Accusé d'avoir manqué à son devoir de neutralité durant la course à la direction, Mario Charpentier a remis sa démission à titre de président de l'ADQ, lundi.

«Les récents événements me dictent de prendre mes distances envers un parti que je dois servir avec toute la sérénité requise, a-t-il affirmé dans un communiqué publié en début de soirée. Vous comprendrez qu'il s'agit d'un choix déchirant qui fait passer les intérêts de l'ADQ au-delà de mon attachement et de mon engagement envers mon parti.»

Mario Charpentier était au centre d'une controverse depuis jeudi dernier. TVA a obtenu l'enregistrement d'une conversation téléphonique dans laquelle le président insiste sur la nécessité de récolter des fonds, plus de 20 000 $, pour la campagne de Gilles Taillon. Il dit même avoir donné deux chèques d'un montant total de 6000 $, l'un à son nom et l'autre au nom de sa femme.

Dans un communiqué, M. Charpentier a soutenu qu'au moment de la conversation, son devoir de réserve lui permettait de contribuer au financement de l'équipe Taillon, tout en demeurant «discret» quant à cet appui. À la fin mai, a ajouté l'avocat, le comité exécutif de l'ADQ a précisé que ce devoir de réserve éliminait la possibilité de verser un don. M. Charpentier a alors réclamé les deux chèques, qui n'ont pas été encaissés.

Le clan d'Éric Caire a exigé la démission de M. Charpentier. Le député de la Peltrie, candidat malheureux à la direction de l'ADQ, a d'ailleurs précipité l'annonce de son départ, vendredi, en raison de la controverse.

Dans un communiqué de presse laconique, Gilles Taillon confirme qu'il a accepté la démission de M. Charpentier. Il le remercie pour son «dévouement» et son «implication». M. Charpentier milite à l'ADQ depuis 2007. Il a été candidat dans Brome-Missisquoi. Il a accédé à la présidence de l ADQ en décembre 2008, peu de temps après la débâcle électorale du parti.

Les choses vont de mal en pis à l'ADQ, puisque le député de Chauveau, Gérard Deltell, pourrait maintenant quitter le parti, comme l'ont fait avec fracas Éric Caire et Marc Picard. Questionné par les journalistes lundi, M. Deltell a refusé de s'engager à demeurer au sein de la formation dirigée par Gilles Taillon. «Soyez sans crainte, vous serez informés au moment opportun lorsque je déciderai de commenter publiquement.»

Pourrait-il quitter l'ADQ ? lui a-t-on demandé à maintes reprises. «Je ne ferai pas de commentaires sur la suite des événements», a répété M. Deltell, qui avait songé un temps à se lancer dans la course à la direction. Il n'a appuyé aucun candidat.

En des termes plutôt ambigus, Gérard Deltell a laissé entendre que les prochains gestes de M. Taillon seront déterminants. Le chef adéquiste rencontre aujourd'hui les députés de son parti, qui ne sont plus que quatre, et qui se réuniront au préalable afin de discuter de l'avenir du parti.

«J'ai été élu sous la bannière de l'ADQ et j'en suis très fier. Je souhaite ardemment que tout se passe comme il se doit, comme il faut. Mais actuellement, ce que je vous dis, c'est que je suis en écoute sur tout ce qui se passe, tout ce qui se dit», a dit M. Deltell.

À l'invitation du gouvernement, Gérard Deltell a assisté à Lac-Beauport, dans la circonscription de Chauveau, à l'annonce du premier ministre Jean Charest concernant la création d'un groupe de travail chargé d'attirer à Québec des compétitions internationales, dont éventuellement les Jeux olympiques d'hiver.

Au cours de la conférence de presse, Jean Charest et les ministres présents - Sam Hamad, Yves Bolduc et Michelle Courchesne - ont multiplié les clins d'oeil et les salutations vers le député adéquiste.

Le premier ministre a les bras grands ouverts. «On a toujours été un parti d'ouverture, et on ne changera pas. Je crois beaucoup à l'art d'inclure», a-t-il dit, reprenant l'expression qu'il avait utilisée quand, tout juste avant le déclenchement des dernières élections générales, deux députés adéquistes avaient traversé la Chambre pour se joindre au PLQ.

Éric Caire a confié que le PLQ l'a courtisé. «Si des gens se parlent, appellent pour sympathiser, c'est une chose. Si des démarches formelles ont été entreprises, non», a réagi Jean Charest.

Éric Caire reste totalement insensible à l'appel du pied de Pauline Marois, qui s'est dite disposée à l'accueillir. Elle a cependant jugé nécessaire au préalable de tenir des discussions sur certaines orientations politiques, notamment la souveraineté. «D'abord, je ne suis pas souverainiste, a dit Éric Caire. Je l'ai déjà été, mais je ne pense plus que ce soit la meilleure option. Mieux vaut un Québec autonome au sein du Canada, selon moi.» Il a répété qu'il avait l'intention de terminer son mandat comme député indépendant, tout comme son collègue Marc Picard.

Ironiquement, M. Caire a souligné qu'il serait prêt à se joindre à une coalition où se retrouveraient des élus péquistes plus proches de sa vision de centre-droite, comme les députés Claude Pinard (Saint-Maurice) et Nicolas Marceau (Rousseau), plus proches selon lui du courant de pensée qu'incarnait un François Legault.

M. Caire a insisté sur le fait qu'il n'a pas claqué la porte pour inciter Gilles Taillon à quitter son poste. «Il est en train de tuer tranquillement ce qui reste de l'ADQ», a-t-il souligné.