Après une semaine de répit, le ministre Bill Morneau a dû faire face lundi à un tir de barrage de l'opposition sur son rôle dans l'élaboration d'un projet de loi qui placerait le ministre des Finances dans une situation de conflit d'intérêts.

La commissaire à l'éthique, Mary Dawson, a ouvert une enquête sur le rôle joué par M. Morneau avant le dépôt du projet de loi C-27 sur la réforme des régimes de retraite. Certains soutiennent que cette réforme bénéficierait à l'ancienne firme de M. Morneau. Le ministre a finalement promis le mois dernier de vendre sa participation de 21 millions $ dans la firme Morneau Shepell, qu'il avait fondée avec son père. Il a aussi promis de placer le reste de ses nombreux actifs dans une fiducie sans droit de regard.

Lundi, après une semaine passée dans leur circonscription, les députés de l'opposition ont remis les gants lors de la période de questions, interrogeant pour la première fois le ministre Morneau depuis que Mme Dawson a annoncé l'ouverture d'une enquête.

La leader des conservateurs en Chambre, Candice Bergen, a rappelé que cette enquête vient s'ajouter à une série d'autres visant le gouvernement libéral - notamment les vacances des Fêtes de Justin Trudeau et de sa famille chez l'Aga Khan.

Le député néo-démocrate Nathan Cullen a de son côté soutenu que le projet de loi C-27 constitue non seulement une atteinte aux régimes de retraite des travailleurs, mais aussi un conflit d'intérêts «majeur» pour le ministre Morneau. Il accuse le premier ministre d'être prêt à tout pour défendre son ministre, mais de ne rien faire pour défendre les retraités canadiens.

Le premier ministre Trudeau a répondu en accusant l'opposition de vouloir miner l'intégrité de la commissaire aux conflits d'intérêts et à l'éthique, et de «lancer de la boue» de façon démagogique.

M. Morneau, lui, a promis lundi qu'il collaborera avec la commissaire Dawson jusqu'à ce que l'enquête soit complétée. «Maintenant que j'ai vendu toutes mes actions dans Morneau Shepell, et que j'ai remis une somme importante à des organismes de charité, j'ai hâte de poursuivre mon travail au nom des Canadiens.»

Le Conseil consultatif des pensions à Postes Canada révélait récemment que dans une lettre datée du 18 septembre dernier, il avait alerté Mme Dawson d'une possible situation de conflit d'intérêts. Or, la commissaire n'a annoncé l'ouverture d'une enquête qu'au début de novembre, lorsque les médias ont commencé à parler de la lettre.

Une situation qui «frustre» Peter Whitaker, membre élu au Conseil consultatif des pensions, qui relève directement du Comité des pensions du conseil d'administration de la Société canadienne des postes. M. Whitaker, qui s'oppose au projet de loi C-27, qualifie de «trop peu trop tard» la décision du ministre Morneau de vendre ses actions. Il soutient que le projet de loi est maintenant contaminé par ces allégations.

Le projet de loi C-27 modifierait la Loi de 1985 sur les normes de prestation de pension, afin de permettre aux entreprises de juridiction fédérale et aux sociétés de la Couronne de remplacer le régime à prestation déterminée par un «régime à prestation cible», jugé plus souple. Le projet de loi a été déposé par le ministre Morneau en octobre 2016, mais il croupit depuis au feuilleton.