Le gouvernement fédéral n'envisage pas de décriminaliser d'autres drogues que le cannabis, malgré les revendications en ce sens de certaines grandes villes du pays.

Face à la crise des opioïdes qui balaie le Canada, les autorités en santé publique de Montréal et de Toronto se sont fait l'écho de Vancouver en réclamant que la lutte contre les drogues se fasse dans une perspective médicale et non criminelle.

La directrice régionale de santé publique de Montréal, la docteure Mylène Drouin, a récemment donné son appui à son homologue torontoise qui réclame la décriminalisation de toutes les drogues.

Selon un rapport de Santé Canada paru le mois dernier, près de 4000 Canadiens ont succombé à une surdose d'opioïdes en 2017.

Plus de 300 de ces surdoses mortelles sont survenues à Toronto. Du côté de Montréal, 140 décès probablement attribuables à une intoxication aux drogues ont été recensés entre le début de juin 2017 et la fin de juin 2018.

Le maire de Vancouver, Greg Robertson, milite pour sa part depuis longtemps en faveur de la décriminalisation de l'ensemble des drogues, une position adoptée par bon nombre de responsables en santé publique de la Colombie-Britannique. À Vancouver, 335 surdoses d'opioïdes se sont avérées fatales l'an dernier.

Malgré les demandes de ces trois grandes villes, Ottawa reste inflexible. Thierry Bélair, porte-parole de la ministre de la Santé, Ginette Petitpas Taylor, a déclaré que le gouvernement fédéral ne se penche pas sur l'éventualité de décriminaliser ou de légaliser une autre drogue que le cannabis.

Le gouvernement comprend l'importance de déstigmatiser la dépendance et de rendre son traitement plus accessible, a-t-il soutenu, ajoutant que des mesures ont déjà été adoptées en ce sens.

Ottawa a notamment permis aux professionnels de la santé de donner accès plus facilement à des traitements de substitution aux opiacés, en plus d'autoriser la mise en place de plus de 25 sites d'injection supervisée.

L'exemple du Portugal

Le directeur national des politiques publiques de l'Association canadienne pour la santé mentale, Fardous Hosseiny, espère que Vancouver, Toronto et Montréal feront monter la pression sur le gouvernement fédéral.

«Considérant l'ampleur de la crise des opioïdes au Canada, nous savons qu'il faut prendre des mesures audacieuses», souligne-t-il.

M. Hosseiny soulève l'exemple du Portugal, qui a aboli toutes les sanctions pénales associées à la consommation et à la possession de drogues en petite quantité en 2001.

Le premier ministre Justin Trudeau et la ministre Petitpas Taylor ne sont peut-être pas très ouverts à la possibilité de faire campagne avec cette proposition en 2019, mais les partisans libéraux, eux, aiment bien l'idée.

Au congrès du parti tenu à Halifax en avril, des délégués ont adopté une résolution en faveur de la décriminalisation de toutes les drogues actuellement illégales, en imitant le modèle portugais.

La ministre Petitpas Taylor avait alors avancé que l'exemple du Portugal ne pourrait pas se reproduire dans un plus grand pays comme le Canada.

Le chef du Nouveau Parti démocratique, Jagmeet Singh, a pour sa part accédé à la tête de la formation en prenant position en faveur de la décriminalisation de toutes les drogues. Il a d'ailleurs exhorté Justin Trudeau à adopter cette mesure l'automne dernier.

Les conservateurs s'opposent pour leur part à la légalisation du cannabis et seraient donc en désaccord avec l'idée de décriminaliser des substances encore plus dures.