L'UMP, la formation politique du président Nicolas Sarkozy, fait un geste envers les souverainistes québécois. Son secrétaire général, Xavier Bertrand, a proposé mercredi au chef du Bloc québécois, Gilles Duceppe, d'établir des «relations officielles» avec le parti de la majorité.

«M. Bertrand nous a proposé d'entrée de jeu d'établir des relations officielles et d'échanger nos analyses sur différents sujets, a expliqué M. Duceppe au terme d'une discrète visite de trois jours en France. Ça ne venait pas d'une demande du Bloc. C'est une proposition que l'UMP nous a faite et que nous avons acceptée avec empressement.»

Pour le chef bloquiste et son entourage, il s'agit nettement d'une main tendue par l'Union pour un mouvement populaire, près de deux ans après que Nicolas Sarkozy a répudié sans ambiguïté la politique de «non-ingérence, non indifférence». À cette occasion, le président avait vilipendé les souverainistes, incarnation à ses yeux du «sectarisme», de la «division» et de la «détestation de son voisin».

La question du «ni-ni» a d'ailleurs été au centre des rencontres que Gilles Duceppe a eues à Paris et à Strasbourg. À chacun de ses interlocuteurs, le chef bloquiste a répété que la souveraineté «existe encore» et que la leader péquiste «Pauline Marois a de bonne chances» de remporter les prochaines élections.

«Nous souhaitons que la France accompagne le Québec dans ses choix et l'accueille au sein des nations libres de ce monde», a redit à chaque occasion l'élu fédéral.

Si le sujet a été évoqué «subtilement» avec Xavier Bertrand, il l'a été ouvertement avec l'ex-premier ministre Alain Juppé. Les deux hommes se sont vus pendant une bonne demi-heure au siège parisien de l'Association France-Québec. Aux yeux de M. Juppé, que la rumeur envoie à la Défense lors du prochain remaniement ministériel, la «non-indifférence, non-ingérence» reste d'actualité. C'est lui qui avait soufflé à l'oreille de Nicolas Sarkozy la formule des «amis et des frères» («Les Canadiens sont nos amis, les Québécois sont nos frères»), mais il reste résolument fidèle au «ni-ni».

«Moi je pense que dans la vie, il faut parfois des éléments de continuité et je pense que la formule «ni-ingérence, ni-indifférence» disait bien ce qu'est notre relation tout à fait particulière avec le Québec (...). Je n'ai jamais dit qu'elle était abandonnée.»

La discrète visite à Paris de Gilles Duceppe n'avait rien à voir avec celle que Lucien Bouchard, reçu au plus haut niveau, avait effectuée quand il était chef de l'Opposition aux Communes. M. Duceppe s'est surtout réjoui, lui, d'avoir rencontré des représentants des «deux familles politiques». Parmi eux, Brigitte Girardin, la secrétaire générale de République solidaire, le mouvement de Dominique de Villepin, et le secrétaire général à l'International du Parti socialiste, Jean-Christrophe Cambadelis. Proche du PQ, M. Cambadelis a récemment fait inscrire dans le programme présidentiel de sa formation que le PS renouera avec la «non-ingérence, non-indifférence» s'il remporte la prochaine élection présidentielle.

Pendant son séjour, M. Duceppe a également fait un voyage éclair à Strasbourg, où il a été reçu par le secrétaire général de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe, Mateo Sorinas.

L'ambassade du Canada a collaboré à l'organisation de sa visite, mais est restée discrète. «Il n'y a pas eu de chaperon, ce qui montre leur bon esprit», a fait remarquer le chef du Bloc.

Après sa rencontre avec Alain Juppé, Gilles Duceppe s'est envolé pour Barcelone. Sa tournée européenne le conduira ensuite en Écosse et à Londres.