Le député conservateur Maxime Bernier qualifie de «multiculturalisme extrême» le message souvent répété par le premier ministre Justin Trudeau sur les vertus de la diversité au Canada.

Dans une série de gazouillis publiés en anglais et en français dimanche, M. Bernier soutient que «Trudeau continue de promouvoir son slogan "la diversité est notre force"».

«Oui, le Canada est un pays immense et divers. Cette diversité nous définit et doit être célébrée. Mais où trace-t-on la ligne?», demande M. Bernier. «Le multiculturalisme extrême et le culte de la diversité de Trudeau vont nous diviser en petites tribus qui ont de moins en moins en commun, à part leur dépendance envers le gouvernement (...) des clientèles politiques qu'on achète avec de l'$ des contribuables et des privilèges.»

Le député de Beauce estime que «la balkanisation culturelle amène la méfiance, les conflits sociaux et potentiellement la violence, comme on le voit partout». M. Bernier croit qu'«accueillir des gens qui rejettent les valeurs fondamentales de l'Occident que sont la liberté, l'égalité, la tolérance et l'ouverture ne nous rend pas plus forts» au Canada. Selon lui, «il est temps de renverser cette tendance avant que la situation n'empire», car «plus de diversité ne nous rendra pas plus fort, cela détruira notre pays».

«Des minorités ethniques, religieuses, linguistiques ont été réprimées dans le passé, écrit-il. Nous avons fait beaucoup de chemin pour redresser ces injustices et donner des droits égaux à tous. Le Canada est aujourd'hui l'un des pays où l'on peut le plus librement exprimer son identité.

«Mais pourquoi promouvoir toujours plus de diversité? Si tout et n'importe quoi est canadien, que signifie être Canadien?», demande M. Bernier. «Pourquoi ne pas mettre l'accent sur nos traditions culturelles, ce que nous avons en commun qui nous différencie des autres cultures et sociétés?»

Depuis la campagne électorale de 2015, M. Trudeau s'est fait le chantre de la diversité comme l'un des éléments clés de ce qui fait la force du Canada, et il a martelé ce message dans plusieurs de ses discours et déclarations.

M. Bernier a publié deux autres gazouillis lundi matin dans lesquels il précise qu'il n'est pas contre la diversité, qui définit l'identité de ce pays, mais plutôt contre la quête incessante de plus de diversité, encore et toujours. Il conclut que «ce qui est diversifié à l'infini n'a plus d'identité propre et cesse d'exister».

Le député libertarien, qui a été défait de peu dans la course à la direction du Parti conservateur l'an dernier, a critiqué non seulement le gouvernement Trudeau, mais aussi la position de son propre parti sur la gestion de l'offre dans le secteur agricole. Il a été démis de ses fonctions de porte-parole de l'opposition en juin.

Michelle Rempel en désaccord

Ces commentaires ont suscité de vives réactions, notamment chez le député libéral Marc Miller, qui a demandé au chef conservateur Andrew Scheer de préciser si le parti appuyait les opinions de M. Bernier.

Le porte-parole de M. Scheer, Brock Harrison, a publié lundi une déclaration dans laquelle il exprime son soutien à l'idée de diversité, sans mentionner spécifiquement M. Bernier ou ses commentaires. «Le Canada a été bâti par des gens du monde entier venus ici pour jouir de la liberté, de la prospérité et de l'égalité que notre pays peut offrir», a déclaré M. Harrison.

«Les conservateurs continueront à reconnaître et à célébrer les contributions apportées au Canada par des gens d'horizons divers qui ont enrichi notre histoire et notre société.» M. Harrison a précisé que M. Scheer n'aurait aucun autre commentaire à formuler à ce sujet.

La députée conservatrice Michelle Rempel, qui a des opinions tranchées sur l'immigration, critique elle aussi les commentaires de son collègue Bernier. Dans une quinzaine de gazouillis, dimanche soir, elle critique d'un côté M. Trudeau pour la politique d'immigration de son gouvernement, et de l'autre «ceux qui prétendent que le Canada se transforme en un État de ghettos».

«D'un point de vue politique, il est tout aussi facile de proclamer que »la diversité est notre force« que de conclure à l'échec du pluralisme au Canada, si aucune de ces thèses n'est étayée par des données ou des politiques publiques», écrit la députée de Calgary, qui évoque sa grand-mère slovaque venue s'installer au Canada.

«Je suis tellement fatiguée de voir les arguments de chacun des camps être dilués par des considérations de rectitude politique, puériles ou sans aucun fondement, à seules fins d'opportunisme politique. Ceux qui tombent là-dedans sont tous des lâches», soutient Mme Rempel, qui milite pour une «immigration humanitaire ordonnée», afin que les nouveaux arrivants «puissent s'intégrer au tissu social canadien».