Noël, Pâques, l'Action de grâce et cinq autres jours fériés disparaîtront du calendrier scolaire dès l'an prochain, en vertu du controversé décret de la ministre de l'Éducation, Michelle Courchesne, déposé le 3 février.

Cette disposition, largement dénoncée par les milieux catholiques au Québec mais qui a eu peu d'échos dans les médias, fait partie de mesures annoncées pour «assouplir» le calendrier scolaire. Cet hiver, la controverse a surtout été alimentée par la possibilité d'ouvrir les écoles le week-end, un accommodement destiné aux écoles privées juives qualifié de «déraisonnable». La réforme a été encore une fois dénoncée mardi à Québec, alors qu'une pétition signée par 25 000 enseignants a été présentée à l'Assemble nationale.

«En agissant en catimini comme elle l'a fait, la ministre fragilise le lien de confiance entre elle et son réseau, a déclaré Réjean Parent, président de la Centrale des syndicats du Québec, qui compte quelque 100 000 membres dans le secteur de l'éducation. Nous lui demandons de retirer ce projet de règlement injustifié, que le réseau scolaire ne demandait pas.»

L'élimination des fêtes du calendrier scolaire a en outre suscité le mécontentement de nombreux organismes, dont l'Association des parents catholiques du Québec, qui a recueilli «quelques milliers» de signatures sur sa pétition. Dans une lettre envoyée à la ministre Courchesne le 12 mars dernier, l'Assemblée des évêques catholiques du Québec a quant à elle rappelé que ces fêtes «s'enracinent dans une profonde tradition religieuse et culturelle dont on ne saurait sous-estimer la valeur».

«Un des problèmes de notre société, c'est la perte d'enracinement. Noël et Pâques, ce ne sont pas que des fêtes religieuses, elles font partie de notre héritage, dit Bertrand Ouellet, secrétaire général. Dans le calendrier scolaire, certaines fêtes sont religieuses, d'autres ne le sont pas, mais elles font partie de notre identité, de notre culture.»

Article disparu

La disparition des fêtes religieuses chrétiennes et de jours fériés comme la fête des Patriotes, la Fête nationale du Québec et la fête du Canada, n'est pas explicite dans le décret du 3 février. C'est l'une des raisons pour lesquelles elle a fait peu de bruit, estiment des intervenants interrogés par La Presse. «Nous aussi, nous avons mis du temps à le réaliser», admet M. Ouellet. Le décret mentionne que «les articles 16 à 19» du régime pédagogique sont remplacés «par les suivants», mais on n'y présente que les articles 16 à 18. Le fameux article 19, qui énumère les jours de congé pour l'élève, dont les fins de semaine et les fêtes, a simplement disparu.

Selon le ministère de l'Éducation, les précisions contenues dans l'article 19 sont superflues. «L'objectif n'est pas d'abolir les jours fériés ou les fins de semaine, ce n'est pas ça du tout, affirme Tamara Davis, attachée de presse de la ministre Courchesne. L'intention n'est pas d'obliger les jeunes à aller à l'école ces jours-là. On considérait que cette précision n'avait pas lieu d'être dans un régime pédagogique puisque c'est clairement précisé ailleurs dans les normes du travail et les conventions collectives.»

Il serait toutefois théoriquement possible d'ouvrir les écoles ces jours-là, estime-t-on à la Fédération québécoise des directions d'établissement d'enseignement. Il suffirait de faire appel à du personnel autre que les enseignants - des entraîneurs sportifs, par exemple - ou d'embaucher des enseignants non syndiqués.

«Ce serait une décision du conseil d'établissement, précise la présidente de la Fédération, Chantal Longpré. Bon, je n'ai pas l'impression que, demain matin, tous les membres de ces conseils vont perdre la tête et se lancer dans des cours à Noël ou la fin de semaine, mais c'est une possibilité théorique...»

Les citoyens et groupes intéressés avaient jusqu'à vendredi dernier pour réagir au décret, qui devrait entrer en vigueur le 1er juillet prochain. Interpellée en Chambre à ce sujet mardi, la ministre Courchesne a assuré qu'elle considérerait «avec ouverture» les commentaires reçus.