Le ministre de la Famille, Tony Tomassi, juge acceptable que des garderies subventionnées par l'État enseignent la religion, comme l'islam et le judaïsme.

Les garderies sont des «entités indépendantes», a-t-il expliqué lors d'un bref point de presse, hier. Et rien ne leur interdit d'initier les enfants à des rituels religieux.Selon le ministre, «un service de garde, c'est la continuité du noyau familial. Les parents choisissent un service de garde qui répond à leurs valeurs. C'est la transmission des valeurs familiales qui se poursuit dans un service de garde.»

Tony Tomassi a cependant ajouté: «Aucune place n'est octroyée sur la base d'une quelconque confession religieuse.»

«Pour nous, l'important est de développer des places. Et nous allons continuer de développer des places où les besoins sont pour les parents du Québec», a-t-il dit.

Selon son attachée de presse, Isabelle Mercille, «ce n'est pas illégal» d'enseigner la religion à la garderie. Aucune loi ou règle «n'interdit formellement» cette pratique, a-t-elle dit à La Presse.

Le ministère de la Famille a accordé, en 2007 et en 2008, 80 places à 7$ à l'Association islamique des projets charitables pour ouvrir la garderie privée Oasis Bout'chou à Laval, a révélé La Presse Canadienne. L'association a pour but de «propager l'enseignement islamique parmi les musulmans et les non-musulmans», indique son inscription au registre des entreprises.

De son côté, le centre de la petite enfance Beth Rivkah, dirigé par le rabbin ultra-orthodoxe Yosef Minkowitz, souligne sur son site internet que toutes les «activités journalières sont pénétrées de l'esprit de Torah et de la tradition juive». «Apprendre la Torah, c'est vivre la Torah», ajoute-t-il. Beth Rivkah, avec ses 124 places, est le plus grand CPE au Québec. Il compte 44 places de plus que le maximum autorisé.

Tony Tomassi a demandé à ses fonctionnaires de mener des vérifications sur cette garderie. Il ne lui reproche pas directement de faire de l'enseignement religieux. Il veut s'assurer que son programme éducatif contienne tous les éléments exigés. En vertu des règles du Ministère, ce programme «vise à favoriser le développement global de l'enfant en lui permettant de développer toutes les dimensions de sa personne, notamment sur le plan affectif, social, moral, cognitif, langagier, physique et moteur», a dit Tony Tomassi. La religion ne fait pas partie des critères. Aucune balise n'existe à ce sujet.

D'autres garderies subventionnées ont une vocation religieuse, a constaté La Presse. Par exemple, Maïmonide, qui a obtenu 70 nouvelles places en 2008, offre une «initiation aux rituels traditionnels juifs séfarades, qui constituent une dimension fondamentale» de son «programme éducatif». «Tout en développant leur attachement à l'État d'Israël, les enfants vivent au rythme d'un calendrier religieux extrêmement riche et diversifié», peut-on lire sur son site internet.

Pour le directeur général de l'Association québécoise des centres de la petite enfance, Jean Robitaille, «ce n'est pas le rôle et la responsabilité des services de garde de faire de l'enseignement religieux». Le Parti québécois condamne également l'existence de garderies à vocation religieuse, d'autant plus que le gouvernement a retiré les cours d'enseignement religieux des écoles.

Lors de la période des questions à l'Assemblée nationale, le député de Gouin, Nicolas Girard, a mis en doute la parole du ministre Tomassi. Il a brandi un document du ministère de la Famille dans lequel il justifie l'attribution de places à la garderie Oasis Bout'chou en mentionnant «milieu homogène». Pour le PQ, cela prouve que des places sont attribuées sur une base religieuse. M. Tomassi n'a pas expliqué pourquoi cette garderie est décrite comme un «milieu homogène». Nicolas Girard a rappelé que deux administrateurs de cette garderie de Laval ont versé 22 000$ à la caisse du Parti libéral depuis 2003.