Deux autres ex-employées du Nouveau Parti démocratique (NPD) qui disent avoir été congédiées injustement sortent de l'ombre et accusent le parti d'avoir tenté de les convaincre de renoncer à porter plainte contre le député qui les employait.

Bouchra Taïbi, qui travaillait pour la députée Hélène Leblanc, et Mélanie Bellemare, qui était à l'emploi du député François Choquette, accusent toutes les deux le NPD de congédiement abusif. La première a déposé une poursuite à l'été et la seconde devrait le faire avant le 31 décembre.

Dans le cas de Mme Taïbi, il est question de harcèlement en milieu de travail. La plaignante soutient que l'un de ses anciens collègues de travail s'en prenait verbalement à elle et que la députée Hélène Leblanc, en plus d'avoir tenté de l'«isoler», n'est pas intervenue.

«Elle [Mme Leblanc] remettait en question ma capacité à résister au stress tout en disant qu'elle appréciait énormément mon professionnalisme. Donc il y avait vraiment un double discours», a-t-elle confié en entrevue téléphonique avec La Presse Canadienne.

Le NPD est aussi pointé du doigt pour n'avoir «en aucune manière tenté de résoudre cette situation de harcèlement dont la demanderesse était la victime», est-il écrit dans la poursuite présentée le 26 août dernier en Cour supérieure du Québec.

Mélanie Bellemare reproche quant à elle au député François Choquette de l'avoir licenciée sans raison valable alors qu'elle venait tout juste d'obtenir sa permanence, quelques mois après avoir été embauchée.

«Tout allait super bien, je n'avais que des félicitations, et tout d'un coup, il m'emmène aux ressources humaines en me disant qu'il y avait des choses à modifier dans mon travail», a relaté l'ancienne adjointe parlementaire à l'autre bout du fil.

Quelques semaines plus tard, elle était congédiée.

Le député de Drummond lui aurait reproché d'avoir échoué à apporter les correctifs nécessaires à son travail, alors que la nature de celui-ci avait pourtant changé - Mme Bellemare était passée du bureau d'Ottawa à celui de la circonscription québécoise pour remplacer une autre employée.

Un camouflage?

Les deux femmes soutiennent que le NPD a tenté de tuer dans l'oeuf les démarches de contestation qu'elles avaient entamées.

«Quand le représentant syndical a été mis au courant de ce qui se passait [le congédiement], on a décidé de déposer un grief», se souvient Mme Bellemare.

«Mais avant de le déposer, il m'a dit que les ressources humaines m'offraient quatre semaines de salaire en échange de mon silence, en échange de laisser tomber mon grief», a-t-elle poursuivi.

Même son de cloche du côté de Bouchra Taïbi, dont le parcours professionnel comme adjointe néo-démocrate au traitement des dossiers a été ponctué de deux arrêts de travail pour fatigue mentale et physique, puis pour «trouble d'adaptation aggravé».

Après le dépôt de son grief, le NPD lui avait fait une offre: «Il y a eu des tentatives de m'offrir de retourner à temps partiel [après son arrêt de travail] en échange que je laisse tomber mon grief», a-t-elle exposé.

En cela, leur histoire rejoint celle de Fabiola Ferro, une autre ex-employée néo-démocrate.

Celle-ci a intenté une action judiciaire contre le député néo-démocrate Sylvain Chicoine, lui reprochant un congédiement abusif et un refus de prendre des démarches pour mettre fin au harcèlement dont elle dit avoir été victime.

Dans sa poursuite, intentée le 7 novembre, Mme Ferro soutient que la directrice des opérations du NPD lui a offert un nouveau poste à condition qu'elle retire sa plainte de harcèlement et qu'elle «signe une quittance en renonçant à son droit de poursuivre Chicoine et le NPD».

La directrice adjointe aux communications stratégiques pour l'aile parlementaire du parti, Valérie Dufour, n'a pas voulu commenter les dossiers, puisque ceux-ci «pourraient se retrouver devant les tribunaux».

Le syndicat critiqué

Bouchra Taïbi et Mélanie Bellemare conservent un goût extrêmement amer de leur expérience avec le syndicat qui représente les employés du NPD, le Syndicat des communications, de l'énergie et du papier (SECP).

Elles soutiennent que celui-ci s'est montré incapable de les défendre adéquatement.

Sur la colline du Parlement, le NPD est la seule formation politique dont les employés sont syndiqués.

Mais la véritable portée de sa juridiction est nébuleuse.

Car dans les faits, si les députés sont considérés comme les patrons de leurs employés, les chèques de ces derniers sont signés par la Chambre des communes.

«Aux yeux du Conseil canadien des relations industrielles [le CCRI, un tribunal quasi judiciaire responsable de l'interprétation et de l'application du Code canadien du travail], on n'est pas des employés du Nouveau Parti démocratique, mais du Parlement», a résumé Mélanie Bellemare.

La chose a été confirmée par Me Louis Mac Habee, un procureur représentant la Chambre des communes, est-il souligné dans la poursuite intentée par Mme Taïbi.

«En bref, nous sommes complètement laissés à nous-mêmes, et l'employeur peut faire ce qu'il veut; il n'y a aucune loi qui l'empêche d'abuser de son pouvoir», a-t-elle dénoncé, disant avoir été «témoin de congédiements qui n'étaient pas faits selon les normes» au NPD.