Depuis le démantèlement de l'ACDI, le ministère des Affaires étrangères a ordonné aux principales ambassades canadiennes de confier l'aide internationale à un diplomate de haut rang. Toutefois, La Presse Canadienne a appris que cette tâche s'ajoute plutôt à celles d'un fonctionnaire déjà en poste - et non à un nouvel employé.

Lorsque le gouvernement conservateur a décidé l'an dernier d'abolir l'Agence canadienne de développement international (ACDI), plusieurs y ont vu une manoeuvre visant à inféoder au commerce l'aide au développement. Le gouvernement parlait plutôt d'une mesure de rationalisation, tout en faisant converger les différentes facettes de la politique étrangère canadienne: l'aide au développement, le commerce extérieur et les affaires étrangères.

Les sous-ministres aux Affaires étrangères et au Développement international ont alors ordonné aux ambassades des grandes capitales de confier les questions d'aide au développement à un diplomate de haut rang - mais on croyait qu'à l'instar des délégués commerciaux, il s'agirait d'un nouveau poste.

Or, pour «maximiser le potentiel de convergence» des différentes facettes de la politique étrangère, ce dossier a été confié «aux ressources humaines existantes» des ambassades, lit-on dans une note interne datant de novembre 2014, qui a été obtenue par La Presse Canadienne grâce à la Loi sur l'accès à l'information.

Dans une autre note, on rappelle que le nouveau ministère, né de la fusion des Affaires étrangères et du Développement international, «exige une intégration et une coordination» à l'échelle des représentations diplomatiques, afin d'assurer une liaison avec les principaux partenaires du Canada en matière d'aide au développement, notamment les États-Unis et le Royaume-Uni.

Selon le porte-parole aux Affaires étrangères Nicolas Doire, 17 représentations diplomatiques ont ainsi hérité jusqu'ici de cette nouvelle mission d'aide au développement, sans embaucher de personnel supplémentaire.

Peau de chagrin

Les budgets consacrés par le Canada au développement international n'ont pas augmenté depuis cinq ans. En novembre 2013, le gouvernement conservateur annonçait que sa politique étrangère serait dorénavant axée principalement sur «la diplomatie économique».

Le premier ministre Stephen Harper a ainsi annoncé en mars dernier que le Service des délégués commerciaux du Canada obtiendrait du financement supplémentaire pour embaucher du personnel et accroître ses activités, afin d'assister les gens d'affaires canadiens à l'étranger.

La porte-parole libérale en matière de coopération internationale, Kristy Duncan, y voit une preuve que depuis la fusion des deux ministères, l'aide au commerce a pris le dessus sur l'aide au développement. Selon le porte-parole néo-démocrate en matière d'affaires étrangères, Paul Dewar, les conservateurs ont privé l'aide au développement «de centaines de millions de dollars» au cours des dernières années, des sommes qui auraient été fort utiles pour embaucher du personnel.

L'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) révélait récemment que les dépenses totales consacrées par le Canada à l'aide internationale avaient atteint leur plus bas niveau en plus de dix ans, à 0,24 pour cent du PIB. Elles étaient de 0,34 pour cent en 2011.

L'organisme Oxfam demandait récemment à tous les pays d'adhérer à la cible de 0,7% du PIB suggérée par les Nations unies, à l'aube d'une importante conférence internationale sur le développement, la semaine prochaine en Éthiopie.