Bon pour le développement économique, décevant pour la santé et insuffisant pour l'infrastructure: voilà la lecture préliminaire qu'a fait le ministre des Finances du Québec, Carlos Leitao, du budget fédéral déposé mardi.

Il se réjouit notamment de la baisse annoncée des impôts pour les petites et moyennes entreprises (PME) et de l'argent mis de côté pour les initiatives de transport collectif.

Mais là où le bât blesse surtout, selon le ministre de Finances, c'est le maintien de la nouvelle formule fédérale de transferts en santé aux provinces, une situation pourtant connue depuis quelques années. M. Leitao s'est plaint qu'Ottawa a ignoré ses demandes à ce sujet et que la formule imposée par le gouvernement conservateur ne tient pas compte des réalités démographiques des provinces.

Il assure que le Québec, allié avec d'autres provinces qui formulent la même critique, ont encore du temps pour faire changer d'idée Ottawa.

Quant aux initiatives de fractionnement du revenu pour les familles et l'augmentation du plafond du CÉLI, M. Leitao a été prudent, soulignant toutefois qu'il aurait fait d'autres choix.

Pour le Parti québécois, il y un contraste «saisissant» entre le budget fédéral de mardi et celui déposé par le gouvernement libéral du Québec.

Ottawa distribue des bonbons alors que le Québec a dévoilé un budget d'austérité, a déclaré le porte-parole péquiste en matière de Finances, Nicolas Marceau.

Il n'y a rien pour le Québec dans ce budget fédéral, a-t-il d'ailleurs déploré.

Mais ce n'est pas une surprise, a-t-il indiqué du même souffle, car le premier ministre Philippe Couillard n'a rien demandé.

La CAQ abonde dans son sens: le budget fédéral représente l'abandon des demandes des Québécois, a fait valoir le député François Bonnardel, porte-parole du parti en matière de finances.

Quant à la porte-parole de Québec solidaire, Françoise David, elle espère qu'il s'agit là du dernier budget des conservateurs.

Réactions de l'opposition

La grande oubliée du budget fédéral est la classe moyenne, ont dénoncé en choeur les deux partis d'opposition à Ottawa, accusant au passage le gouvernement Harper d'avoir présenté aux Canadiens un équilibre budgétaire de façade.«Monsieur Harper persiste et signe: il en offre beaucoup - des milliards - pour les mieux nantis de notre société et des miettes pour la classe moyenne», a résumé en point de presse le chef du Nouveau Parti démocratique (NPD), Thomas Mulcair.

Il estime que rien, mis à part la réduction du taux d'imposition des petites et moyennes entreprises (PME) promise dans le budget - il passera de 11 à 9 pour cent -, ne favorise la création d'emploi au pays.

Le chef libéral Justin Trudeau est sur la même longueur d'onde. «Le budget donne de l'aide à ceux qui n'en ont pas besoin. Il n'y a aucun plan pour la croissance économique, il n'y a pas d'aide pour la classe moyenne», a-t-il affirmé.

Les deux dirigeants ont promis de renverser au moins deux mesures contenues dans le budget: le fractionnement du revenu pour les familles ayant des enfants de moins de 18 ans et l'augmentation du plafond annuel de cotisation à un Compte d'épargne libre d'impôt (CÉLI), qui passera de 5500 $ à 10 000 $ dès cette année.

M. Mulcair n'a pas voulu s'engager à déposer un budget équilibré si le NPD était porté au pouvoir, se contentant d'affirmer que cela serait «toujours une priorité» et de plaider que les gouvernements néo-démocrates provinciaux avaient les meilleures feuilles de route en cette matière.

Son vis-à-vis en a pour sa part fait la promesse. «C'est un fait établi que les libéraux équilibrent les budgets et que les conservateurs font des déficits. Notre plateforme sera complètement chiffrée, fiscalement responsable et comportera des budgets équilibrés», a dit M. Trudeau.

Les deux adversaires politiques ont par ailleurs critiqué la façon dont les conservateurs s'y sont pris pour renouer avec l'équilibre budgétaire et dégager un surplus de 1,4 milliard $.

Le gouvernement Harper y est notamment parvenu en vendant ses actions de General Motors le 6 avril, une transaction dont le gain net a été chiffré à 2,1 milliards $, et en réduisant le montant de l'enveloppe réservée aux imprévus, la faisant passer de 3 à 1 milliard $.

Pour Thomas Mulcair, il est malavisé d'amputer le fonds de prévoyance, qui devrait servir en cas d'urgence seulement. «On ne peut pas piger dedans le jour du budget parce qu'il manque une couple de milliards de dollars», a-t-il pesté.

Ces manoeuvres ont vraisemblablement été mises en oeuvre à des fins électoralistes, alors que le scrutin fédéral se profile à l'horizon, a analysé M. Trudeau.

«On a un gouvernement qui a vendu ses parts de General Motors, qui est en train d'essayer de vendre des ambassades pour essayer de tout faire pour remplir une promesse électoraliste sans vraiment réfléchir à l'importance d'investir pour la classe moyenne», a-t-il dénoncé.

Le chef du Bloc québécois, Mario Beaulieu, a pour sa part affirmé que le budget présenté mardi par le ministre des Finances Joe Oliver ne contenait rien de bon pour le Québec.

«On nous redonne avec la main gauche une petite partie de ce qu'on nous a pris avec la main droite et on voudrait qu'on dise merci», a-t-il déploré.

Il a par ailleurs dit regretter le peu de sommes réservées à l'environnement dans cet exercice financier.