La chef péquiste Pauline Marois croit que le premier ministre Jean Charest doit mandater une commission d'enquête sur la construction ou démissionner.

Lors d'une conférence de presse où elle a dressé un bilan des travaux parlementaires des quatre derniers mois, vendredi, Mme Marois a déclaré que M. Charest était déconnecté de la réalité.

«Nous avons un gouvernement qui normalement aurait dû déjà céder à la demande d'enquête publique sur la construction et le financement des partis politiques, a-t-elle dit. Après tous ces mois, toutes ces personnes qui se sont prononcées, l'entêtement de premier ministre à cet égard est néfaste.»

Selon la chef de l'opposition officielle, le Québec est paralysé depuis des mois dans des scandales mais le gouvernement persiste à refuser de mandater une enquête publique sur la construction et le financement des partis politiques.

«M. Charest a un seul choix, a-t-elle dit. Soit il déclenche une commission d'enquête, soit il démissionne de son poste de premier ministre.»

Mme Marois a affirmé que l'action gouvernementale est caractérisée par le cynisme, l'improvisation et l'incompétence.

Plus tôt, le Parti québécois avait déposé une motion de censure pour retirer sa confiance au gouvernement en raison de son inaction face aux allégations de malversations relativement au milieu de la construction, à l'octroi de contrats gouvernementaux et au financement des partis politiques.

L'Action démocratique du Québec et Québec solidaire ont appuyé les péquistes, ce qui n'a pas empêché la motion d'être battue, les libéraux, majoritaires, s'y étant opposés.

Au moment où elle présentait son bilan, la chef péquiste a estimé que le caucus libéral manque de profondeur et selon elle, un remaniement ministériel n'aura aucun effet sur la gestion des affaires publiques.

«Il y a un problème de profondeur, a-t-elle dit. Et changer les joueurs de place, est-ce que ça va vraiment changer le mal de place? Le mal, il est d'abord et avant tout dans le bris de confiance de la part de la population québécoise à son endroit.»

Au sujet de l'acrimonie des échanges entre elle et M. Charest, Mme Marois a reconnu sa part de responsabilité, tout comme le premier ministre l'a fait lui-même, vendredi.

«Quand on se fait attaquer directement, j'avoue que des fois ça vient nous chercher, a-t-elle admis. On réagit et sans doute qu'il y a une part qu'on doit assumer. Je suis prête à l'assumer, mais j'aimerais ça avoir des réponses du premier ministre et de son gouvernement.»

Par ailleurs, le leader de l'opposition officielle, Stéphane Bédard, s'est défendu d'avoir fait obstruction aux travaux sur le projet de loi qui doit instaurer un code d'éthique pour les députés, que M. Charest n'a pas réussi à faire adopter avant l'ajournement, malgré son engagement en ce sens.

«Tous les députés membres de la commission se félicitent du travail qu'on fait», a-t-il soutenu.

Mme Marois a pour sa part assuré que le Parti québécois était de bonne foi mais que la pièce législative avait été mal ficelée par les libéraux, ce qui a rendu de nombreux amendements nécessaires.

«Ça veut dire qu'on a un problème, a-t-elle dit. La loi était mal faite, mal préparée.»

Quant à un projet de loi comportant des mesures budgétaires, dont le gouvernement a forcé l'adoption en recourant au bâillon, vendredi, Mme Marois a affirmé qu'il avait été déposé deux jours avant la limite prévue dans le calendrier parlementaire.

«Le projet de loi 100 mérite d'être largement bonifié, c'est ce à quoi nous avons travaillé correctement depuis que ce projet a été appelé», a-t-elle dit.

Présentant lui aussi son bilan, le chef adéquiste Gérard Deltell a jugé que le gouvernement était déconnecté des préoccupations de la population en refusant de tenir une enquête publique.

«Cette enquête-là, il y a juste le Parti libéral et quelques autres groupes qui la refusent, a-t-il dit. Mais on sait qu'au Québec c'est la plupart des gens - 85 pour cent dans le dernier sondage - qui réclamaient la tenue de cette enquête.»

Le député de Québec solidaire, Amir Khadir, a pour sa part insisté sur le ton de M. Charest lors des derniers échanges en Chambre avec l'opposition.

«Les attaques sont personnelles, souvent en bas de la ceinture, et ça ne restaure en rien la crédibilité qu'on doit pourtant tous chercher à restaurer, a-t-il dit. Ce que ça me dit aussi, c'est peut-être que M. Charest sent que c'est une fin de règne, que la sortie n'est pas loin, et qu'il n'a peut-être plus rien à perdre.»