Le nouveau gouvernement de la Coalition avenir Québec (CAQ) compte envoyer sous peu une liste de projets de transports prioritaires à Ottawa, mais il ne devrait pas s'attendre à une pluie de milliards à court terme. Les fonds fédéraux disponibles pour des projets de transports collectifs québécois s'élèveront en moyenne à 433 millions par année d'ici 12 ans, tandis que les sommes qui pourraient servir à financer des autoroutes seront bien moindres.

Le nouveau ministre des Transports du Québec, François Bonnardel, a énuméré une ambitieuse liste de projets plus tôt cette semaine sur les ondes de Radio-Canada. Elle comprend le prolongement du Réseau express métropolitain (REM) vers Chambly et vers Laval, le prolongement des lignes bleue et jaune du métro et plusieurs élargissements d'autoroutes, dont l'A19, l'A25 et l'A30. M. Bonnardel a indiqué qu'il accorderait la priorité à certains dossiers et ferait parvenir la liste à Ottawa au cours des « trois à quatre prochaines semaines ».

En entrevue avec La Presse hier, le ministre fédéral des Transports, Marc Garneau, s'est montré disposé à collaborer avec son nouvel homologue caquiste, qualifiant de « très étroite » la relation entre les deux ordres de gouvernement en matière de transports.

« Il y a beaucoup d'enjeux. M. Bonnardel et moi, on va s'asseoir ensemble et on va parler du rôle fédéral et du rôle provincial, a expliqué le ministre. Je vous dirais que la coopération avec le Québec a toujours été excellente, vraiment. »

CORRIDORS COMMERCIAUX

Les nombreux projets mis de l'avant par le gouvernement de la CAQ ne pourront toutefois bénéficier d'une quantité infinie de fonds fédéraux. Dans le cas des élargissements autoroutiers, les dossiers qui pourraient être soumis par Québec devront répondre à plusieurs critères précis pour être éventuellement admissibles au Fonds national des corridors commerciaux (FNCC).

Ce fonds pancanadien totalise 2 milliards de dollars étalés sur 11 ans. Quelque 767 millions ont déjà été attribués jusqu'à maintenant, et 255 millions sont déjà réservés aux territoires. Cela signifie que toutes les provinces devront se partager les sommes restantes - 978 millions - pendant la prochaine décennie. Le Québec peut espérer recevoir une partie de cette somme, mais certainement pas l'intégralité.

Marc Garneau attendra de connaître le détail des propositions caquistes avant de se prononcer sur leur conformité - ou pas - aux critères du FNCC. « Il faut examiner l'argument qui est présenté, et il faut que ce soit quelque chose de solide comme argument, a-t-il expliqué. Si ça rentre dans les critères, c'est considéré. »

« Dans la première ronde du programme des corridors nationaux de transport, celui que je gère, on a reçu plus de 400 soumissions à travers le Canada. C'est un programme qui est très convoité et populaire. »

- Marc Garneau, ministre fédéral des Transports

Pour qu'un projet satisfasse aux critères du FNCC, il faut notamment démontrer qu'il soutient « le flux de marchandises et de passagers en réduisant les goulots d'étranglement et en abordant les problèmes de capacité », est-il indiqué sur le site web de Transports Canada. Ottawa a retenu jusqu'à maintenant 37 projets, sur les 400 qui lui avaient été présentés.

TRANSPORTS COLLECTIFS

Dans le dossier des transports collectifs, les projets énoncés par le ministre Bonnardel sont ambitieux et coûteront vraisemblablement cher. Le prolongement de la ligne bleue du métro de Montréal sur 5,8 km, par exemple, avait déjà été estimé à 4 milliards de dollars par l'ancien gouvernement Couillard.

On ignore dans quelle proportion la ligne bleue pourrait être financée par Ottawa. Mais ce qui est clair, c'est que cette contribution proviendrait du programme fédéral d'infrastructure. En vertu de ce programme, Ottawa devrait fournir jusqu'à 5,2 milliards sur 12 ans à la province pour financer des projets de transports collectifs. Cela donne une moyenne de 433 millions par année.

Notons que cette enveloppe fédérale pourrait être utilisée pour toute une série de projets de transports en commun à l'échelle de la province, comme des achats d'autobus en région.

Québec a déjà utilisé la majorité des fonds fédéraux qui avaient été débloqués dans la première phase du plan d'infrastructures de 2016, soit 767 millions sur 914 millions. L'argent avait notamment servi à la réfection de stations de métro et du garage Côte-Vertu de la STM.

PROLONGEMENT DU REM

En ce qui a trait au REM, piloté par la Caisse de dépôt, la participation fédérale à ce projet de train électrique (1,3 milliard sur la facture totale de 6,3 milliards) s'est faite par l'entremise d'un prêt de la nouvelle Banque de l'infrastructure du Canada. Cette organisation participe uniquement à des projets commerciaux susceptibles de générer des profits, ce qui rend son recours peu envisageable pour des lignes de métro ou d'autobus.

La majeure partie des projets mis de l'avant par la CAQ seront vraisemblablement financés par le Plan québécois des infrastructures 2018-2028, qui totalise 100 milliards sur une décennie. Selon les prévisions du précédent gouvernement, 20 milliards seront destinés au réseau routier et 9 milliards aux transports collectifs.

LE « PLAN DE DÉCONGESTION » DE LA CAQ

La Coalition avenir Québec a présenté en juin dernier un plan pour désengorger le Grand Montréal, qui prévoit des investissements de 10 milliards d'ici 2030. Ce budget apparaît modeste, si l'on songe qu'à lui seul, le prolongement de la ligne bleue sur 5,8 km a été évalué à 4 milliards. Parmi les 20 projets proposés par la CAQ avant la campagne électorale, on retrouve : 

POUR LA RIVE-SUD

• Prolongement du REM sur 22 km, de Brossard à Chambly 

• Mise à l'étude d'une phase ultérieure d'expansion du REM, de Brossard jusqu'à Boucherville et Sainte-Julie  

• Revitalisation du boulevard Taschereau avec un tramway de 6,5 km, de Longueuil à Brossard, avec une interconnexion au REM

• Mise à l'étude d'un prolongement de la ligne jaune du métro, en partie en souterrain, en partie en surface le long du boulevard Rolland-Therrien

POUR LA RIVE-NORD

• Expansion du REM à Laval sur une distance de 17 km 

• Mise à l'étude d'une phase ultérieure d'expansion du REM selon un axe est-ouest sur l'emprise de l'autoroute 440

DANS L'EST DE L'ÎLE

• Aménagement d'un tramway de la pointe de l'île jusqu'au centre-ville

• Prolongement de la ligne bleue du métro de Montréal

• Réalisation du projet de service rapide par bus sur le boulevard Pie-IX

SUR LES ROUTES

• Élargissement de l'autoroute 30 entre les autoroutes 10 et 20  pour les transports collectifs

• Prolongement de l'autoroute 19 jusqu'à Bois-des-Filion

• Prolongement de l'autoroute 13 jusqu'à l'autoroute 50, sous la forme d'un boulevard urbain

• Relance du projet de modernisation de la rue Notre-Dame Est sous la forme d'un boulevard urbain

Source : Coalition avenir Québec