Le Canada et la Russie ont échangé des pointes au siège des Nations unies, jeudi, alors que le ministre des Affaires étrangères Stéphane Dion a réclamé de mettre fin au bain de sang qui perdure en Syrie.

L'échange s'est déroulé lors d'une séance spéciale de l'Assemblée générale de l'ONU convoquée par le Canada et appuyée par plus de 70 pays. Le gouvernement canadien espérait ainsi accroître la pression sur la Russie et le président syrien Bachar al-Assad pour mettre un terme à la guerre civile.

M. Dion a reproché au Conseil de sécurité d'avoir échoué à mettre fin au conflit, avant de se tourner vers la Russie et le président al-Assad. La Russie et le président syrien ont la responsabilité de protéger les civils, a-t-il signalé, avant de les qualifier de «belligérants» au conflit.

Le ministre canadien a réclamé un arrêt immédiat des frappes aériennes à Alep, où les troupes russes et syriennes ont mené une offensive aérienne sans précédent dans les dernières semaines.

Il a rejeté la possibilité de simplement «interrompre» les tirs comme l'a décidé la Russie plus tôt cette semaine.

Cette «pause humanitaire» annoncée unilatéralement sans préavis et sans paramètres clairs ne permettra pas d'acheminer l'aide nécessaire, a déploré le ministre Dion.

«Il est grand temps que la communauté internationale surmonte ses divisions, s'unisse et agisse de concert, de toute urgence, pour apporter des pistes de solution à la crise syrienne, obtenir la fin des hostilités et, surtout, assurer l'accès humanitaire», a-t-il déclaré en conclusion de son discours.

À Alep, environ 250 000 personnes sont prises dans les quartiers assiégés par les rebelles, que les convois humanitaires n'ont pas pu rejoindre depuis le mois de juillet. Les réserves de nourriture et d'eau se vident dangereusement, selon l'ONU, et environ la moitié des personnes piégées dans ces zones sont des enfants.

Mais l'ambassadeur de la Russie à l'ONU, Vitali Tchourkine, n'a pas bronché. Il a plutôt répété que les forces russes et syriennes tentaient de reprendre le dessus sur les terroristes, dont certains ont été entraînés et équipés par les États-Unis.

M. Tchourkine a souligné que son homologue canadien n'avait pas mentionné Daech (le groupe armé État islamique) ou d'autres groupes terroristes dans ses remarques, et il a semblé remettre en doute l'intention du Canada à s'attaquer à ces factions.

L'ambassadeur de la Syrie, Bashar Jaafari, a également critiqué le Canada, l'accusant de violer la souveraineté syrienne en déployant des troupes militaires sur son territoire sans sa permission.

Les avions de chasse du Canada ont mené plusieurs missions contre Daech en Syrie entre mars 2015 et février 2016. Bien que ces avions aient été retirés, le Canada a toujours deux avions de surveillance et un avion de ravitaillement air-air déployés dans l'espace aérien de la Syrie et de l'Irak.

Stéphane Dion était loin d'être le seul à se plaindre du Conseil de sécurité et à critiquer la Russie et le gouvernement syrien. Les diplomates de partout dans le monde ont fait écho aux inquiétudes du Canada.

En entrevue avant la session, M. Dion a dit que le Canada et les autres pays voulaient exprimer «leur frustration» face à la situation actuelle.

«Je crois que cela accroîtra la pression pour passer à l'action. Parce que vous aurez plusieurs pays qui diront la même chose, accentuant l'idée que l'inaction est inacceptable», a-t-il expliqué.

Les diplomates ont surtout déploré la décision de la Russie qui, le 8 octobre, a opposé son veto à une résolution du Conseil de sécurité qui visait à mettre fin aux combats à Alep.