Le premier ministre Justin Trudeau multiplie les visites aux États-Unis. L'objectif est de préparer tranquillement le terrain pour l'après-Obama en tissant des alliances avec les décideurs américains, mais aussi avec le monde des affaires.

M. Trudeau effectue aujourd'hui une troisième visite chez nos voisins du Sud en moins d'un mois après avoir été reçu en grande pompe par le président Barack Obama à la Maison-Blanche le 10 mars et après s'être rendu au siège des Nations unies, le 16 mars, afin d'annoncer que le Canada tentera de décrocher un des sièges temporaires au Conseil de sécurité pour un mandat de deux ans à compter de 2021.

Officiellement, M. Trudeau se trouve dans la capitale américaine aujourd'hui afin de participer au sommet international sur la sûreté nucléaire organisé par le président américain. Le scénario d'une «bombe sale» qui pourrait tomber entre les mains de djihadistes du groupe État islamique (EI) alimentera les travaux de ce sommet.

M. Trudeau profitera tout de même de l'occasion pour prononcer un discours devant les membres de la puissante Chambre de commerce des États-Unis. Même s'il évitera comme la peste de s'immiscer dans les primaires américaines, M. Trudeau rappellera l'importance des relations canado-américaines.

Dans les rangs libéraux, on soutient que les nombreuses visites du premier ministre sur le sol américain - il sera de nouveau à New York le 22 avril afin de signer l'accord de Paris sur les changements climatiques - s'inscrivent dans une volonté de tisser rapidement des liens avec les décideurs de la scène politique et du monde des affaires.

Car les autorités canadiennes auront éventuellement besoin de ces nouveaux liens pour faire avancer les dossiers qu'elles jugent prioritaires une fois que Barack Obama aura terminé son mandat. 

«C'est une excellente stratégie»

Selon l'ancien ambassadeur du Canada aux États-Unis Raymond Chrétien, il est tout à fait avisé pour le premier ministre de tisser de tels liens avec les leaders politiques et les gens d'affaires afin de préparer l'après-Obama.

« C'est une excellente stratégie, après sa très belle visite à la Maison-Blanche. M. Trudeau fait d'une pierre deux coups. D'abord, il participe à un sommet international important sur la sécurité nucléaire. Ensuite, il profite de l'occasion pour s'adresser aux gens d'affaires. Il ne reste plus que huit ou neuf mois au président Obama », a affirmé à La Presse M. Chrétien, aujourd'hui associé et conseiller stratégique chez Fasken Martineau.

L'ancien diplomate aux États-Unis Colin Robertson a abondé dans le même sens. «Cela est tout à fait logique. Les gens d'affaires aux États-Unis sont conscients de l'importance de la relation commerciale entre les deux pays. Mais le protectionnisme est à la mode dans les deux partis. Normalement, on peut compter sur le Parti républicain pour défendre le libre-échange. Mais il y a eu un revirement important dans l'attitude des républicains qui appuient Donald Trump, qui évoque l'imposition de tarifs», a affirmé M. Robertson, vice-président de l'Institut canadien des affaires mondiales.

La Presse a rapporté hier que des regroupements de gens d'affaires du Canada s'inquiètent du discours résolument protectionniste qui domine les primaires américaines depuis plusieurs semaines. À la Chambre de commerce du Canada, on soutient que les propositions de certains candidats pourraient bien provoquer le chaos économique si elles étaient mises en oeuvre.