En renonçant précipitamment à ses options d'achat d'actions de BCE, le président et chef de la direction de la Caisse de dépôt et placement, Michael Sabia, a une fois de plus démontré que le gouvernement a bâclé le processus qui lui a récemment permis d'obtenir ce poste, ont déclaré vendredi les partis d'opposition.

Le porte-parole péquiste des finances, François Legault, a répété que le processus de sélection devrait être recommencé, notamment parce que les vérifications d'usage n'ont pas été faites concernant les actifs de M. Sabia.

«Tout le processus de nomination a été bâclé et improvisé, a-t-il dit lors d'une entrevue téléphonique. On n'a pas fait les vérifications de base.»

Jeudi, en soirée, M. Sabia a annoncé qu'il renonçait à 863 000 options d'achat d'actions de l'entreprise de télécommunications qu'il a dirigée de 2002 à 2008.

Durant la journée, M. Legault avait soutenu que ces options pouvaient placer M. Sabia en conflit d'intérêts, notamment parce que la CDP a une participation dans Vidéotron, une autre entreprise de télécommunications.

La ministre des Finances, Monique Jérôme-Forget, avait fait peu de cas de cette situation, soutenant qu'en confiant ces titres à une fiducie sans droit de regard, M. Sabia n'avait aucun risque d'être influencé par ses intérêts personnels.

Quelques heures après un échange musclé avec le PQ, Mme Jérôme-Forget a toutefois subi un cuisant désaveu.

Selon M. Legault, la décision de M. Sabia démontre qu'une fiducie n'était pas suffisante pour se séparer de ces options d'achat.

«Ce que je trouve inacceptable, c'est que Monique Jérôme-Forget, hier (jeudi), essayait de défendre l'indéfendable, a-t-il dit. Elle essayait de nous dire que c'était acceptable que M. Sabia ait 900 000 options d'achat d'actions de BCE, exerçables sur trois ans, dans une fiducie sans droit de regard.»

Par ailleurs, M. Legault a souligné la confusion de Mme Jérôme-Forget, lorsqu'elle a affirmé que la fiducie de M. Sabia avait déjà été créée, contrairement à ce que le président et chef de la direction de la CDP a par la suite indiqué dans son communiqué.

«Elle nous a dit aussi, à l'Assemblée nationale, que c'était déjà fait, que les actions étaient déjà dans une fiducie alors que ce n'est pas le cas, a-t-il dit. Qu'elle soit deux coups en retard, comme ministre de tutelle, moi ça me préoccupe.»

Le porte-parole adéquiste du dossier des finances, François Bonnardel, a affirmé que dans l'empressement qui a mené à la nomination de M. Sabia, le président du conseil d'administration de la CDP, Robert Tessier, - lui-même nommé quelques jours avant M. Sabia - n'a pas pris la peine de demander au candidat une liste de ses actifs.

«C'est le résultat d'un processus de nomination qui s'est fait sans transparence et à la sauvette, a-t-il dit. Est-ce que Sabia, aussi, avait remis ou est-ce que M. Tessier, comme nouveau président du c.a., a demandé à M. Sabia de déposer tous ses actifs, qui sont reliés à des compagnies soit canadiennes, américaines ou à l'extérieur du pays? Faut croire que ça n'a pas été fait.»

Après avoir été au coeur de la dernière campagne électorale, la situation de la CDP, qui a affiché en février des pertes annuelles de 40 milliards $, continue d'être une source de turbulence pour le gouvernement.

Plus récemment, la nomination de Sabia, en mars, a été critiquée de toutes parts, notamment parce que M. Tessier a reconnu qu'il n'avait rencontré aucun autre candidat durant la sélection, lors d'un processus effectué en une semaine à partir d'une liste établie au préalable.