La ministre de la Culture, Christine St-Pierre, regrette que l'église d'Oka mette aux enchères sept précieux bas-reliefs, qui datent de 1775, afin de financer ses rénovations.

«Ils n'ont même pas demandé l'aide du Fonds du patrimoine religieux. Je les invite à le faire», dit la ministre. 

L'église d'Oka, qui date du 18e siècle, doit faire des rénovations majeures. Elle en estime le coût à 1,5 millions$. Le fonds pourrait financer jusqu'à 70% des travaux. «Ils prennent pour acquis qu'ils seront incapables d'amasser (le 30% qui reste)», déplore Mme St-Pierre.

Depuis sa création en 1995, le fonds a distribué 360 millions$ pour restaurer le patrimoine québécois. L'église d'Oka avait reçu 110 680$ en 2006 pour des travaux de maçonnerie. Mais des travaux majeurs restent à être faits, notamment pour la toiture. La ministre St-Pierre indique que ces travaux pourraient être faits en étape afin d'amortir le coût.

Elle ajoute aussi que la vente aux enchères des bas-reliefs, classés biens historiques, sera retardée. L'église voulait l'organiser à Montréal le 8 février. «Selon la loi, avant de vendre, ils doivent attendre 60 jours après le dépôt de leur avis au ministère», rappelle-t-elle. L'acheteur ne pourra pas non plus sortir les oeuvres à l'extérieur du Québec, ni les modifier.

Selon Le Devoir, les bas-reliefs seraient d'une valeur assurable de 500 000$. Le curé Martin Tremblay a affirmé que la vente est son dernier recours pour sauver l'église. Il n'a pas été possible de lui parler avant de mettre ce texte en ligne.

Nouvelle loi sur le patrimoine

Cette vente se prépare alors que commencent demain les consultations sur le projet de loi 82 sur le patrimoine culturel, déposé l'hiver dernier. Cette loi remplacera celle sur les biens culturels, qui date de 1972 et qui a été modifiée pour la dernière fois en 1985.

Le projet de loi compte plus de 260 articles et touche à plusieurs domaines. Les propriétaires de biens patrimoniaux devront désormais «prendre les mesures nécessaires» pour préserver le patrimoine. Les pénalités seront plus sévères. Québec créera aussi une équipe d'inspecteurs dotés d'un pouvoir d'enquête. On ajoutera aussi la notion de patrimoine immatériel (comme le chant de gorge inuit) et de paysage culturel patrimonial (comme l'île d'Orléans). 

«C'est assez avant-gardiste», reconnaît Dinu Bumbaru, directeur des politiques d'Héritage Montréal. Même s'il salue le projet de loi, M. Bumbaru émet quand même quelques réserves. Selon lui, Québec utilise le bâton, mais pas assez la carotte. Il souhaiterait notamment davantage d'incitatifs pour impliquer les citoyens et les amener à protéger le patrimoine.

Le critique en matière de culture du PQ, Yves-François Blanchet, regrette entre autres que le projet de loi ne prévoit rien pour la numérisation du patrimoine et ne mette pas en valeur le «patrimoine particulier» des Premières nations. «Et dans son application, le projet de loi soulève plus de questions que de réponses», ajoute l'anthropologue de formation.

La Fédération des chambres de commerce du Québec (FCCQ), la ville de Montréal et l'Union des municipalités du Québec doivent notamment présenter un mémoire demain. «Au Québec, on analyse déjà le volet santé, social et environnemental des projets. Et là, on ajoute un autre critère. Il faudra faire attention de ne pas freiner le développement économique et faire stagner ou même régresser le Québec», dit sa pdg, Françoise Bertrand. La FCCQ craint que la loi ajoute un élément d'imprévisibilité qui nuira aux entrepreneurs. Elle voudrait en outre que les régions concernées aient plus de pouvoir décisionnel et que le gouvernement compense financièrement lorsqu'il bloque un projet. «C'est facile pour les gens du centre-ville de Montréal de vouloir qu'un village éloigné préserve son patrimoine, mais il faut les laisser eux aussi créer de la richesse.»

Montréal accueille quant à elle favorablement le projet de loi. «On veut tout de même s'assurer qu'il reconnaisse bien le caractère spécifique de notre ville», indique Helen Fotopulos, conseillère de Côte-des-Neiges, qui présentera le mémoire.