Le chef du Nouveau Parti démocratique (NPD), Thomas Mulcair, s'engage à fournir aux services de police du pays un système pour «suivre à la trace» toutes les armes à feu. Mais cet outil, promet le chef néo-démocrate, ne sera pas un registre comme celui créé par le gouvernement libéral et détruit par le gouvernement conservateur.

À la sortie de sa réunion de caucus mercredi après-midi, M. Mulcair commentait encore une fois l'approche du 25e anniversaire du massacre de Polytechnique. C'est là qu'il s'est engagé, sans donner trop de détails, à améliorer le contrôle des armes à feu; une réclamation portée depuis 25 ans par les survivantes de la tragédie.

M. Mulcair n'a pas décrit la forme que doit prendre le nouvel outil, mais a promis que «ça peut se faire par une manière un peu plus légère» que le défunt registre.

«Ce n'est certainement pas le registre qui existait avant parce qu'il a prouvé son inefficacité à cause de sa lourdeur bureaucratique. Mais on est catégorique: la police doit suivre à la trace chaque arme à feu», a insisté M. Mulcair.

Les ministres conservateurs n'ont pas tardé à accuser M. Mulcair de vouloir ramener le registre honni par une partie de leur électorat.

«J'ai beaucoup de mal à suivre la position des néo-démocrates», a critiqué le ministre de la Sécurité publique, Steven Blaney, alors que son collègue Maxime Bernier reprenait le mantra de son gouvernement: «Ils veulent faire en sorte que les chasseurs et les agriculteurs soient des criminels».

De son côté, le chef libéral, qui arborait mercredi le ruban blanc, n'a pas voulu réagir au plan néo-démocrate. Justin Trudeau a répété, encore une fois, qu'un gouvernement qu'il dirigerait ne ressusciterait pas le registre qui a coûté des votes à ses prédécesseurs.

«Un gouvernement responsable va pouvoir trouver des moyens qui ne vont pas diviser les Canadiens pour protéger les gens par rapport au contrôle des armes à feu», a-t-il dit en point de presse.

Les moyens qui seront mis de l'avant par les libéraux viendront «en temps et lieu», mais pas à trois jours du 25e anniversaire du massacre.

«Cette semaine, c'est une semaine pour se souvenir de la violence faite aux femmes, se souvenir de 25 ans... de tristes souvenirs», a insisté M. Trudeau.

«Cette semaine, c'est une semaine douloureuse. Revivons ensemble ces événements-là, que tous ensemble on se rappelle qu'on ne veut plus, personne, que ça arrive de nouveau», affirmait quant à lui le ministre Denis Lebel, à son arrivée au parlement.

M. Lebel a refusé d'en dire plus. Le ministre conservateur, tout comme sa collègue Shelly Glover, n'était même pas prêt à indiquer s'il participera à l'une ou l'autre des nombreuses cérémonies organisées pour le 25e anniversaire de Polytechnique.

«Tout ce qui va être dit cette semaine risque d'être interprété pour ou contre quelque chose qui s'est passé qui n'aurait pas dû se passer», a lâché le ministre avant de s'engouffrer dans sa réunion de caucus.

Un sujet délicat

Il faut dire que tout ce qu'ont dit ces derniers jours les élus conservateurs au sujet de la tragédie a été retenu contre eux.

Ainsi, cette semaine, on a reproché au ministre Blaney d'avoir dit que «la plus belle réponse» au massacre est de diplômer plus de femmes ingénieures. On a blâmé le ministre de la Justice, Peter MacKay, pour avoir dit qu'on ne pourrait «jamais comprendre ce qui s'est passé, pourquoi cela s'est passé, pourquoi ces femmes ont été ciblées» par Marc Lépine.

Le gouvernement de Stephen Harper ne peut faire oublier qu'il a détruit le registre des armes d'épaule, un outil obtenu par les survivantes de la fusillade, après une longue lutte. Chaque mot prononcé sur la tragédie de 1989 par les conservateurs devient donc suspect.

«Je pense qu'ils ont creusé un trou depuis longtemps. Je ne pense pas que ça va changer», a laissé tomber le libéral Marc Garneau.

«Suite à Steven Blaney, on a eu Peter MacKay, ça c'est le vrai fond de la pensée des conservateurs là-dessus», a accusé M. Mulcair. «Chassez le naturel et il revient au galop», a ajouté le chef du NPD.

Encore mardi, le député conservateur Robert Sopuck se levait en Chambre pour se vanter d'avoir détruit le registre des armes d'épaule. Le premier ministre Harper, lui, a refusé mercredi de répondre à M. Trudeau, qui lui demandait de rencontrer les membres du groupe «Poly se souvient» pour discuter de contrôle des armes à feu.