Le contrat de véhicules blindés légers entre le Canada et l'Arabie saoudite est «immoral», et il doit être résilié, écrivent des organisations de la société civile dans une lettre envoyée au premier ministre Justin Trudeau.

Il y a «une incompatibilité flagrante entre ce contrat et les garanties relatives aux droits humains contenues dans les mesures de contrôle de nos exportations», soutiennent-elles dans cette missive.

En conférence de presse au parlement à Ottawa, mercredi, les représentants de quatre des groupes signataires ont plaidé que le risque que ces engins soient utilisés par Riyad contre sa propre population ou contre des civils dans la guerre au Yémen sont bien réels.

Le gouvernement libéral doit déchirer l'entente puisque ce risque existe, ont-ils tour à tour insisté, critiquant du même coup les arguments mis de l'avant par le ministre des Affaires étrangères, Stéphane Dion, pour justifier la décision d'honorer le contrat d'une valeur de 15 milliards.

La présidente de l'Institut Rideau, Peggy Mason, a notamment fait valoir que le maintien de quelque 2000 emplois en Ontario ne justifie pas l'exportation de véhicules blindés légers qui pourraient être utilisés dans la commission de «crimes de guerre» dont le Canada deviendrait «complice».

«L'argument selon lequel des emplois canadiens doivent dépendre du meurtre, de la mutilation, de la violence et de la répression de civils innocents à l'étranger est pernicieux», a-t-elle regretté.

Au lieu de signer un contrat qui pourrait attiser le conflit au Yémen, Ottawa devrait viser à signer un embargo international sur l'exportation d'armes non seulement pour l'Arabie saoudite, mais pour toutes les parties impliquées, a suggéré Alex Neve, secrétaire général d'Amnistie internationale.

La controverse entourant la décision des libéraux d'honorer cette entente a refait surface depuis qu'il a été dévoilé que le ministre Dion avait discrètement approuvé, le 8 avril dernier, les licences d'exportation pour 11 des 15 milliards du contrat de véhicules blindés.

Le bureau du premier ministre Trudeau n'a pas voulu répliquer à la missive, transmettant les demandes au bureau du ministre Dion, qui «est le porte-parole du gouvernement sur cet enjeu», a-t-on indiqué.

La lucrative entente a été conclue sous le précédent gouvernement conservateur. Pendant la campagne électorale, les libéraux et les néo-démocrates avaient signalé qu'ils ne comptaient pas la renier pour éviter de nuire à la crédibilité de la signature du Canada.

Le professeur Daniel Turp et un groupe de ses étudiants ont déposé en Cour fédérale une demande de contrôle judiciaire pour tenter de bloquer le contrat, jugeant celui-ci contraire au droit international.