Peu visible depuis la défaite des conservateurs aux élections fédérales du 19 octobre 2015, Stephen Harper sortira de l'ombre demain soir afin de prononcer un discours à l'occasion du congrès de trois jours du Parti conservateur qui a lieu à Vancouver.

Ce discours - le tout premier que prononcera publiquement M. Harper en sept mois - ne sera pas un retour sur les événements qui ont mené aux résultats du dernier scrutin, mais plutôt une occasion pour l'ancien premier ministre de remercier de vive voix les militants conservateurs qui l'ont appuyé durant son règne de quelque 11 ans à la tête du Parti conservateur, né de la fusion de l'Alliance canadienne et du Parti progressiste-conservateur en 2004, a-t-on indiqué.

Durant tout son règne à la tête du Parti conservateur, M. Harper a joui d'un appui indéfectible des militants, d'autant plus qu'il a su imposer une discipline de fer à des troupes qui avaient eu tendance dans le passé à mettre davantage l'accent sur des questions qui soulevaient la méfiance au sein de la population, notamment les questions d'ordre moral comme l'avortement ou les mariages gais.

M. Harper avait réussi à garder unies les diverses factions du mouvement conservateur en leur rappelant que les divisions passées avaient eu un effet repoussoir au sein de l'électorat et que le pouvoir était à la portée de la main. Le défi pour le prochain chef sera de maintenir cette relative harmonie maintenant que les conservateurs ont été renvoyés sur les banquettes de l'opposition.

Trudeau critiqué

Selon plusieurs sources, M. Harper est loin d'être amer des résultats du dernier scrutin, faisant valoir à ceux qui ont eu l'occasion de discuter avec lui que cela fait partie d'un cycle normal d'un gouvernement qui a été au pouvoir pendant près de 10 ans. En privé, toutefois, il n'hésite pas à critiquer les décisions du gouvernement libéral de Justin Trudeau d'augmenter considérablement les dépenses de l'État et d'engendrer des déficits importants alors que l'économie canadienne continue de croître, même si cette croissance demeure modeste.

M. Harper n'a pas pris la parole à la Chambre des communes depuis qu'il a cédé le pouvoir aux libéraux de Justin Trudeau le 4 novembre. Certains de ses députés auraient souhaité qu'il participe au débat sur la fin de la participation des six avions de chasse CF-18 aux frappes aériennes menées par une coalition de pays contre des cibles du groupe armé État islamique en Irak et en Syrie. Mais il a préféré laisser toute la place à la chef intérimaire du Parti conservateur, Rona Ambrose, et aux autres députés conservateurs. M. Harper a tout de même participé à un certain nombre de votes qui ont eu lieu aux Communes, sans toutefois prendre part aux débats parlementaires.

Plusieurs députés conservateurs n'hésitent pas à le rencontrer dans son petit bureau de la colline parlementaire afin de solliciter ses conseils ou de discuter en profondeur de certains enjeux de l'actualité, comme les déficits prévus par le gouvernement Trudeau ou l'union des forces de la droite en Alberta pour éviter que le Nouveau Parti démocratique provincial remporte un autre mandat par défaut dans trois ans.

«Il est de bonne humeur et il n'est pas du tout amer. Mais il est en colère quand il voit les libéraux gaspiller l'argent des contribuables comme ils le font, surtout que c'est son gouvernement qui a réussi à rétablir l'équilibre budgétaire en s'imposant une discipline», a indiqué un député conservateur qui souhaite conserver l'anonymat.

Les membres courtisés

Le congrès du Parti conservateur sera aussi l'occasion pour ceux qui aspirent à prendre la tête du parti de courtiser les militants. Jusqu'ici, trois candidats ont confirmé leurs intentions de briguer la direction du parti: les députés Maxime Bernier, Michael Chong et Kellie Leitch.

Deux autres candidats potentiels pourraient tester leurs appuis durant le congrès: l'ancien ministre de la Défense, Jason Kenney, et l'homme d'affaires controversé Kevin O'Leary. Ce dernier doit d'ailleurs prendre la parole durant le congrès.