Une franchise si nécessaire, mais pas nécessairement une franchise. Devant le tollé soulevé par les mesures prévues dans son budget pour le financement du système de santé, le ministre Raymond Bachand a semblé reculer hier. Il peut y avoir d'autres moyens qu'une «franchise santé» pour trouver les 500 millions de dollars dont a besoin ce gigantesque ministère.

«L'impasse de 500 millions peut être comblée de plusieurs façons. Elle peut être comblée par des mesures de productivité, elle peut être comblée en partie par cette franchise santé. Elle pourrait être comblée parce que le gouvernement du Canada va augmenter les transferts fédéraux en santé. On sera en renégociation à cette époque. Ce qu'on a dit, c'est qu'il y a une impasse, et on pense qu'une franchise santé est une bonne façon de faire les choses», a soutenu M. Bachand.

On est loin de la déclaration qu'il avait faite au lendemain du budget, alors qu'il avait affirmé que le principe d'une «franchise santé» était bien arrêté. «J'ai indiqué que la décision d'avoir une franchise santé était là... mais qui invitait les Québécois à un débat», a nuancé M. Bachand, hier.

À une nouvelle cotisation annuelle qui atteindra vite 200$ par année, Québec voulait ajouter une autre contribution, prélevée au moment de la déclaration de revenus, qui aurait augmenté en fonction du nombre de visites que fait le contribuable chez un médecin. On soutenait qu'il ne s'agissait pas d'un «ticket modérateur» puisqu'on ne demandait rien à la porte de la clinique.

Mais, depuis, dans un rare moment d'unanimité, bien des intervenants du réseau de la santé, médecins en tête, ont demandé à Québec de battre en retraite. Hier, dans une entrevue accordée au Devoir, la présidente du Conseil du statut de la femme, Christiane Pelchat, a qualifié ces taxes d'«odieuses» et de «discriminatoires».

M. Bachand a indiqué hier qu'il comptait mettre en place un «groupe de travail» pour nourrir ce débat, pour «trouver une solution qui n'est pas contraire à la Loi canadienne sur la santé et qui ne brime pas l'accès (aux soins)».

En Chambre, le premier ministre Charest a fait preuve de la même prudence: «Du côté de la franchise santé, ce que nous avons fait dans le budget, c'est inviter les Québécois à un dialogue sur la question de l'avenir du système de santé (...) et cette question de franchise.»

Marois maltraitée

Après que la chef péquiste, Pauline Marois, eut dénoncé le caractère régressif d'une contribution qui s'appliquera sans égard au revenu, le ministre Bachand l'a accusée d'«hypocrisie». Elle était à la Santé quand le gouvernement Bouchard a mis en place l'assurance médicaments dotée d'une contribution générale de 175$: «Ce qu'elle a fait avec l'assurance médicaments, c'est ce qu'on fait avec la contribution santé. Pour les leçons de morale, elle repassera.»

Le ministre Bachand a par ailleurs confirmé que les primes des hauts dirigeants des sociétés d'État commerciales diminueront.

Un président qui pouvait majorer son salaire de 30% sera limité à 20%. On ajoute 2300 cadres à la liste de ceux qui verront leur prime réduite. En étendant la mesure aux réseaux de la Santé et de l'Éducation, où les primes seront à zéro, on ajoute 15 000 cadres supplémentaires. En tout, la mesure permet d'épargner 43 millions par année.

Par ailleurs, comme l'avait déjà laissé entendre M. Bachand, les cadres de la Caisse de dépôt et placement ne sont pas touchés par la réduction des primes.