L'incertitude économique mondiale vient de monter d'un cran avec la décision prise par les Britanniques de quitter l'Union européenne, a reconnu vendredi le premier ministre canadien Justin Trudeau, en tentant malgré tout de se faire rassurant quant à la suite des choses.

«L'économie canadienne est forte, diversifiée, résiliente», a soutenu le premier ministre lors d'une allocution prononcée à Québec, sous un soleil de plomb, tandis que la ville célébrait la Fête nationale des Québécois.

Malgré le résultat du référendum tenu jeudi, qui «va certainement augmenter l'incertitude économique mondiale», le Canada restera «un partenaire solide du Royaume-Uni et de l'Union européenne», a-t-il déclaré, alors qu'il procédait, entouré de nombreux dignitaires et devant une foule dense, à l'inauguration d'un nouveau pavillon du Musée national des beaux-arts du Québec.

Durant sa courte allocution, prononcée à deux pas des plaines d'Abraham, M. Trudeau a commenté le résultat du référendum britannique dans les deux langues officielles du Canada. Il a été copieusement hué quand il s'est adressé brièvement à la foule en anglais.

Par la suite, M. Trudeau a effectué une brève visite du pavillon, en compagnie du premier ministre du Québec, Philippe Couillard, avec qui il a pu s'entretenir quelques minutes en privé.

De son côté, en point de presse, le premier ministre Couillard a qualifié le résultat du référendum «d'événement géopolitique d'ampleur historique» dont on peut difficilement évaluer pour l'instant les retombées sur le plan économique, notamment sur le projet d'accord de libre-échange entre le Canada et l'Union européenne (UE). «Il faut laisser le temps passer» avant de savoir, selon lui.

M. Couillard a dit qu'il était «dommage» de constater que M. Trudeau s'était fait huer parce qu'il s'était exprimé en anglais. «Il faut rappeler à tout le monde qu'on doit être ouvert et tolérant», a-t-il commenté.

Contrairement à M. Couillard, M. Trudeau ne s'est pas adressé aux journalistes. Après sa visite des lieux, il a rapidement repris la route vers Montréal, pour célébrer la Fête nationale dans sa circonscription de Papineau.

Onde de choc sur les marchés

Le résultat du référendum au Royaume-Uni a eu un effet immédiat sur le monde financier: la livre britannique a chuté à son plus bas niveau en 30 ans et les marchés boursiers ont dégringolé partout dans le monde.

M. Trudeau a tenté d'apaiser l'inquiétude des marchés canadiens, en affirmant que le pays demeurait en bonne position pour faire face à l'incertitude mondiale créée par le «Brexit».

«Le système financier canadien demeure solide et stable», a-t-il fait valoir, indiquant qu'il s'était entretenu en matinée avec le gouverneur de la Banque du Canada.

«Nous sommes bien placés pour traverser l'incertitude du marché mondial, comme nous l'avons fait dans le passé», selon lui.

Le premier ministre Couillard, quant à lui, s'est demandé si le retrait des Britanniques de l'UE allait avoir un effet boule de neige. «Est-ce que ce sera un mouvement qui va s'étendre à d'autres pays? C'est trop tôt pour le dire», a-t-il estimé.

Le résultat du vote indique à ses yeux que les Britanniques ont choisi de «retrouver le contrôle de leurs institutions», mais il note qu'«une bonne part de la population veut faire partie de grands ensembles», particulièrement les jeunes, ce qui le rassure. Toute comparaison avec le mouvement souverainiste québécois serait malvenue, selon lui, car les «deux situations sont complètement différentes».

Le premier ministre britannique David Cameron, qui a mené la campagne pour le maintien de son pays dans l'UE, a annoncé qu'il quitterait ses fonctions en octobre. M. Trudeau a remercié son homologue britannique d'avoir été «un proche allié et ami» du Canada.

La chef intérimaire du Parti conservateur du Canada, Rona Ambrose, qui était aussi présente vendredi à Québec, a qualifié M. Cameron de «dirigeant courageux et réfléchi qui n'avait pas peur de se battre pour ce en quoi il croyait, tout en étant suffisamment fort pour accepter avec grâce la volonté démocratique des gens qu'il dirige».

Mme Ambrose a également appelé le gouvernement à ratifier rapidement l'accord de libre-échange entre le Canada et l'UE pour s'assurer que cette entente ne soit pas victime «d'une période d'incertitude en Europe».

La ministre du Commerce international, Chrystia Freeland, s'est entretenue plus tôt vendredi avec le commissaire européen au commerce concernant l'accord de libre-échange que les deux parties sont sur le point de finaliser. Dans un communiqué, la ministre a affirmé que le Canada était toujours engagé à favoriser l'expansion du commerce mondial.

Mme Freeland n'a pas précisé ce que le vote au Royaume-Uni signifierait pour l'avenir de cet accord ou pour les relations commerciales entre le Canada et le Royaume-Uni.

Le premier ministre Trudeau, le ministre des Affaires étrangères Stéphane Dion, le ministre des Finances Bill Morneau et l'ancien premier ministre conservateur Brian Mulroney s'étaient tous exprimés ouvertement en faveur du maintien du Royaume-Uni dans l'UE.