Québec solidaire s'est inquiété d'une apparence de trafic d'influence, jeudi, après avoir effectué une recherche démontrant que le Parti libéral du Québec aurait reçu près de 300 000 $ de contributions politiques de la part d'employés de cabinets d'ingénieurs qui font des affaires d'or avec le gouvernement.

S'appuyant sur des données du Directeur général des élections, le député Amir Khadir a relevé que 111 dirigeants et employés des firmes SNC-Lavalin, BPR, Axor et Cima+ ont fait des dons au PLQ en 2008.

M. Khadir a évoqué la possibilité que certains des employés aient servi de prête-noms afin que leurs entreprises puissent contourner la loi qui les empêche de faire des dons aux partis.

Le député s'est notamment interrogé sur le cas d'une réceptionniste d'Axor, qui a versé 3000 $ au PLQ en 2008.

«Ce qui pourrait être illégal, c'est qu'une secrétaire, une réceptionniste - je ne sais pas à quelle échelle on les paie dans les firmes de génie-conseil, mais je ne pense pas que ce soient des salaires élevés - donne 3000 $ au Parti libéral, a-t-il dit lors d'un point de presse. On peut se poser des questions.»

Selon M. Khadir, ces informations soulèvent à nouveau la question de l'existence d'un système qui permettrait à des entreprises d'obtenir plus facilement des contrats publics en retour de contributions à la caisse libérale.

«La culture du Parti libéral, c'est de ramasser de l'argent dans des milieux d'affaires, amis qui attendent sans doute des retours d'ascenseur», a-t-il dit.

Le député a transmis les résultats de sa recherche au DGE et à la Sûreté du Québec afin qu'ils fassent enquête.

Le DGE a confirmé que des vérifications seront effectuées. Les employés visés devront répondre à une lettre leur demandant de certifier sur l'honneur qu'ils ont respecté les règles de financement.

En Chambre, M. Khadir a demandé au gouvernement de mandater une commission d'enquête afin de faire toute la lumière sur cette situation.

«Tant qu'il n'y aura pas d'enquête publique, tous les ministres et députés du gouvernement subissent la suspicion du public, a-t-il dit. Les gens continueront de croire qu'il y a corruption et que tout le gouvernement est impliqué.»

Le ministre de la Réforme des institutions démocratiques, Robert Dutil, a pris note des nombreuses préoccupations soulevées depuis plusieurs mois, qui avaient mené le gouvernement, l'automne dernier, à déposer un projet de loi amalgamant des modifications aux règles de financement ainsi qu'à la carte électorale, un sujet épineux.

«Ce que l'on constate aujourd'hui, c'est qu'il y a des gens qui critiquent les règles qui ont été adoptées en 1977 et qui souhaitent des améliorations», a-t-il dit.

Faisant volte-face, M. Dutil a annoncé jeudi qu'il se rendait aux arguments de l'opposition, qui réclamait la scission du projet de loi afin d'étudier les deux questions séparément.

«J'ai l'intention de proposer une motion de scission de ce projet de loi de façon à ce qu'on puisse discuter uniquement de la partie financement des partis politiques pour en arriver le plus rapidement possible à une entente entre les parlementaires», a-t-il dit.

Au cours des dernières semaines, les allégations de financement illégal se sont multipliées à l'endroit du gouvernement, notamment après que trois ministres aient indiqué que le PLQ pouvait recevoir des contributions de la part d'entreprises, ce qui est interdit depuis 1977.

En vertu de la Loi électorale, seuls les électeurs peuvent contribuer aux partis politiques et le montant maximal est fixé à 3000 $.

Au cabinet Axor, la réceptionniste Bianca Chevrette, qui a versé 3000 $ au PLQ, s'est refusée à tout commentaire relativement à sa contribution.

Un contrôleur financier de l'entreprise, qui n'a pas voulu s'identifier, a cependant rappelé La Presse Canadienne pour signifier qu'Axor ne remboursait pas les contributions politiques.

«On ne rembourse pas de dons aux employés», a-t-il dit.

Selon les données compilées par Québec solidaire, 19 employés d'Axor ont versé au total 56 400 $ au PLQ en 2008.

Des quatre cabinets ciblés par la formation de M. Khadir, les employés de Cima+ sont ceux qui ont contribué le plus généreusement à la caisse libérale, avec un total de 102 650 $.

Le président de Cima+, Kazimir Olechnowicz, a affirmé que son entreprise encourageait ses employés à contribuer à la vie communautaire, que ce soit auprès d'organismes caritatifs ou de partis politiques.

M. Olechnowicz, qui a lui-même versé 3000 $ au PLQ, a cependant indiqué que Cima+ ne rembourse pas les contributions politiques.

«Nos employés sont libres de contribuer aux différents partis auxquels ils croient, a-t-il dit. On ne veut pas donner de directive mais lorsqu'ils connaissent des gens et qu'ils veulent les encourager pour le travail qu'ils ont fait, parce que c'est des gens qu'on connaît de longue date, ils ont le droit de le faire.»