Le gouverneur général du Canada, David Johnston, confirme que Stephen Harper a bel et bien signalé son intention de démissionner, tandis qu'une certaine confusion règne toujours à Ottawa sur cette question plus 10 jours après les élections du 19 octobre.

«Conformément à la pratique, le premier ministre a signifié son intention de démissionner au gouverneur général lorsqu'il lui a rendu visite à Rideau Hall suite aux élections», a déclaré par courriel à La Presse une porte-parole du gouverneur général. 

«Il démissionnera officiellement de cette fonction le 4 novembre 2015 juste avant la cérémonie de prestation de serment du nouveau Cabinet», a précisé cette porte-parole Marie-Ève Létourneau.

Dans un article publié dans le Ottawa Citizen mardi, le professeur de droit de l'Université d'Ottawa Adam Dodek a critiqué le manque de transparence du processus actuel. «Quand Stephen Harper démissionnera-t-il comme premier ministre? a-t-il écrit. Une semaine a passé depuis que Justin Trudeau a remporté les élections et les gens posent encore cette question.»

Le professeur Dodek a fait valoir qu'aucune déclaration n'a été faite en ce sens par le bureau du GG ou celui du premier ministre Harper, et qu'une plus grande quantité d'informations permettrait aux Canadiens de mieux connaître leur système politique et constitutionnel.

La journaliste Kady O'Malley a renchéri dans le même quotidien mercredi en écrivant: «Est-ce que Stephen Harper a démissionné? Personne ne le dit». Elle a précisé que lors de la dernière transition gouvernementale, en 2006, une meilleure communication avait été établie avec le public par le premier ministre sortant Paul Martin et par la gouverneure générale de l'époque, Michaëlle Jean.

Un seul premier ministre peut être sous serment en même temps au Canada, et la prestation de serment de Justin Trudeau doit avoir lieu mercredi prochain, en même temps que celle de son conseil des ministres.

Stephen Harper est resté silencieux depuis le discours qu'il a prononcé à Calgary à la suite de sa défaite électorale lundi soir. Ce discours avait d'ailleurs lui aussi semé la confusion: en aucun temps, M. Harper n'a dit qu'il démissionnait de son poste. Dans une déclaration diffusée en même temps que l'allocution, le président du Parti conservateur du Canada, John Walsh, a annoncé qu'un processus de nomination d'un nouveau chef serait mis en vigueur. M. Walsh n'a pas non plus prononcé le mot «démission».

À Ottawa au lendemain de la soirée électorale, de mauvaises langues disaient sourire en coin que M. Harper s'était peut-être «fait démissionner par son war room», le lieu névralgique d'où les stratèges coordonnent la campagne du parti. La blague se voulait une allusion à une campagne jugée mauvaise de la part des troupes conservatrices, et de la tendance de M. Harper à vouloir tout contrôler durant la décennie qu'il a été au pouvoir.

Quoi qu'il en soit, le premier ministre sortant semble bel et bien sur le point de céder sa place: la Presse canadienne a rapporté hier qu'il avait commencé à déménager de sa résidence officielle du 24, Promenade Sussex à Ottawa et qu'il comptait retourner dans ses terres de Calgary, tout en continuant à siéger comme simple député à la Chambre des communes.

Quant à Justin Trudeau et sa famille, ils emménageront pour une période indéterminée dans une résidence appelée «Cottage Rideau» ou «Bungalow Rideau», qui se trouve dans les jardins de Rideau Hall, la résidence du gouverneur général. Le 24 Sussex a besoin de rénovations importantes et une évaluation des travaux déterminera quand le premier ministre élu pourra prendre possession de la maison dans laquelle il a grandi, durant le règne de son père.