Justin Trudeau soutient que les responsables de la sécurité n'ont rien trouvé à redire lorsque son cabinet a voulu organiser le mois dernier une rencontre avec l'ex-otage canadien Joshua Boyle et sa famille, dans son bureau d'Ottawa.

Le premier ministre précise que son personnel suit scrupuleusement les consignes des services de sécurité, et c'est exactement ce qui est arrivé dans ce cas-ci.

M. Trudeau a rencontré Joshua Boyle, sa femme américaine et leurs trois enfants dans son bureau de la colline du Parlement à Ottawa le 18 décembre. Douze jours plus tard, la police d'Ottawa déposait 15 chefs d'accusation contre M. Boyle, dont huit pour voies de fait, deux pour agression sexuelle, deux pour séquestration et un pour avoir poussé une personne à consommer un produit néfaste - un antidépresseur.

Une ordonnance de non-publication empêche de divulguer tout détail qui pourrait permettre d'identifier les victimes et même les témoins dans cette affaire. Les gestes reprochés à M. Boyle, âgé de 34 ans, auraient été commis entre le 14 octobre et le 30 décembre 2017; les Boyle étaient rentrés au Canada le 13 octobre, après avoir été détenus pendant cinq ans en Afghanistan par un groupe lié aux talibans. Les faits allégués dans les chefs d'accusation n'ont pas été prouvés en cour.

À la lumière des accusations portées contre M. Boyle, certains se sont demandé s'il était approprié pour le premier ministre de recevoir dans son bureau très fermé un homme qui est aujourd'hui accusé de crimes graves.

Selon le cabinet du premier ministre, c'est M. Boyle qui avait demandé de rencontrer M. Trudeau. On ignore si M. Boyle faisait déjà l'objet d'une enquête de la police, et M. Trudeau n'a pas abordé cette question, mardi, en commentant pour la première fois publiquement la rencontre du 18 décembre. Le premier ministre a simplement indiqué à une station de radio de Halifax que son personnel avait suivi les consignes des professionnels de la sécurité et des services du renseignement.

Une histoire assez improbable

Mais au-delà des accusations criminelles, certains se sont aussi interrogés sur le jugement de M. Trudeau dans cette affaire, car l'histoire de M. Boyle semble parfois assez improbable. Le premier ministre rétorque qu'il rencontre souvent des Canadiens qui, comme les Boyle, ont vécu des mésaventures à l'étranger. «J'essaie de voir plus de gens que moins, en particulier ceux pour qui nous avons travaillé très fort au cours des dernières années», a-t-il expliqué mardi. «J'estime qu'il est important de le faire.»

M. Boyle soutient que lui et sa femme, Caitlan Coleman, qui était alors enceinte, effectuaient un voyage d'aventure en Afghanistan lorsqu'ils ont été enlevés en octobre 2012 par des membres du réseau Haqqani, lié aux talibans. Le couple a été retenu captif pendant cinq années, au cours desquelles Mme Coleman a donné naissance à trois enfants; les Boyle ont finalement été libérés par un commando pakistanais.

Joshua Boyle avait auparavant été marié à Zaynab Khadr, dont le père était lié à Oussama ben Laden et dont le frère, Omar Khadr, a passé 10 ans à la prison de Guantanamo Bay pour avoir tué un soldat américain pendant un affrontement en Afghanistan, alors que le jeune Canadien avait 15 ans.

Photo Mark Blinch, archives Reuters

Joshua Boyle.