La ministre de la Justice, Kathleen Weil, n'a plus rien à envier - ou presque - à son homologue français. Elle a maintenant elle aussi un bureau à la Place Vendôme. Celle de Notre-Dame-de-Grâce, pas celle de Paris, mais tout de même. L'aménagement de ses nouveaux locaux a coûté plus de 144 000$.

Kathleen Weil se défend d'avoir fait gonfler la facture avec des demandes coûteuses. «Ce n'est même pas moi qui ai décidé de la couleur des murs!» a-t-elle lancé à La Presse.

 

La Société immobilière du Québec (SIQ) est en effet responsable de l'ensemble des travaux. Elle confirme que la ministre ne s'est pas mêlée de l'opération.

Au lendemain de son élection, le 8 décembre dernier, Kathleen Weil a hérité du bureau de circonscription de son prédécesseur, Russel Copeman. Peu de temps après la nomination de Mme Weil au sein du cabinet ministériel, le 18 décembre, la SIQ a jugé que les locaux de la rue Sherbrooke ne respectaient pas les normes applicables aux bureaux d'un ministre. Kathleen Weil confirme. «Ils m'ont dit: vous n'avez pas le choix, il faut déménager.»

Le bureau de la rue Sherbrooke ne disposait pas d'espaces réservés de stationnement et un «poste d'accueil sécurisé» ne pouvait pas y être construit. Ce sont deux des exigences de la SIQ qui s'appliquent à un bureau de ministre, mais pas à celui d'un député, a affirmé Martin Roy, porte-parole de la SIQ.

La Société immobilière s'est mise à la recherche d'un nouveau bureau. Elle en a déniché un à la Place Vendôme, au 5252, boulevard De Maisonneuve Ouest, un immeuble appartenant à la Standard Life. Ce n'est pas aussi chic que la célèbre place Vendôme de Paris où se trouve le bureau du ministre français de la Justice, mais la coïncidence peut faire sourire.

Respect des normes

D'importants travaux étaient nécessaires selon la SIQ pour que les normes soient respectées. Elle a exigé la construction d'un poste d'accueil sécurisé, l'installation d'un système de sécurité, une meilleure insonorisation, le changement du système de ventilation, le remplacement des tapis, etc. Tous ces travaux ont entraîné d'importants honoraires professionnels. La facture totale atteint 144 342,39$, selon un document transmis par le ministère de la Justice en vertu de la Loi sur l'accès à l'information.

La SIQ juge que la facture n'est pas si élevée. «C'est tout à fait dans les normes», a dit Martin Roy. Ce type de travaux est parfois nécessaire lorsqu'un député joint le Conseil des ministres. «Ça arrive de façon assez fréquente», a affirmé M. Roy, qui n'a pas donné d'autres exemples.

L'agent de location du groupe immobilier Standard Life, Daniel Legault, juge que les bureaux de la ministre n'ont rien de très luxueux. «Ce sont des installations assez standards. Le tapis, par exemple, c'est celui qu'on installe dans n'importe quel autre bureau.»

L'Ordre des architectes n'est pas surpris du total de la facture. «Je ne tombe pas en bas de ma chaise en entendant ça, a affirmé son président, André Bourassa. Les normes se sont accrues, et il faut payer pour ça. Par exemple, refaire un système de ventilation, ça coûte extrêmement cher. Alors, ça ne semble pas anormal.»

Le loyer annuel à la Place Vendôme - pour le local de 140 mètres carrés - s'élève à 33 205,08$, c'est-à-dire 2767,09$ par mois. La SIQ précise que le loyer payé par le ministère de la Justice comprend le coût des travaux amorti sur quelques années. Le loyer de l'ancien bureau, d'une superficie semblable (120 mètres carrés), était de 1960$.

L'attaché de presse de Mme Weil, Philippe Archambault, assure que «la ministre n'a pas participé à l'aménagement des locaux. Et on a gardé les mêmes meubles (que ceux de Russel Copeman) qui datent des années 70 et 80.»

La mise à niveau du système de sécurité dans les bureaux de la ministre Weil et de son collègue de la Sécurité publique, Jacques Dupuis, au palais de justice de Montréal a coûté 13 937$. L'aménagement de leur salle de conférence, avec l'installation de nouveaux équipements multimédias, a entraîné une dépense de 44 490$.