Le député Jean D'Amour a une nouvelle fois placé les libéraux dans l'embarras, mardi, en admettant qu'un entrepreneur en construction lui avait donné, il y a deux ans, une enveloppe d'argent comptant destinée à un candidat à la mairie de Rivière-du-Loup.

En faisant cet aveu, M. D'Amour a annoncé qu'il se retirait du caucus libéral d'ici à ce que des vérifications soient faites sur les circonstances entourant cette contribution suspecte de 500 $, reçue à son domicile en avril 2007, durant la campagne électorale municipale de la ville du Bas-Saint-Laurent.

Lors d'un point de presse, le député a affirmé qu'au cours des derniers jours, il avait contacté le Directeur général des élections (DGE) ainsi que les policiers de la Sûreté du Québec (SQ) chargés d'enquêter sur le milieu de la construction.

M. D'Amour, lui-même un ancien maire de Rivière-du-Loup, a décidé d'aviser les autorités deux ans après les faits parce que Michel Morin, à qui l'argent était destiné, a récemment évoqué publiquement cette contribution, finalement retournée à l'entrepreneur en construction.

«Je conviens être dans une position inconfortable et pour cette raison j'ai pris la décision de me retirer temporairement du caucus libéral, a-t-il déclaré. Il ne fait aucun doute dans mon esprit que ces vérifications faites, je pourrai revenir au sein du caucus libéral au cours des prochaines semaines, sinon au cours des prochains jours.»

Le bureau du DGE a confirmé qu'une enquête avait été ouverte sur la foi des allégations de M. D'Amour, mais la SQ s'est refusée à tout commentaire.

Cette révélation du député libéral a aussitôt fait bondir le Parti québécois, qui est revenu à la charge, en Chambre, pour réclamer une nouvelle fois la tenue d'une enquête publique sur les allégations de malversations dans le milieu de la construction.

Le porte-parole péquiste du dossier de sécurité publique, Bertrand Saint-Arnaud, a déploré que le gouvernement se limite à attendre la fin des enquêtes policières.

«A un moment donné, assez c'est assez, a-t-il dit. Qu'est-ce que ça va prendre de plus à ce gouvernement?Combien d'enveloppes brunes de plus ça va vous prendre avant d'instaurer une commission d'enquête publique indépendante et transparente?»

En se rendant au Salon bleu, le ministre de la Sécurité publique, Jacques Dupuis, s'était plutôt réjoui que M. D'Amour ait choisi de transmettre ses informations au DGE ainsi qu'à une escouade récemment créée afin de faire enquête sur le milieu de la construction.

«M. D'Amour a posé le bon geste en se référant lui-même aux enquêteurs de l'opération Marteau de la SQ et aux enquêtes du DGE, a-t-il dit. On verra le résultat des enquêtes.»

En vertu de la Loi électorale, les entreprises ne peuvent faire de contributions politiques et toute somme de plus de 100 $ doit être donnée par chèque.

Quelques minutes avant la période des questions, M. D'Amour a raconté comment, en rentrant chez lui, en avril 2007, il avait découvert cinq billets de 100 $ dans une enveloppe non cachetée qu'un entrepreneur avait remise à son épouse.

Craignant qu'il s'agisse d'une contribution illégale, M. D'Amour a rapidement contacté l'homme d'affaires afin qu'il revienne chercher son enveloppe, qu'il souhaitait voir transmise à M. Morin, réélu à la mairie de Rivière-du-Loup la semaine dernière, après avoir succédé à M. D'Amour il y a deux ans.

«Je n'ai jamais été un intermédiaire et je ne le serai jamais, a-t-il dit. Je pensais et je pense toujours que l'entrepreneur, que je connais depuis quelques années maintenant, a posé un geste maladroit parce qu'il ne connaissait pas la Loi électorale selon ce qu'il m'a confié lui-même lorsqu'il est venu chercher son enveloppe.»

Au moment où il a reçu le don de 500 $, M. D'Amour venait tout juste d'être défait aux élections provinciales par le chef adéquiste Mario Dumont, qui avait remporté la circonscription de Rivière-du-Loup.

Avant de faire le saut en politique provinciale, M. D'Amour a été maire de Rivière-du-Loup pendant huit ans.

De mars 2008 à août dernier, M. D'Amour a aussi été président du PLQ.

M. D'Amour avait placé les libéraux dans l'embarras, en septembre dernier, lorsque le commissaire au lobbyisme a ouvert une enquête sur ses activités de représentation pour le compte d'une firme d'ingénierie liée au scandale des compteurs d'eau à Montréal.

L'investigation du commissaire, qui est toujours en cours, doit déterminer s'il a commis une infraction en rencontrant, durant les deux années suivant son départ de l'hôtel de ville de Rivière-du-Loup, des élus du Bas-Saint-Laurent, dont M. Morin, afin de proposer les services de BPR.

A titre de président du PLQ, M. D'Amour avait aussi placé les libéraux sur la défensive, en mars 2008, en confirmant à un journaliste que M. Charest reçoit, en plus de son salaire de fonction, une rémunération annuelle de 75 000 $ de son parti politique.

La semaine dernière, peu après sa réélection, M. Morin avait déclaré qu'il serait prêt à participer à une enquête publique sur les malversations dans le secteur de la construction.

Le maire de Rivière-du-Loup avait indiqué qu'il avait refusé, lors de sa première campagne municipale, le don de 500 $ qu'une entreprise du secteur de la construction voulait lui faire «par personne interposée».

Mardi, lors de son point de presse, M. D'Amour a affirmé qu'il était visé par ces affirmations.

«Cette histoire me concerne dans une certaine mesure», a-t-il dit, avant d'en faire le récit.