Finie la politique de la chaise vide dans les grandes institutions internationales. Retour au dialogue, au multilatéralisme et à la promotion de grandes valeurs universelles telles que les droits de la personne, la justice et la démocratie.

Le nouveau ministre canadien des Affaires étrangères, Stéphane Dion, a l'intention de marquer une rupture avec la diplomatie de la dernière décennie en renouant avec des institutions et des partenaires délaissés par le gouvernement Harper.

Et la première de ces institutions, ce sont les Nations unies.

«Ce n'est pas une institution parfaite, mais elle aide à mieux gérer le monde, c'est sûr qu'on n'ira pas dans un fast-food le jour d'une réunion importante à l'ONU!», a assuré M. Dion lors d'une entrevue téléphonique, hier. Il faisait allusion à Stephen Harper qui avait choisi d'assister à l'inauguration d'un restaurant Tim Hortons, en Ontario, au lieu de participer à une assemblée générale de l'ONU, à l'automne 2009 - incident qui lui avait attiré beaucoup de critiques.

Plusieurs rendez-vous

Au cours des semaines qui viennent, le nouveau ministre participera à une rafale de réunions internationales: celle du G20, en Turquie, un sommet de l'APEC (Coopération économique pour l'Asie-Pacifique), puis un sommet du Commonwealth et enfin la conférence de Paris sur le climat.

Pendant ces rencontres, il veut «envoyer le message que le Canada est de retour dans le monde». À Paris, en décembre, ce sera un virage à 180 degrés: «Nous jouerons un rôle complètement différent. Avant, nous étions un frein, nous n'étions invités nulle part, puisqu'on présumait que nous ne serions pas utiles. Aujourd'hui, on redevient un joueur à la table.»

Vingt-quatre heures après sa nomination, Stéphane Dion ne voulait pas trop s'avancer sur les détails des dossiers les plus urgents qui viennent d'atterrir sur son bureau. Oui, il va réexaminer certains traités internationaux que le gouvernement conservateur avait refusé de signer, notamment celui sur le commerce des armes à feu. «Il y aura des changements à ce sujet, mais c'est le premier ministre qui le confirmera.»

L'Iran et Israël

Oui, il va rétablir les relations diplomatiques avec l'Iran, coupées depuis trois ans. «Ne pas parler avec Téhéran n'est pas une façon d'aider les Iraniens ni leurs voisins, y compris Israël.» Ottawa va-t-il donc rouvrir son ambassade à Téhéran? Là encore, Stéphane Dion laisse au premier ministre Justin Trudeau le soin de faire une éventuelle annonce à ce sujet.

Le Canada sera-t-il plus critique face à Israël? «Nous voulons être un bon ami d'Israël, mais un ami utile et efficace, et pour ça, il faut parfois parler franchement.»

Le ton de la relation avec Israël changera, assure le nouveau ministre. «Nous serons moins idéologiques, plus pragmatiques.»

Sa grande priorité, en plus de la question des changements climatiques, c'est l'accueil promis de 25 000 réfugiés syriens d'ici la fin de l'année. Un comité interministériel est en train d'être mis sur pied pour s'occuper rapidement de ce dossier. Avec un sentiment d'urgence: «Chaque jour compte, et les Canadiens sont prêts à recevoir des familles.»

Raif Badawi

Une autre priorité, qu'il a déjà abordée avec les fonctionnaires de son ministère: le dossier de Raif Badawi, le blogueur saoudien condamné à 1000 coups de fouet. Là encore, le ministre s'est gardé d'entrer dans les détails. Mais il a dit avoir cherché ce qu'il pouvait faire de plus, qui n'a pas été fait par son prédécesseur, pour protéger les droits fondamentaux de M. Badawi. «Ça me préoccupe énormément», a-t-il confié.

En revanche, Stéphane Dion n'a aucune intention de revenir sur le projet de vente de véhicules blindés à l'Arabie saoudite - un contrat controversé de 15 milliards sur 10 ans. «Il ne serait pas dans l'intérêt du Canada de revoir rétroactivement une entente déjà signée», fait-il valoir.

Quant au projet d'oléoduc Keystone, l'un des principaux points de friction avec Washington, il n'entend pas le remettre en question, mais se dit prêt à donner toutes les informations aux États-Unis afin qu'ils puissent trancher le débat. «Il faut comprendre que c'est un débat américain, ce n'est pas à nous de décider sur leur territoire.»