Depuis quelques semaines, les libéraux de Justin Trudeau supputent les chances de leurs cousins provinciaux de remporter les élections prévues dans les deux provinces les plus populeuses du pays et analysent les possibles conséquences d'un changement de gouvernement en Ontario et au Québec.

Les électeurs ontariens seront les premiers à se rendre aux urnes le 7 juin. Les libéraux de Kathleen Wynne sont loin derrière les conservateurs de Doug Ford dans les intentions de vote.

Au Québec, les électeurs iront voter le 1er octobre. Là encore, les libéraux de Philippe Couillard tirent de l'arrière dans les sondages. La Coalition avenir Québec de François Legault pourrait former le gouvernement pour la première fois de son histoire.

«C'est évident que les résultats des élections en Ontario et au Québec risquent de changer la dynamique des relations fédérales-provinciales», a lancé un député libéral du Québec la semaine dernière, faisant notamment allusion à l'avenir du plan de lutte contre les changements climatiques du gouvernement Trudeau, qui pourrait être mis à mal si Doug Ford remporte les élections et met fin à la participation de l'Ontario à la bourse du carbone, dont font également partie le Québec et la Californie.

«Ça risque d'être encore plus compliqué si le chef du Parti conservateur Jason Kenney remporte les élections en Alberta l'an prochain», a aussi analysé le député libéral, qui s'exprimait sous le couvert de l'anonymat afin de pouvoir parler en toute franchise des enjeux auxquels fait face le gouvernement libéral à Ottawa.

Si les libéraux de Justin Trudeau ont les yeux fixés sur les campagnes électorales qui s'amorcent dans les deux principales provinces du pays, ils comptent d'ores et déjà les mois qui les séparent du jugement que rendront les électeurs sur leur bilan. Le prochain scrutin fédéral doit avoir lieu dans environ 18 mois, soit en octobre 2019.

Il appert que le premier ministre Justin Trudeau jongle avec l'idée de remanier une dernière fois son cabinet avant les prochaines élections fédérales. Le but est d'assembler l'équipe ministérielle qui l'épaulera jusqu'au jour J et de remplacer les ministres qui ne comptent pas briguer un autre mandat.

Selon nos informations, les hauts fonctionnaires préparent en ce moment des cahiers de breffage sur les grands dossiers qui touchent leur ministère respectif en prévision d'un tel remaniement. Les mandarins ont reçu l'ordre de remettre le fruit de leur travail au Bureau du Conseil privé - le ministère du premier ministre - au plus tard le jeudi 31 mai.

Le remaniement envisagé n'aurait pas lieu avant le mois d'août, indique-t-on en coulisses. «Au sein du caucus, tout le monde tient pour acquis que le prochain remaniement aura lieu en août. On se prépare en conséquence», a indiqué à La Presse une source libérale. Autre indice qui rend la date du mois d'août des plus plausible, le premier ministre a prolongé au début de l'année le mandat de l'ensemble des secrétaires parlementaires - les députés qui épaulent les ministres dans leurs fonctions à la Chambre des communes - jusqu'au mois d'août.

Se lancer dans un jeu de chaises musicales plus tôt pourrait s'avérer hasardeux, d'autant que juin sera un mois fort chargé pour Justin Trudeau. Le Canada étant l'hôte du sommet du G7 cette année, M. Trudeau doit accueillir ses homologues des États-Unis, de la France, du Royaume-Uni, de l'Allemagne, de l'Italie et du Japon les 8 et 9 juin au Manoir Richelieu, à La Malbaie, dans la région de Charlevoix.

En outre, les travaux de la Chambre des communes doivent prendre fin au plus tard le 22 juin. Et le gouvernement doit souvent mettre les bouchées doubles pour faire adopter ses projets de loi prioritaires durant cette période marquée par une animosité grandissante entre les banquettes ministérielles et celles de l'opposition. Suivent les festivités entourant la fête nationale du Québec, le 24 juin, et la fête du Canada, le 1er juillet, avant la pause de l'été.

«C'est la dernière fenêtre pour faire le gros remaniement qui n'a pas encore été fait depuis notre arrivée au pouvoir. Il y a eu de petits remaniements qui ont eu de gros impacts, comme celui de janvier 2017, qui a vu Chrystia Freeland prendre la relève de Stéphane Dion aux Affaires étrangères. Mais ça a touché un petit nombre de ministres. Quand tu brasses les cartes, après bientôt trois ans au pouvoir, ça donne une nouvelle énergie à l'équipe», affirme une autre source libérale.

Qui pourrait être promu? Qui pourrait être évincé du cabinet? «Il n'y a que trois personnes qui connaissent ces réponses : Justin Trudeau, sa chef de cabinet Katie Telford et son proche conseiller Gerry Butts», affirme cette source.

Cela dit, la machine à rumeurs s'est tout de même activée au cours des dernières semaines au sujet de l'avenir de certains ministres, notamment le ministre de l'Agriculture Lawrence MacAuley, qui aura 72 ans en septembre, et le ministre de la Sécurité publique Ralph Goodale, qui célébrera son 69e anniversaire en octobre. Ils seraient tentés de tirer leur révérence après une longue carrière politique sur la scène fédérale.

Si les négociations visant à moderniser l'Accord de libre-échange nord-américain sont couronnées de succès au cours des prochaines semaines, comme certains le laissent entendre, il s'agirait d'un important triomphe pour la ministre des Affaires étrangères Chrystia Freeland, responsable du dossier des relations commerciales entre le Canada et les États-Unis. Au sein de la députation libérale, Mme Freeland a l'une des cotes les plus élevées du cabinet.

Justin Trudeau pourrait-il être tenté de lui accorder une autre promotion en lui confiant par exemple le ministère des Finances, poste actuellement détenu par Bill Morneau? Si tel était le cas, le premier ministre écrirait une autre page d'histoire après avoir nommé pour la première fois une femme au poste de Commissaire de la Gendarmerie royale du Canada et une première femme à la tête du réseau Radio-Canada/CBC. Car jamais, dans le passé, une femme n'a eu le mandat de diriger le très convoité ministère des Finances à Ottawa.