L'agence d'espionnage électronique du Canada refuse de préciser à quelle fréquence elle partage de l'information pouvant mener à la torture d'un individu dans une prison étrangère.

Le Centre de la sécurité des télécommunications Canada (CSTC) - qui analyse les menaces de terroristes et espions étrangers - a censuré des documents présentant ces données, même si la Gendarmerie royale du Canada (GRC) et le Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS) ont déjà révélé ces chiffres dans le passé.

Cette réticence a poussé Amnistie internationale Canada à affirmer que le CSTC devait faire preuve d'une « plus grande transparence ».

Le CSTC a été placé sous les projecteurs ces dernières années en raison des informations coulées par Edward Snowden, l'ancien sous-traitant de l'agence de sécurité nationale américaine (NSA), l'équivalent du CSTC au sud de la frontière.

Le Centre fait également partie d'une poignée d'agences canadiennes - incluant la GRC, le SCRS, l'Agence des services frontaliers du Canada et la Défense nationale - qui ont le droit de partager des informations avec des partenaires étrangers, même si cela signifie qu'une personne pourrait être torturée par la suite.

Le ministre de la Sécurité publique, Ralph Goodale, a indiqué plus tôt cette année que les libéraux se pencheraient sur les problèmes liés à cette politique de partage d'information, mise en place par le gouvernement conservateur précédent.

Un document de quatre pages publié en 2010 souligne que lorsqu'il existe un « risque considérable » que l'envoi d'information - ou la demande d'information - à une agence étrangère mène à la torture, le dossier devrait être renvoyé au sous-ministre ou au dirigeant d'agence responsable.

En décidant quelles mesures prendre, le dirigeant de l'agence analysera trois facteurs, incluant la menace à la sécurité nationale du Canada et la nature et l'imminence de cette menace ; la relation du Canada avec l'agence étrangère et le statut du pays en matière de respect des droits de la personne ; et la raison pour laquelle on croit que le partage d'information mènera à la torture.

Les documents obtenus par La Presse canadienne en vertu de la Loi d'accès à l'information offrent un aperçu de la façon dont le CSTC a traité de tels dossiers dans les trois premiers mois de 2015.

Le rapport trimestriel à la directrice du CSTC Greta Bossenmaier, classé « Très secret » et « réservé aux Canadiens », indique le nombre de cas ayant nécessité une « analyse du risque de mauvais traitement » et le degré de risque associé à la transmission d'informations. Ces détails ont cependant été supprimés de la version publique de ce document.

Le rapport précise qu'il n'y a eu « aucun cas connu » où un pays ayant reçu de l'information ne s'est pas conformé aux conditions associées à ce partage de données dans les trois premiers mois de 2015. Il ne contient toutefois à peu près aucun autre détail.

Le secrétaire général canadien d'Amnistie, Alex Neve, estime que lorsque le Canada partage des renseignements, il existe un véritable risque que des individus soient torturés.