Le gouvernement Charest a senti le besoin de faire une seconde réaction au budget du gouvernement Harper, manifestement pour éteindre l'incendie allumé par sa ministre des Finances, Monique Jérôme-Forget.

Le Québec compte travailler «avec un gouvernement fédéral, pas unilatéral», a martelé M. Charest. Comme sa collègue l'avait fait, il a critiqué la décision du gouvernement Harper de revoir à la baisse les paiements de péréquation pour le Québec. «On a eu 10 ans de débats, d'efforts pour récupérer ce que le Québec avait perdu, a-t-il rappelé. On a fait des gains et, après 10 ans, on était arrivés à un consensus.»

 

En 2007, le gouvernement fédéral et les provinces s'étaient entendus sur une formule de calcul de la péréquation, et il n'est pas raisonnable qu'Ottawa décide seul de modifier ces paramètres, a soutenu Jean Charest. Le «bon sens dans un système fédéral» exige que le fédéral respecte le consensus qu'il a obtenu. Il devrait soumettre ses intentions quant à la péréquation dans un énoncé, un document susceptible d'être discuté avec l'ensemble des provinces.

Mais, a-t-il insisté, même si le Québec reçoit 695 millions de moins qu'il ne prévoyait en 2010, il recevra tout de même plus d'argent que l'année précédente. De même, en 2009, Québec recevra 75 millions de moins que ne prévoyait le ministère des Finances, mais c'est tout de même davantage qu'en 2008. «Le Québec en reçoit plus, a-t-il nuancé. Ce n'est pas comme si on s'en faisait enlever... On reçoit plus, mais c'est moins que prévu. Il faut mettre les choses dans leur contexte.»

La veille, reprenant les propos d'un journaliste, Mme Jérôme-Forget avait semblé faire une déclaration de guerre à Stephen Harper: «S'il a largué le Québec, c'est bien dommage pour lui, il sera dans une élection prochainement et aura peut-être besoin des comtés qu'il a au Québec», avait-elle laissé tomber.

Jean Charest a adopté un tout autre ton. Il a rappelé que, depuis 2005, les transferts fédéraux au Québec avaient augmenté de 57%.

Au sujet de sa promesse électorale de maintenir l'équilibre budgétaire, M. Charest est bien plus ambigu que par le passé: «Il faut tout faire pour gérer d'abord avec rigueur. Maintenant, le contexte économique change de mois en mois. On doit d'abord répondre à une priorité: maintenir les gens à l'emploi. Et s'il faut faire des gestes qui nous amènent en déficit, on ne peut pas fermer cette porte» a-t-il soutenu.

Bonne réponse

Dans le budget Flaherty, les mesures sur l'assurance emploi et sur la formation de la main-d'oeuvre sont «une bonne réponse», observe M. Charest, qui souligne aussi qu'il était l'un de ceux qui avaient suggéré à Ottawa d'injecter davantage de fonds dans les organismes fédéraux de développement économique.

Il se défend d'avoir «empoisonné» les relations fédérales-provinciales, au printemps 2007 (juste avant les élections), en affectant à des baisses d'impôt le milliard de dollars accordé par Ottawa pour la santé et l'éducation dans le cadre du règlement du déséquilibre fiscal. Mais, rappelle Jean Charest, ce printemps-là, «neuf provinces sur 10 avaient réduit leurs impôts. Le fédéral l'a fait hier, et on va me reprocher d'avoir baissé les impôts?» a-t-il lancé. La décision du fédéral quant aux impôts devrait clore cette controverse, souligne-t-il.

Il venait de passer un autre coup de fil à Michael Ignatieff - les deux hommes s'étaient déjà parlé récemment, avait indiqué la veille Mme Jérôme-Forget. Jean Charest ne croit pas que cela nuise aux rapports du Québec avec le gouvernement fédéral. «Les rapports que j'ai avec M. Harper sont les mêmes que ceux que j'avais avec MM. Chrétien et Martin dans le passé. Le rapport entre les deux gouvernements ne varie pas selon les gens en poste» a insisté M. Charest. Son dernier contact avec M. Harper remonte au 16 janvier.