La Fédération des femmes du Québec (FFQ) s'oppose à ce que l'État interdise le port du voile intégral aux éducatrices en milieu familial. Elle reproche également au gouvernement Charest d'obliger de façon trop générale les musulmanes qui portent le niqab à se dévoiler pour recevoir des services publics.



Devant une commission parlementaire, mardi, la présidente de la FFQ, Alexa Conradi, a demandé des modifications au projet de loi 94 sur les demandes d'accommodement dans l'administration publique.

Le projet de loi prévoit que tant l'employé de l'État que la personne qui reçoit ses services doivent avoir le «visage découvert» lors de la prestation du service. Un accommodement doit être refusé si des motifs liés à la sécurité, à la communication ou à l'identification le justifient, ajoute l'article 6.

Pour la FFQ, l'obligation d'avoir le «visage découvert» ne devrait pas s'appliquer aux services de garde en milieu familial, qui sont subventionnés par l'État. «On commence à s'éloigner des services publics» pour entrer dans la sphère privée lorsqu'il est question de ces garderies à la maison, a expliqué Mme Conradi. Elle a fait valoir que les parents confient leurs enfants à ces femmes «en toute connaissance de cause». Si l'État oblige ces femmes à retirer leur niqab, il les marginalisera encore davantage et mettra en péril leur autonomie financière.

«Pour le nombre de cas dont il s'agit, il est peut-être préférable d'exclure (les services de garde en milieu familial) dans un premier temps et de voir quelle sera l'expérience de cette interdiction de travailler à visage couvert dans la fonction publique», a ajouté Mme Conradi.

La présidente de la FFQ s'est dite «embêtée» par l'article 6, qui, à ses yeux, oblige de façon trop générale les personnes qui demandent un service public à avoir le visage découvert. Selon elle, une musulmane ne devrait pas avoir à enlever son voile intégral si elle se rend dans une institution publique seulement «pour aller chercher quelque chose» comme un formulaire.

Il y a «de nombreux cas où il faut prévoir des exceptions» à l'application de l'article 6, estime la FFQ. «Il nous apparaît essentiel que les femmes portant le voile intégral dans un contexte d'urgence santé ainsi que des femmes victimes d'agressions sexuelles ou de violence conjugale puissent être reçues comme elles arrivent, sans qu'elles soient appelées automatiquement à enlever le voile», écrit-elle à titre d'exemple dans son mémoire.

La FFQ demande au gouvernement de n'obliger que les employés de l'État à avoir le visage découvert. Les ministères devraient quant à eux déterminer «les situations où les exigences de communication, de sécurité ou d'identification empêcheraient de donner des services à une personne qui aurait le visage couvert», propose-t-elle.

Le mouvement féministe est divisé au sujet de la laïcité de l'État. La FFQ s'est prononcée contre l'idée d'interdire aux fonctionnaires le port de signes religieux ostentatoires, à l'exception du niqab. À l'inverse, le Conseil du statut de la femme recommande depuis 2007 que «les représentants et fonctionnaires de l'État ne puissent arborer ni manifester» de tels signes (voile, kippa, turban, kirpan).