 294 millions de dollars, aux motifs qu'il y avait urgence ou qu'il n'y avait pas de deuxième soumissionnaire.

Durant la même période, l'année précédente, il s'était alloué 559 contrats sans appel d'offres pour une valeur de 240 millions. «Encore plus choquant, 80% de la valeur de ces contrats revient à des entreprises dont les dirigeants contribuent à la caisse du PLQ», a lancé Mme Roy. De nombreux mandats sont alloués en plaidant l'urgence, relève-t-elle. En outre, des contrats de plusieurs millions sont alloués sans concours à des firmes professionnelles pour la surveillance de chantiers.

Dans un récent rapport, le vérificateur général a critiqué le nombre de ces contrats. Il était surtout «douteux», selon lui, qu'on accorde automatiquement un contrat de surveillance de chantier à la firme de génie qui a eu le mandat de la conception.

Mme Roy estime que le gouvernement n'a pas les commandes de la machine, «qui est trop forte». «Ce n'est pas normal que ces contrats augmentent tout le temps. Il y a un ménage à faire au ministère des Transports», a-t-elle dit.

En marge du caucus du PLQ, à Lac-Beauport, le ministre Sam Hamad a tenu à réagir sur-le-champ à ces accusations. Mme Roy, a-t-il dit, est habituée aux accusations non fondées. Elle avait soutenu que trois ministres s'étaient retrouvés sur le yacht de Tony Accurso et que les travaux de construction coûtaient 30% de plus au Québec en dépit d'études établissant le contraire, a-t-il souligné.

Version «tronquée»

Quand elle avait fait une sortie semblable, l'an dernier, elle avait été invitée au Ministère pour poser toutes ses questions. M. Hamad estime qu'elle présente une version tronquée des statistiques, en tenant pour acquis que les six mois qu'elle a étudiés représentent la moitié des engagements. L'essentiel des travaux se réalise entre les mois d'avril et d'octobre, relève-t-il. Les chiffres du Ministère montrent que, en 2009, 20% des contrats ont été alloués de gré à gré. Cette proportion a été ramenée à 16% l'an dernier. «L'urgence» invoquée pour justifier certains contrats n'est pas une vue de l'esprit. Le Ministère ne peut lancer un appel d'offres pour des réfections de route qui sont pressantes, «des trous dans le pont Mercier» qu'il faut réparer.

«Ce n'est pas parce qu'on répète des faussetés qu'elles deviennent vraies», a lancé M. Hamad. Ces contrats sans soumission sont des engagements «tarifés» basés sur le coût des matériaux. «Le Ministère fait ça depuis 1992», a souligné M. Hamad.

Quant aux contrats de surveillance, la loi établit depuis octobre 2009 qu'ils doivent faire l'objet d'un appel d'offres. Les mandats de ce type alloués sans concours l'an dernier, d'une valeur totale de 120 millions de dollars, sont liés à des contrats de conception accordés avant l'adoption de la loi, a expliqué M. Hamad: «Ce sont d'anciens contrats. Tout ce qui est signé depuis octobre 2009 fait l'objet d'un appel d'offres. La recommandation du vérificateur général a été appliquée.»