Le ministre fédéral des Finances, Bill Morneau, a été inondé de plus de 10 000 messages, l'automne dernier, sur son projet de réforme fiscale qui avait soulevé la colère des petits entrepreneurs.

Selon une note interne préparée pour son sous-ministre, obtenue par La Presse canadienne, ce flot de messages adressés directement au ministre Morneau vient s'ajouter au déluge de plus de 21 000 courriels transmis au ministère dans le cadre d'une consultation publique sur le même sujet. Et la note du 15 novembre indiquait que le ministère n'avait pas encore fini de colliger tous les messages, un mois après la fin du processus de consultations.

La réforme fiscale pour les entreprises proposée par le ministre Morneau avait soulevé la controverse dès sa publication l'été dernier. Les opposants ont passé les mois suivants à soutenir que cette réforme écorcherait la classe moyenne, une catégorie de Canadiens que les libéraux de Justin Trudeau voulaient précisément aider. Le ministre répétait que sa réforme visait avant tout à empêcher de riches entrepreneurs de profiter d'échappatoires fiscales inaccessibles aux Canadiens moyens.

Le ministre a finalement cédé devant la grogne en annonçant certaines modifications à son projet à l'issue de la période de consultations de 75 jours, le 2 octobre. Il précisait alors que seuls les trois pour cent des entrepreneurs canadiens les plus riches paieraient plus d'impôt. Le ministre Morneau a aussi respecté une promesse électorale de 2015 et commencé à abaisser le taux marginal d'imposition des PME.

La note interne au sous-ministre résume les critiques les plus souvent adressées à la réforme: période de consultations trop courte, impacts rétroactifs sur les régimes de retraite, effets néfastes sur les petites et moyennes entreprises (PME). Des agriculteurs soulignaient qu'ils étaient trop occupés au champ pour examiner attentivement les propositions de réforme. On a aussi soutenu que les PME devraient pouvoir profiter du fractionnement des revenus, parce que le conjoint joue parfois un rôle déterminant dans les activités de l'entreprise.

Ce flot de critiques n'étonne guère le président de la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, Dan Kelly, qui soutient que la grogne persiste. Selon lui, les restrictions proposées à l'usage du revenu de placement passif des entreprises comme instrument d'épargne personnelle pour la retraite nuiront à certains propriétaires de PME. Les détails de ces changements seront annoncés dans le budget de ce printemps.

M. Kelly s'interroge aussi sur les changements proposés au fractionnement du revenu entre les membres de la famille. Le ministre voulait éviter que des médecins, avocats, commerçants et autres Canadiens se constituent en société dans le seul but de payer moins d'impôts, en fractionnant leur revenu entre les membres de leur famille même si ceux-ci ne travaillent pas pour eux.