Le député Peter Julian briguera la direction du Nouveau Parti démocratique (NPD) en faisant ce que le chef sortant, Thomas Mulcair, n'a jamais fait pendant la dernière campagne électorale: en s'opposant clairement au projet d'oléoduc Énergie Est.

Le Britanno-Colombien lançait lundi soir à Sherbrooke sa campagne au Québec en compagnie de quatre membres de la députation québécoise qui se sont ralliés à sa candidature: Pierre-Luc Dusseault, Robert Aubin, Brigitte Sansoucy et François Choquette.

Quelques heures avant de faire cette annonce, le député d'expérience parfaitement bilingue confirmait en entrevue téléphonique avec La Presse canadienne qu'il ferait campagne contre le projet énergétique de TransCanada.

«Si je suis élu chef du parti, le parti va s'opposer à Énergie Est», a-t-il dit concernant le projet dont l'étude par l'Office national de l'énergie reprendra depuis le début en raison des allégations de partialité ayant miné la crédibilité de l'ancien panel de commissaires.

«C'est la vision des choses que je présente comme chef potentiel, comme candidat à la chefferie, et c'est une idée audacieuse qui est bien sûr différente de ce qui avait été présenté à la dernière campagne électorale. Mais je suis une personne différente», a expliqué M. Julian.

Car il «est impensable qu'on dise oui à Énergie Est», un projet qui exporterait des emplois au lieu d'en créer au pays, dont les risques de déversement mettraient en danger les cours d'eau et qui contribuerait par ailleurs à une croissance des émissions de gaz à effet de serre, a-t-il plaidé.

Le député a fait la même analyse d'un autre projet controversé d'oléoduc - Kinder Morgan, qui a obtenu le feu vert du gouvernement libéral en novembre dernier - il y a une semaine, lors du lancement officiel de sa campagne dans sa circonscription de New Westminster-Burnaby.

Toujours seul en piste dans cette course, Peter Julian se pose donc visiblement en champion des questions environnementales. Et cette prise de position claire sur les deux projets de pipelines forcera sans doute ses éventuels rivaux à se commettre à leur tour.

La tradition environnementaliste du NPD a été confrontée à la réalité de la gouvernance avec l'arrivée au pouvoir, en Alberta, d'un gouvernement néo-démocrate qui a dû, et qui doit toujours, juguler la crise énergétique qui a frappé de plein fouet la province de l'Ouest.

En avril dernier, l'enjeu de l'exploitation pétrolière avait déchiré les militants du parti réunis en congrès à Edmonton avec le débat autour du manifeste «Un grand bond vers l'avant», un texte prônant un délaissement des énergies fossiles et un moratoire sur la construction de pipelines.

Le député Julian se dit ainsi bien conscient que son point de vue sur Énergie Est et Kinder Morgan «ne sera pas reçu à l'unanimité», mais il est d'avis qu'une «discussion de fond» est «nécessaire», tant au sein de la formation politique qu'entre ceux qui convoitent sa direction.

Pour l'heure, la discussion est un monologue. Car à moins d'un mois de la première joute oratoire entre candidats putatifs, prévue le 12 mars, les aspirants à la succession de Thomas Mulcair tardent à manifester leur désir de sauter dans l'arène.

Mais cela ne saurait tarder, selon Peter Julian.

«Il va y avoir d'autres candidats qui vont se présenter, et je n'ai aucun doute qu'on aura des débats intéressants le mois prochain», ce qui est selon lui essentiel afin que les Canadiens sachent ce que le prochain capitaine du navire leur proposera comme plateforme pour l'élection de 2019.

Les députés Guy Caron et Charlie Angus ont tous deux dernièrement abandonné leur rôle de porte-parole en Chambre, et leur entrée en scène fait peu de doutes. À ces noms s'ajoutent ceux de leur collègue Niki Ashton et du chef adjoint du NPD de l'Ontario, Jagmeet Singh.

Tous s'expriment dans les deux langues officielles, bien que le français de M. Angus soit un peu plus hésitant que celui de ses collègues. Tous sont assez bien connus sur la colline du Parlement ou, dans le cas de M. Singh, à Queen's Park, mais assez peu du grand public.

C'est aussi le cas de Peter Julian, en particulier au Québec. «Ça va prendre des efforts et du travail, mais je vais aller partout au Québec pendant cette course», a promis l'élu qui a vécu au total «plus d'une décennie» dans la province - à Chicoutimi, à Montréal, en Estrie et en Outaouais.

Il considère néanmoins qu'il n'est pas le seul dans cette situation. «Tous les candidats devront faire en sorte d'être mieux connus par l'ensemble de la population», a insisté le Britanno-Colombien.

Le successeur de Thomas Mulcair à la barre du NPD, qui sera élu par vote préférentiel, sera connu au plus tard le 29 octobre 2017.