Romeo Saganash dépose un projet de loi pour s'assurer que les lois canadiennes respectent la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones.

Le député néo-démocrate entend ainsi tester « la sincérité » du gouvernement libéral sur ses engagements à l'égard des peuples autochtones.

La Déclaration a été adoptée sans enthousiasme en 2010 par le gouvernement conservateur de Stephen Harper, qui lui avait d'abord opposé une résistance pendant trois ans. M. Harper a fini par apposer la signature du Canada au bas du document, qu'il jugeait avant tout symbolique. M. Saganash veut pousser un cran plus loin et s'assurer que les lois canadiennes y soient conformes.

« Il est temps maintenant de procéder à la prochaine étape logique, qui est celle de s'assurer que la Déclaration puisse finalement être reflétée dans toutes les lois du pays qui touchent les peuples autochtones », a-t-il expliqué en point de presse à Ottawa, jeudi.

La Déclaration dresse une liste des droits individuels et collectifs des peuples autochtones et aborde de nombreuses questions comme les terres traditionnelles, l'autodétermination, l'identité, la langue et l'éducation. Ses 46 articles prônent notamment l'égalité et le respect. Le Canada avait été un des quatre États à avoir voté contre lors du vote à l'Assemblée générale de l'ONU en septembre 2007. Il s'est finalement ravisé trois ans plus tard.

Dans le projet de loi C-262 de M. Saganash, il est écrit que le Canada « doit prendre toutes les mesures nécessaires pour veiller à ce que les lois fédérales soient compatibles avec la Déclaration ».

Le député d'Abitibi-Baie-James-Nunavik-Eeyou a rappelé que la mise en oeuvre de la Déclaration de l'ONU - une recommandation du comité de vérité et de réconciliation - était inscrite dans les lettres de mandat de la ministre des Affaires autochtones, Carolyn Bennett. Il espère donc qu'il aura l'appui du gouvernement dans sa démarche. Il avait déjà déposé un projet de loi semblable auparavant et avait obtenu l'appui des libéraux, alors dans l'opposition.

« J'ai toujours dit, depuis que ce nouveau gouvernement (libéral) a été élu, que je n'allais pas douter de leur sincérité à établir une nouvelle relation avec les peuples autochtones. Mais en tant que député de l'opposition, j'ai la tâche de mettre à l'épreuve cette sincérité », a-t-il souligné.

Au bureau du premier ministre, on ne se prononce ni pour ni contre, indiquant qu'il faudra d'abord étudier le projet de loi.

« Nous avons hâte de participer au débat sur le projet de loi de M. Saganash et nous le remercions pour tout son travail acharné sur ce dossier. Le gouvernement s'est engagé à mettre en oeuvre la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones et à travailler en partenariat avec les Autochtones afin de bâtir une véritable relation de nation à nation », a affirmé par courriel l'attaché de presse de Justin Trudeau, Cameron Ahmad.

Le sujet tient particulièrement à coeur M. Saganash, parce qu'il a lui-même contribué à l'élaboration de la Déclaration. « Ça me permet de boucler la boucle, après avoir travaillé deux décennies là-dessus », s'est-il rappelé.

Les problèmes vécus dans les communautés des Premières Nations sont criants, comme l'a illustré récemment l'épidémie de suicides vécue à Attawapiskat.

Selon Ghislain Picard, chef de l'Assemblée des Premières Nations du Québec et du Labrador, la mise en oeuvre de la Déclaration constituerait une suite logique de l'engagement libéral d'établir un dialogue de nation à nation.

À ses yeux, la Déclaration lance à Ottawa le message que « maintenant, c'est le temps de changer les choses et d'entretenir une relation qui, vraiment, met plus en évidence la dignité des peuples autochtones ».

Le député libéral d'origine autochtone Robert-Falcon Ouellette a applaudi l'initiative et dit l'appuyer personnellement. « C'est une (question) de respect, c'est une (question) de s'assurer que toutes les lois du Canada respectent tous les citoyens », a-t-il illustré.

Comme il s'agit d'un projet de loi d'initiative parlementaire, il risque de s'écouler plusieurs mois avant qu'il soit soumis aux députés.