Justin Trudeau a opposé son veto à un règlement à l'amiable dans l'affaire des « bureaux satellites » du Nouveau Parti démocratique (NPD), a appris La Presse Canadienne.

Selon diverses sources, qui ne sont pas autorisées à discuter publiquement de l'affaire, un règlement était imminent dans ce litige mais le premier ministre l'a refusé, pour ne pas donner l'impression qu'il fermait les yeux sur ce que les libéraux qualifient d'« utilisation abusive de fonds publics ».

Le Bureau de régie interne des Communes concluait il y a deux ans que 68 députés et ex-députés néo-démocrates avaient abusivement utilisé 2,75 millions de dollars de leurs budgets de fonctionnement au Parlement pour verser des salaires à du personnel politique en poste dans des bureaux satellites du parti à Montréal, Québec et Toronto.

Le Bureau de régie interne a ainsi ordonné aux députés le remboursement de ces sommes au Parlement.

Les néo-démocrates, de leur côté, soutiennent qu'ils sont victimes d'une manoeuvre partisane des conservateurs et des libéraux qui siègent au sein du Bureau, et ils ont contesté la décision devant les tribunaux. L'affaire n'avait toujours pas été entendue sur le fond au moment du déclenchement des élections, l'été dernier.

Après le 19 octobre, les libéraux, maintenant majoritaires au Bureau de régie interne, semblaient disposés à conclure un règlement à l'amiable avec les néo-démocrates, qui ont perdu beaucoup de députés lors du scrutin. Selon nos sources, le règlement prévoyait que le parti prendrait à sa charge cette « dette », en réduisant ses budgets parlementaires annuels de recherche, plutôt que d'exiger le remboursement aux 68 individus, qui ont en majorité perdu leur revenu de député le 19 octobre. En vertu de la proposition de règlement, le NPD aurait finalement remboursé moins de la moitié des 2,75 millions de dollars réclamés par le Bureau.

Pas vraiment intéressés à régler

Le cabinet du premier ministre a refusé d'expliquer pourquoi M. Trudeau avait décidé de torpiller la proposition de règlement, renvoyant la question au leader du gouvernement en Chambre, Dominic LeBlanc - qui est aussi membre du Bureau de régie interne.

Dans un courriel, M. LeBlanc laisse entendre que le premier ministre n'a pas été mêlé à cette affaire, même si plusieurs sources ont soutenu que c'est M. Trudeau qui avait mis fin aux négociations. « Le Bureau de régie interne est le seul organisme habilité à se pencher sur les bureaux satellites du NPD et l'usage abusif des fonds publics », écrit M. LeBlanc.

Il soutient aussi que les libéraux n'ont jamais vraiment été intéressés à conclure un règlement à l'amiable. « Nous avons toujours été d'avis que le NPD avait utilisé abusivement des fonds publics et qu'il devait par conséquent rembourser les contribuables. »

La cause devrait maintenant cheminer en Cour fédérale, qui avait été saisie de la contestation il y a près de deux ans mais qui attendait le résultat des négociations à l'amiable. En mai dernier, le procureur du Bureau de régie interne, Guy Pratte, avait demandé à la cour de rejeter la requête, plaidant que le tribunal n'avait aucune juridiction sur les décisions de l'organisme du Parlement.

Par ailleurs, les néo-démocrates soutiennent que les sommes réclamées ont été surévaluées. Ainsi, le Bureau avait réclamé 169 117 $ à la députée montréalaise Isabelle Morin [défaite depuis] pour le salaire versé à un employé « extra-muros ». Cette réclamation a finalement été réduite à un peu moins de 30 000 $, car l'employé en question avait en fait travaillé surtout dans le bureau de circonscription de la députée et non aux bureaux montréalais du parti.