Faute d'appuis, le gouvernement Charest renonce à abaisser de 0,08 à 0,05 le taux d'alcool dans le sang au-delà duquel il n'est plus permis de conduire. Il abandonne également l'idée d'obliger les enfants de 12 ans et moins à porter un casque de vélo.



Le ministre des Transports, Sam Hamad, a annoncé lundi des amendements au projet de loi 71 sur la sécurité routière dont il souhaite l'adoption avant la fin de la session parlementaire, vendredi.

Ce projet de loi a été déposé il y a un an, à la suite d'un rapport de la Table québécoise de la sécurité routière, un groupe créé par le gouvernement et présidé par le fondateur d'Opération Nez rouge, Jean-Marie De Koninck. La Table avait recommandé une baisse de la limite légale à 0,05 g d'alcool par 100 ml de sang. La ministre des Transports de l'époque, Julie Boulet, affirmait que 45 morts seraient évitées chaque année grâce cette mesure. Des sanctions administratives dès 0,05 existent déjà dans les autres provinces canadiennes.

Le gouvernement a ainsi proposé que le permis de conduire d'une personne dont l'alcoolémie dépasse 0,05 soit suspendu pendant 24 heures.

Or, les partis de l'opposition et les restaurateurs se sont opposés à cette mesure. Et de l'aveu même du ministre Hamad, les Québécois y sont réfractaires. «Il faut être à l'écoute des gens, et on constate que la sensibilité n'est pas là pour le moment chez les Québécois» au sujet de cette mesure. «C'est correct, on comprend ça. Alors on la retire», a-t-il affirmé en conférence de presse.

C'est la deuxième fois que le gouvernement Charest renonce à abaisser la limite d'alcoolémie permise. Julie Boulet avait tenté en vain de le faire en 2007.

Plutôt que de baisser la limite légale, Sam Hamad a décidé d'investir jusqu'à 2 millions de dollars supplémentaires en trois ans pour augmenter les barrages routiers et les points de contrôle de la Sûreté du Québec. Dans le cadre d'un projet pilote, les policiers feront de la «sensibilisation» auprès des conducteurs dont l'alcoolémie se situe entre 0,05 et 0,08.

Québec s'attaque surtout aux récidivistes avec les amendements au projet de loi 71. Toute personne déclarée coupable d'une troisième infraction en 10 ans devra, à vie, munir son véhicule d'un antidémarreur éthylométrique. Québec prolonge de 30 à 90 jours la durée de la confiscation du véhicule d'un récidiviste. Notons que le gouvernement maintient sa politique «zéro alcool» pour les 21 ans et moins.

Quant au casque de vélo, Québec fera une campagne de sensibilisation sur la sécurité à vélo au lieu d'obliger les 12 ans et moins à porter le casque, une mesure qui était décriée par Vélo Québec. Les policiers ont des choses plus importantes à faire que de «courir après de jeunes enfants» qui n'ont pas de casque, a dit Sam Hamad.

Par ailleurs, le ministre double les amendes pour excès de vitesse lorsque l'infraction survient là où il y a des travaux.

Pour le député péquiste Nicolas Girard, «c'est le gros bon sens qui a gagné». «Si on veut faire en sorte de réduire le nombre de personnes qui conduisent en état d'ébriété, il faut qu'on applique les lois actuelles. Et à l'heure actuelle, les barrages routiers se tiennent essentiellement durant la période de Fêtes. Il faudrait que ça se déroule à longueur d'année. C'est la crainte de se faire prendre qui va avoir un impact favorable», a-t-il plaidé.

Avant d'envisager une baisse de la limite légale d'alcoolémie, le gouvernement doit «s'attaquer aux gens qui se promènent en fumant du pot ou en bouffant des pilules», a lancé le député adéquiste Janvier Grondin.

La Fédération canadienne de l'entreprise indépendante et Éduc'alcool se sont réjouis de la décision de Sam Hamad. Jean-Marie De Koninck se dit «déçu» de l'abandon du 0,05. Mais il trouve un peu de réconfort dans l'augmentation des barrages routiers et les mesures plus sévères contre les récidivistes.