Le ministre canadien de l'Immigration Ahmed Hussen a assuré cet après-midi que le Canada n'avait nullement l'intention de se retirer de l'Entente sur les tiers pays sûrs, qui encadre le passage de demandeurs d'asile entre les États-Unis et le Canada.

Hier, le premier ministre Justin Trudeau avait ouvert la porte à une modification de cette entente.

De passage dans la métropole aujourd'hui pour une allocution devant le Conseil des relations internationales de Montéral (CORIM), le ministre Hussen a confirmé que des discussions étaient déjà en cours avec les autorités américaines. «Ce ne sont pas encore des négociations formelles», a-t-il toutefois assuré. «Nous allons continuer de faire valoir nos inquiétudes.»

En vertu de l'Entente sur les tiers pays sûrs, les demandeurs d'asile sont tenus de présenter leur demande dans le premier pays où ils arrivent, pour peu qu'ils traversent la frontière par les voies officielles. Ainsi, un demandeur d'asile qui se présente à une douane canadienne sera renvoyé aux États-Unis.

Questionné à savoir si le Canada envisageait de se retirer de l'accord advenant une impasse des discussions, M. Hussen a été catégorique: l'entente est là pour rester, bien que chacune des parties puisse en suspendre l'application pendant trois mois.

«Ce serait complètement irresponsable, car cet accord est bon pour le Canada, a-t-il tranché. Nos deux pays gèrent l'immigration de manière ordonnée. Si l'accord était suspendu, nous ne pourrons même plus expulser les migrants qui arrivent des États-Unis par les postes de douane réguliers. Nous aurons encore plus de demandes d'asile que nous en avons maintenant.»

Ahmed Hussen a toutefois justifié les discussions en cours avec ses homologues américains du fait que l'entente est vieille de 14 ans et qu'elle mérite d'être modernisée.

Information incomplète

Le ministre a également affirmé qu'Ottawa avait pris contact avec l'organisation Plattsburgh Cares pour lui signifier qu'elle distribuait de l'information incomplète et possiblement fausse aux migrants désirant faire une demande d'asile au Canada.

La Presse canadienne faisait état hier d'un dépliant distribué par Plattsburgh Cares encourageant les demandeurs d'asile à traverser la frontière au chemin Roxham, décrit comme «le passage irrégulier et non officiel» pour entrer au Canada.

La ville de Plattsburgh où le dépliant circule est située à un peu moins de 50 kilomètres du chemin Roxham à Saint-Bernard-de-Lacolle où quelques milliers de demandeurs d'asile ont traversé depuis l'été dernier.

«Ils n'expliquent pas le système de demande d'asile entier, ni qui peut s'en prévaloir, et cela peut mener des personnes sur la fausse piste, a dit M. Hussen. Nous ne voulons pas créer de faux espoirs à des familles. C'était la bonne chose à faire que d'aller là-bas et dire la vérité sur notre système d'immigration, qu'on ne distribue pas des billets gratuits.»

Ottawa s'attaque aux demandes d'asile irrégulières

Par ailleurs, les demandeurs d'asile qui entrent illégalement au Canada - seulement pour attendre plusieurs mois avant que leur demande de statut de réfugié ne soit traitée - pourraient voir leur dossier finalisé plus rapidement en raison des changements apportés par le gouvernement fédéral.

L'agence indépendante qui traite les revendications du statut de réfugié entend accélérer le traitement des dossiers de ceux qui traversent illégalement la frontière, par exemple en entrant au Canada en provenance des États-Unis par des chemins forestiers non officiels pour revendiquer le statut de réfugié.

Les changements feront en sorte que des douzaines de membres supplémentaires de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié se consacreront exclusivement au traitement de ces demandes, car l'organisme continue à composer avec un important arriéré de dossiers.

Le ministre de l'Immigration Ahmed Hussen espère que cela enverra un message au monde que le fait les réclamations seront entendues rapidement et que les personnes dont la demande sera jugée illégitime seront expulsées du pays.

L'agence est en train d'embaucher 64 employés qui seront affectés au traitement des demandes d'immigration irrégulières.

L'agence estime que le personnel supplémentaire lui permettra de traiter 17 000 autres demandes d'asile d'ici le 31 mars 2020.

- Avec La Presse canadienne