Le gouvernement Trudeau soutient que Boeing n'empochera aucun sou s'il décide d'acheter des avions de chasse usagés de l'Australie et fabriqués par cette multinationale américaine afin de combler le déficit de capacité qui guetterait les Forces armées canadiennes.

Le ministère de la Défense et le ministère des Services publics et de l'Approvisionnement du Canada (SPAC) ont tenu à préciser hier que les avions de chasse que convoitait le gouvernement canadien n'étaient pas les Super Hornet acquis par l'Australie en 2007, mais des chasseurs F/A18 Hornets qui ont été fabriqués au début des années 90.

Ces avions sont donc presque aussi vieux que les CF18 des Forces armées canadiennes, mais compteraient moins d'heures de vol, ce qui permettrait de les utiliser pendant encore quelques années, a-t-on fait valoir au SPAC.

«Boeing ne va pas toucher un sou si on va de l'avant avec l'achat des avions de chasse de l'Australie», a insisté hier une source gouvernementale, qui souhaitait s'exprimer sous le couvert de l'anonymat afin de pouvoir parler plus librement de ce dossier.

Ce faisant, le gouvernement Trudeau respecterait le souhait exprimé par le premier ministre du Québec, Philippe Couillard, il y a deux semaines après que le département du Commerce des États-Unis eut décidé d'imposer des droits compensateurs de 220% sur la vente de 75 avions de la C Series de Bombardier à Delta, après une plainte déposée par Boeing.

«Je demande au gouvernement fédéral et au premier ministre Trudeau de maintenir la ligne dure, très dure : pas un boulon, pas une pièce, bien sûr pas un avion venant de Boeing au Canada, tant que ce conflit n'est pas réglé de façon juste», avait alors affirmé M. Couillard.

Le ministère des Services publics et de l'Approvisionnement du Canada (SPAC) a profité du long week-end de l'Action de grâce pour confirmer que «le Canada [avait] entamé des discussions avec le gouvernement de l'Australie sur la possibilité d'acquérir les chasseurs F/A-18 et les pièces de rechange connexes [...]. Le Canada s'attend à obtenir une réponse d'ici la fin de l'année en cours. Cette réponse indiquera plus en détail la disponibilité et le coût du chasseur et des pièces de rechange connexes que le Canada envisage d'acheter».

«L'erreur des sous-marins britanniques»



Que le gouvernement Trudeau envisage d'acheter des avions usagés de l'Australie a fait bondir le Bloc québécois hier. «On s'apprête à répéter l'erreur des sous-marins britanniques acquis dans les années 90 en achetant de vieux rafiots», s'est exclamé le député bloquiste Michel Boudrias, ancien officier d'infanterie au sein du Royal 22e Régiment.

M. Boudrias a ainsi fait allusion à la décision du gouvernement libéral de Jean Chrétien d'acheter quatre sous-marins usagés de la Grande-Bretagne en 1998 au coût de 750 millions de dollars qui ont nécessité des travaux de réparations de 2,6 milliards de dollars pour être mis à jour pendant une dizaine d'années.

Le gouvernement Trudeau avait annoncé en novembre dernier son intention d'acheter 18 avions de chasse Super Hornet flambant neufs de Boeing, évalués à 6,4 milliards de dollars, afin de combler le déficit de capacité, mais il a décidé de se tourner vers l'Australie après que Boeing eut déposé une plainte contre Bombardier auprès du département du Commerce américain. Dans cette plainte, Boeing soutient que Bombardier a profité de subventions illégales du gouvernement du Québec et du gouvernement fédéral pour vendre des avions C Series à un prix dérisoire sur le marché américain.

La semaine dernière, le Département du commerce a asséné une nouvelle gifle commerciale à Bombardier en ajoutant des droits antidumping de presque 80% aux droits compensateurs de 220% imposés une dizaine de jours auparavant.