Michelle Courchesne s'est trouvée dans l'embarras, hier, lorsqu'elle a dû expliquer pourquoi elle avait congédié son directeur de cabinet l'an dernier et pourquoi elle n'en a rien dit. En janvier 2009, la ministre a exigé la démission de son plus proche conseiller, Jean-Sébastien Marineau, pour «bris de confiance». Denis Lessard brosse le portrait de ce mystérieux personnage.

Jean-Sébastien Marineau avait été choisi par Michelle Courchesne comme chef de cabinet à l'Éducation après avoir été son organisateur dans Fabre à l'élection de 2007.

Son insistance à faire avancer certains dossiers, en particulier l'installation de terrains de sport synthétiques, subventionnés par un fonds spécial du ministère de l'Éducation, alimentait depuis longtemps les conversations dans les officines politiques avant son départ, subit et inattendu, au début de 2009. Partout au Québec, un seul type de terrain synthétique pouvait se qualifier pour les subventions du ministère de l'Éducation. Le bras droit de Mme Courchesne, confient des sources libérales, intervenait lourdement dans ces dossiers.

Informée hier de ces nouvelles allégations, Mme Courchesne, désormais au Conseil du Trésor, a fait répondre à La Presse qu'elle «n'avait rien à ajouter» sur le parcours particulier de celui qu'elle avait choisi comme bras droit. Souvent, c'est le cabinet du premier ministre qui choisit les chefs de cabinet, mais Mme Courchesne avait tenu à garder cet organisateur venu du Parti libéral du Canada. En 2006, il avait organisé la campagne de Pierre Pettigrew, qui a été battu.

Des organisateurs qui l'ont côtoyé sur la scène fédérale se souviennent d'un individu secret, qui parlait de son expérience dans l'armée française... dont il n'a jamais fait partie, en réalité. Il a déjà sollicité des collègues pour qu'ils l'aident à payer des traitements pour sa leucémie - autre imposture, destinée à cacher ses problèmes de consommation. Ces informations étaient venues aux oreilles de quelques élus du PLC mais n'ont jamais été transmises aux cousins de Québec, semble-t-il.

Le Journal de Montréal a révélé hier qu'en mars, Mme Courchesne a téléphoné à la Sûreté du Québec quand elle a pris connaissance d'allégations de trafic d'influence touchant son ancien chef de cabinet. M. Marineau, qui avait eu des problèmes de drogue, avait accepté de démissionner au début de 2009.

Il a eu droit à son indemnité de départ (un peu plus de deux mois de salaire), ce que ne s'explique pas la députée adéquiste de Lotbinière, Sylvie Roy. «Lorsqu'on appelle la police pour l'informer des agissements d'un de nos employés, c'est parce qu'on pense qu'il y a eu commission d'un acte criminel. Dans ce cas-là, on congédie pour un motif disciplinaire et on ne donne pas d'indemnité», a-t-elle dit à l'Assemblée nationale, hier.

Michelle Courchesne a rétorqué que M. Marineau avait déjà obtenu son indemnité quand des rumeurs sérieuses ont commencé à courir à son sujet. «J'ai exigé sa démission pour des allégations qui étaient liées à sa vie privée en janvier 2009. Ce n'est que par la suite, quelques semaines plus tard, que sont venues à mes oreilles des allégations liées à possiblement de l'argent. Le même jour, immédiatement, j'ai contacté la Sûreté du Québec et j'ai rencontré les enquêteurs de la Sûreté du Québec.» La police a jugé l'affaire suffisamment fondée pour rencontrer M. Marineau, a-t-on appris de source policière.

M. Marineau a admis qu'il avait demandé à des entrepreneurs de financer la campagne de Mme Courchesne. «On savait que les collecteurs de fonds avaient des entrées dans les cabinets et des influences sur les nominations, mais on ne savait pas que les employés des cabinets étaient des solliciteurs du fonds... des solliciteurs de fonds du Parti libéral», a lancé Mme Roy. C'est à son avis une autre illustration d'un déplorable «mélange des genres».

Comme à son habitude, le leader du gouvernement, Jean-Marc Fournier, a tenté de venir au secours de sa ministre en rappelant à l'adversaire qu'il n'était pas non plus à l'abri des soupçons. «J'ai l'impression que le souvenir de la collègue (Roy) va lui rappeler le départ de M. Taillon, qui avait appelé la police, justement, et qui... En tout cas, on n'a pas encore su trop, trop ce qui s'était passé...» a-t-il lancé.