Le Parti conservateur presse le gouvernement Trudeau d'emboîter le pas à la France en refusant d'appuyer la candidature de Michaëlle Jean pour un deuxième mandat à la tête de l'Organisation internationale de la Francophonie (OIF) en raison de ses dépenses jugées «indéfendables».

Moins de 24 heures après que la ministre du Développement international et de la Francophonie, Marie-Claude Bibeau, eut indiqué que le Canada croit toujours que Mme Jean est la personne toute désignée pour continuer à gérer les destinées de l'OIF, le Parti conservateur a répliqué que le gouvernement fait fausse route en appuyant sa candidature, rappelant que le mandat de Mme Jean a été marqué par la controverse en raisons de ses dépenses.

Aux Communes, jeudi, le député conservateur de Louis-Saint-Laurent, Gérard Deltell, a affirmé qu'il ne faut pas s'étonner de voir les libéraux de Justin Trudeau maintenir leur confiance envers Mme Jean compte tenu qu'ils gèrent les fonds publics de la même manière, selon lui.

Le président de la France, Emmanuel Macron, a déjà fait savoir que son gouvernement compte appuyer la candidature de la ministre des Affaires étrangères du Rwanda, Louise Mushikiwabo, jetant ainsi un doute important sur les chances de Michaëlle Jean d'obtenir un deuxième mandat à la tête de l'OIF.

«Ça prend juste des libéraux pour être fiers de ce Michaëlle Jean fait. Michaëlle Jean est devenue un embarras pour le Canada. Elle a géré de façon tout a fait irresponsable son organisation, exactement comme le gouvernement libéral le fait actuellement. On dépense sans compter. C'est tout à fait irresponsable. Ce n'est plus drôle. Voilà que la France vient de retirer son appui à Michaëlle Jean. Comment cela se fait que le gouvernement libéral est le seul à défendre l'indéfendable?», a lancé le député Gérard Deltell.

La ministre Marie-Claude Bibeau a reconnu que l'OIF doit améliorer ses règles en matière de gestion des finances.

«J'ai eu l'occasion de voyager dans plusieurs pays de la francophonie. J'ai rencontré mes homologues, j'ai participé aux rencontres ministérielles. Je peux vous assurer qu'il y a un grand appui à l'égard de la secrétaire générale, qui est une Canadienne et qui fait un bon travail quant à la mission de l'organisation. Nous convenons qu'il y a matière à améliorer les règles de gestion de cette organisation. Et nous aidons Mme Jean et l'organisation à faire», a dit la ministre.

Mme Bibeau a aussi déclaré que Mme Jean fait «la promotion des valeurs qui nous sont chères en tant que Canadiens, soit la défense des droits de la personne, la défense des droits des femmes, l'entreprenariat chez les femmes et chez les jeunes».

En entrevue avec La Presse Canadienne à la fin du mois de juillet dernier, Michaëlle Jean avait confié qu'elle avait «assurément» l'intention de briguer un autre mandat.

Le premier mandat de Michaëlle Jean prend fin à la mi-octobre. L'élection du secrétaire général de l'OIF aura lieu au prochain sommet de la Francophonie, à Erevan (Arménie) le même mois.

Le mandat de Mme Jean, qui a été élue grâce aux efforts diplomatiques de l'ancien gouvernement conservateur de Stephen Harper - avec l'appui du gouvernement du Québec - a été marqué par plusieurs controverses liées à ses dépenses.

À titre d'exemple, Mme Jean avait fait rénover au coût de 500 000 $, puisés à même les fonds publics, la résidence officielle qu'elle loue à Paris, en plus de se procurer un piano de 20 000 $, selon les révélations du Journal de Montréal.

Également, le projet de croisière pour de jeunes francophones à bord d'un grand voilier devait coûter des centaines de milliers de dollars tirés des budgets de l'OIF, faute de commanditaires privés.

Pour sa part, le gouvernement du Québec n'a donné qu'un appui mitigé à Michaëlle Jean jusqu'ici. Nommée à la tête de l'OIF au Sommet de Dakar, en novembre 2014, Michaëlle Jean est sérieusement en eaux troubles. Le gouvernement du Québec avait, depuis quelques jours, entendu des rumeurs quant au changement de cap de la France - en 2014, François Hollande avait donné son appui, névralgique, à Mme Jean. Mais celle-ci n'a jamais fait consensus dans les pays africains.

- Avec Denis Lessard et La Presse Canadienne

AFP

Louise Mushikiwabo