Les municipalités verront enfin la couleur de l'argent promis par le fédéral dans un programme d'infrastructures annoncé il y a deux ans. Et bonne nouvelle pour Montréal: une entente est intervenue entre Ottawa et Québec sur le projet du Quartier des spectacles. Elle serait signée la semaine prochaine, a appris La Presse.

Le gouvernement Charest a encerclé la date du 3 avril sur son calendrier pour cette annonce tant attendue dans la métropole. Le fédéral doit lui donner une réponse sous peu.

 

Québec voulait dévoiler l'entente sur le Quartier des spectacles - finalisée depuis un moment déjà - dès hier, en même temps que les ententes administratives sur les infrastructures locales. Ottawa a refusé, préférant faire une annonce distincte, a-t-on indiqué à La Presse. Il a déjà reporté à quelques reprises la signature des ententes administratives survenue finalement hier.

L'entente sur le Quartier des spectacles doit servir de «modèle» pour toutes les autres à venir concernant des grands projets. Plusieurs d'entre eux sont en suspens depuis des mois, voire des années. Il s'agit entre autres des projets du Musée des beaux-arts de Montréal et du complexe sportif de l'Université Laval, à Québec.

Ottawa et Québec ont annoncé le projet du Quartier des spectacles en octobre 2007. Ils ont alors promis d'y investir 40 millions de dollars chacun. Mais aucune entente formelle sur le financement du projet n'avait été signée.

La Ville de Montréal, qui allonge aussi 40 millions, a lancé les travaux avant même la conclusion de l'entente Ottawa-Québec. Elle est seule à payer en ce moment.

Les coûts du projet, fixés en 2007 à 120 millions, sont passés à 147 millions. Le dépassement de 27 millions est lié l'achat de terrains et à des coûts indirects pour des dépenses faites avant la date d'admissibilité au programme fédéral Chantiers Canada. La Ville a dû emprunter le montant et refuse de le payer seule.

Investissements de 2,3 milliards

Hier à Lévis, les premiers ministres Stephen Harper et Jean Charest ont signé les ententes administratives concernant les infrastructures qui prévoient des investissements de 2,3 milliards de dollars, faits à parts égales par Ottawa, Québec et les municipalités.

Ces ententes permettent le versement au Québec d'une partie des sommes prévues au programme Chantiers Canada. D'abord dévoilé lors du budget de mars 2007, puis annoncé en grande pompe en novembre de la même année, ce programme d'infrastructures a fait l'objet d'une entente-cadre entre Ottawa et Québec en septembre 2008, juste avant les élections fédérales. Les deux gouvernements promettaient de financer rapidement des projets soumis par les municipalités.

Or, 2 milliards de dollars de fonds fédéraux dorment dans les coffres depuis, faute d'ententes administratives entre Ottawa et Québec. Les négociations ont été plus longues que prévu. Les projets des municipalités se sont retrouvés sur la glace.

Les deux ententes signées hier remédient en partie à la situation. Elles garantissent le versement de 410 millions sur les 2 milliards promis, le reste étant destiné à de grands projets - comme le Quartier des spectacles - qui font toujours l'objet de pourparlers dans bien cas. Québec et les municipalités ajoutent chacun 410 millions.

Entente sur l'eau potable

Un nouveau programme - annoncé dans le dernier budget conservateur - est créé pour le renouvellement des conduites d'eau potable et d'eaux usées. Ottawa y investit 350 millions. Québec allonge la même somme, tout comme les municipalités.

L'annonce était attendue. Les villes piaffaient d'impatience et déploraient ouvertement la lenteur des négociations entre Ottawa et Québec.

«Évidemment, c'est toujours compliqué ces négociations, a affirmé Stephen Harper. L'important, ce n'est pas la signature, c'est que les projets démarrent immédiatement.»

Jean Charest a éludé la question portant sur la lenteur des pourparlers, insistant sur les «niveaux records» d'investissements de son gouvernement dans les infrastructures et l'énergie, près de 14 milliards cette année.

«Maintenant que les ententes sont signées, maintenant que les projets sont prêts, au travail!» a-t-il lancé dans son discours d'ouverture. Le premier ministre a promis que les projets soumis par les municipalités obtiendront l'approbation du ministère des Affaires municipales dans un délai de sept à 20 jours.

Le président de la Fédération québécoise des municipalités, Bernard Généreux, trouve que «ce n'est pas normal» que les deux gouvernements aient pris sept mois pour conclure des ententes administratives. «Notre patience est épuisée. Il faut rendre l'argent disponible rapidement», a-t-il dit. Selon lui, les élections québécoises, déclenchées en novembre, ont reporté la conclusion des ententes et la réalisation des projets. «Si l'élection n'avait pas eu lieu aussi tôt, on serait déjà au travail», a-t-il lancé.

M. Généreux craint maintenant un «engorgement» à Québec avec le dépôt simultané de tous les projets des municipalités en attente depuis des mois. Il redoute également une pénurie de main-d'oeuvre et d'équipements dans le secteur de la construction qui risque de gonfler la facture des travaux.