Le gouvernement canadien a servi en entrée un «plan d'action national» axé sur le rôle des femmes dans les opérations de maintien de la paix en attendant de proposer sa pièce de résistance - le plan de déploiement de Casques bleus.

Guidés par l'«ordre du jour féministe» dont Justin Trudeau a abondamment fait la promotion, les libéraux s'engagent notamment, dans ce plan d'action quinquennal 2017-2022, à accroître le nombre de femmes déployées dans des missions multilatérales d'appui à la paix.

Il s'agit de l'un des objectifs contenus dans le document d'une vingtaine de pages dont la ministre des Affaires étrangères, Chrystia Freeland, a présenté les grandes lignes lors d'un événement à Ottawa, mercredi.

«Adopter une approche féministe aux efforts pour la paix et de sécurité n'est pas de la rectitude politique ou de l'étalage de vertu («virtue-signalling»)», a-t-elle plaidé dans son discours devant des collègues députés et une poignée d'ambassadeurs.

Au contraire: la philosophie canadienne, qui découle de grands principes articulés aux Nations unies, s'appuie sur le fait que la participation des femmes à l'avancement de la paix a largement fait ses preuves, a soutenu la diplomate en chef du Canada.

Le document gouvernemental cite en outre une étude copilotée par ONU Femmes ayant conclu que «la participation des femmes à la résolution des conflits (...) renforce la durabilité des accords de paix»Â.

«De fait, lorsque les femmes participent pleinement aux processus de paix, les accords sont plus susceptibles de durer au moins deux ans dans une proportion de 20 pour cent, et 15 ans dans une proportion de 35 pour cent», ont déterminé les auteurs de cette même étude.

C'est pourquoi le gouvernement libéral s'engage aujourd'hui à «faire de la participation des femmes la priorité dans toutes les activités que mène le Canada dans les États fragiles», a déclaré la ministre Freeland.

Mais pour grossir les rangs des Casques bleus, le calcul est assez simple, a souligné son collègue à la Défense, Harjit Sajjan: les femmes doivent s'engager en plus grand nombre au sein des Forces armées canadiennes.

Le chef d'état-major de la Défense, Jon Vance, souhaiterait atteindre chez les Casques bleus canadiens la cible de 15 pour cent évoquée en septembre 2016 à l'issue d'un sommet à Londres, par les ministres de la Défense de plusieurs pays, dont le Canada.

«C'est un bon objectif», a dit le général en mêlée de presse à l'issue de l'annonce gouvernementale.

Le plan d'action, assorti d'une enveloppe de 17,1 millions, a été accueilli favorablement par la porte-parole néo-démocrate en matière d'affaires étrangères, Hélène Laverdière, qui a néanmoins regretté qu'il ne soit pas accompagné de sommes plus importantes.

«Une politique étrangère véritablement féministe va au-delà des mots. Il faut que de l'argent vienne la soutenir. Le sévère manque de fonds est l'un des principaux défis dans la mise en place du Programme, tant à l'échelle nationale que mondiale», a-t-elle déclaré.

Son vis-à-vis conservateur, Pierre Paul-Hus, a réagi dans un bref communiqué en signalant que son parti soutient «les initiatives qui visent l'avancement des droits des femmes et des filles» et «les efforts pour favoriser l'accès (des) femmes aux forces armées».

Missions de paix

Le gouvernement a dévoilé ce plan d'action féministe alors qu'un autre plan, celui du déploiement de Casques bleus dans des missions multilatérales onusiennes, tarde à se matérialiser.

L'engagement des libéraux d'injecter 450 millions sur trois ans et de déployer jusqu'à 600 soldats et 150 policiers dans des missions de paix remonte à août 2016.

Selon ce que l'on chuchote dans les officines du gouvernement ces jours-ci, l'annonce du plan de déploiement serait imminente.

La machine à rumeurs s'emballe tout particulièrement compte tenu du fait que le ministre Sajjan accueillera à Vancouver les 14 et 15 novembre une multitude d'homologues pour un sommet sur le maintien de la paix des Nations unies.

La lenteur du gouvernement Trudeau à bouger dans ce dossier a fait l'objet de critiques.

Certaines de ces récriminations ont été communiquées directement à Harjit Sajjan lorsqu'il s'est présenté à la chambre haute pour répondre aux questions des sénateurs, mardi.

«Ce serait embarrassant pour le Canada d'être l'hôte de la réunion des ministres de la Défense sur le maintien de la paix des Nations unies sans avoir de contribution concrète pour les missions de paix», a tranché la sénatrice Mobina Jaffer.

Le gouvernement a possiblement fourni quelques indices sur ses intentions, mercredi, dans son plan sur les femmes.

Car en parcourant la liste des pays où des initiatives seront financées, on constate la présence du Mali, de la Colombie et d'Haïti - tous des pays qui ont figuré, à un moment ou à un autre, sur la liste putative des destinations pour les Canadiens.

Le ministre de la Défense a cependant refusé de dire s'il fallait en déduire que le gouvernement avait arrêté son choix sur ces pays, malgré l'insistance des journalistes.